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Posts Tagged ‘(Gaston Couté)’

Sur le Pressoir (Gaston Couté)

Posted by arbrealettres sur 7 avril 2024



Sous les étoiles de septembre
Notre cour a l’air d’une chambre
Et le pressoir d’un lit ancien;
Grisé par l’odeur des vendanges
Je suis pris d’un désir étrange
Né du souvenir des païens.

Couchons ce soir
Tous les deux, sur le pressoir!
Dis, faisons cette folie?…
Couchons ce soir
Tous les deux sur le pressoir,
Margot, Margot, ma jolie!

Parmi les grappes qui s’étalent
Comme une jonchée de pétales,
O ma bacchante! roulons-nous,
J’aurai l’étreinte rude et franche
Et les tressauts de ta chair blanche
Ecraseront les raisins doux.

Sous les baisers et les morsures,
Nos bouches et les grappes mûres
Mêleront leur sang généreux;
Et le vin nouveau de l’Automne
Ruisselera jusqu’en la tonne,
D’autant plus qu’on s’aimera mieux!

Au petit jour, dans la cour close,
Nous boirons la part de vin rose
Oeuvrée de nuit par notre amour;
Et, dans ce cas, tu peux m’en croire,
Nous aurons pleine tonne à boire
Lorsque viendra le petit jour!

(Gaston Couté)

Illustration: Gérard de Lairesse

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LES VIGNES SONT GELEES… (Gaston Couté)

Posted by arbrealettres sur 2 janvier 2022




    
LES VIGNES SONT GELEES…

La vendange s’annonçait belle
Et l’espoir, pour nous,
En sourires de fleurs nouvelles
S’ouvrait au bout des jeunes pousses,
Mais, cette nuit, la lune rousse
A fait de ses coups !

Mon bel ami, les vignes sont gelées !
Tes deux arpents si verts sur le coteau,
Faut pas y songer !
Si l’on ne boit pas de vin cette année,
On boira de l’eau !

Si ta belle vendange est morte
La nuit du grand froid,
Nos vingt ans toujours bien se portent !
Les bourgeons roulent sous les souches
Mais il reste encor sur ma bouche
Des baisers pour toi !

Oui, nous n’irons pas en vendange
Dans les arpents blonds
Lorsque viendra la mi-septembre,
Mais dans le champ de nos caresses,
L’an tout au long, sans fin ni cesse,
Nous vendangerons !

Le vin doux dont l’âme pétille
Ne jaillira pas
Du pressoir aux rondes sébilles,
Mais de ton cœur tendre et farouche,
Comme du creux d’un pressoir rouge
L’Amour jaillira !

(Gaston Couté)

 

 

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NOËL DE LA FEMME QUI VA AVOIR UN PETIOT ET QUI A FAIT UNE MAUVAISE ANNEE (Gaston Couté)

Posted by arbrealettres sur 24 décembre 2021



Illustration: Charles de Groux
    
NOËL DE LA FEMME QUI VA AVOIR UN PETIOT ET QUI A FAIT UNE MAUVAISE ANNEE

Les cloches essèment au vent
La joi’ de leur carillonnée,
Qui vient me surprendre, rêvant,
Dans le coin de ma cheminée ;
Noël ! Noël ! c’est aujourd’hui
Que Jésus vint sur sa litière,
Noël ! mon ventre a tressailli
Sous les plis de ma devantière.

O toi qui vas, dans mon sabot,
Me descendre, avec un petiot,
De la misère et de la peine,
Noël ! Noël ! si ça se peut
Attends encore ! Attends un peu ! …
Attends jusqu’à l’année prochaine !

Noël ! Noël !cette anné’-ci
Le froid tua les blés en germe,
Tous nos ceps ont été roussis ;
Le « jeteux d’sorts », sur notre ferme,
A lancé son regard mauvais
Qui fait que sont « péri’s » mes bêtes,
Que mes pigeons se sont sauvés
Et que mon homme perd la tête.

Tous mes gros sous, à ce train-là,
Ont filé de mon bas de laine,
Quand reviendront ? Je ne sais pas !
Mais, à la récolte prochaine,
J’espère voir les blés meilleurs
Et meilleure aussi la vendange,
Pour mon bonheur et le bonheur
De l’enfant dont j’ourle les langes.

(Gaston Couté)

 

 

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LES OIES INQUIETES (Gaston Couté)

Posted by arbrealettres sur 24 décembre 2020



Illustration: Christiane Marette
    
LES OIES INQUIETES

Les oies qui traînent dans le bourg
Ainsi que des commères grasses
Colportant les potins du jour,
En troupeaux inquiets s’amassent.
Un gros jars qui marche devant
Allonge le cou dans la brume
Et frissonne au souffle du vent
De Noël qui gonfle ses plumes…

Noël ! Noël !
Est-ce au ciel
Neige folle
Qui dégringole,
Ou fin duvet d’oie
Qui vole.

Leur petit œil rond hébété
A beau s’ouvrir sans trop comprendre
Sur la très blanche immensité
D’où le bon Noël va descendre,
A la tournure du ciel froid,
Aux allures des gens qui causent,
Les oies sentent, pleines d’effroi,
Qu’il doit se passer quelque chose.

Les flocons pâles de Noël
– Papillons de l’Hiver qui trône –
Comme des présages cruels
S’agitent devant leur bec jaune,
Et, sous leur plume, un frisson court
Qui, jusque dans leur chair se coule.
L’heure n’est guère aux calembours,
Mais les oies ont la chair de poule.

Crrr !… De grands cris montent parmi
L’aube de Noël qui rougeoie
Comme une Saint-Barthélemy
Ensanglantée du sang des oies ;
Et, maintenant qu’aux poulaillers
Les hommes ont fini leurs crimes,
Les femmes sur leurs devanciers
Dépouillent les corps des victimes.

(Gaston Couté)

 

 

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LE PATOIS DE CHEZ NOUS (Gaston Couté)

Posted by arbrealettres sur 1 août 2018




    
LE PATOIS DE CHEZ NOUS

Dans mon pays, dès ma naissance
Les premiers mots que j’entendis
Au travers de mon «innocence »
Semblaient venir du paradis
C’était ma mère, toute heureuse,
Qui me fredonnait à mi-voix
Une simple et vieille berceuse,
En patois…

Le joli patois de chez nous
Est très doux !
Et mon oreille aime à l’entendre.
Mais mon cœur le trouve plus doux,
Et plus tendre !

Dans mon pays, au temps des sèves,
A l’âge où d’instant en instant,
L’amour entrevu dans nos rêves
Se précise dans le Printemps.
Cueillant les fleurs que l’avril sème
Un jour, pour la première fois,
Une fille m’a dit : « Je t’aime »
En patois…

De mon pays blond et tranquille
Quand je suis parti « déviré »
Par le vent soufflant vers la Ville,
Mes vieux et ma mie ont pleuré.
Pourtant, jusqu’au train en partance
M’ont accompagné tous les trois
Et m’ont souhaité bonne chance
En patois…

Loin du pays, dans la tourmente
Hurlante et folle, de Paris,
Où ma pauvre âme se lamente
Un bonheur tantôt m’a surpris !
Des paroles fraîches et gaies
Ont apaisé mes noirs émois :
J’ai croisé des gens qui causaient
Mon patois…

(Gaston Couté)

 

 

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LA PAYSANNE (Gaston Couté)

Posted by arbrealettres sur 1 août 2018



Illustration: Paula Modersohn-Becker
    
LA PAYSANNE

Paysans dont la simple histoire
Chante en nos cœurs et nos cerveaux
L’exquise douceur de la Loire
Et la bonté -des vins nouveaux, (bis)
Allons-nous, esclaves placides,
Dans un sillon où le sang luit
Rester à piétiner au bruit
Des Marseillaises fratricides ?…

Refrain
En route! Allons les gâs ! Jetons nos vieux sabots
Marchons,
Marchons,
En des sillons plus larges et plus beaux !

A la clarté des soirs sans voiles,
Regardons en face les cieux ;
Cimetière fleuri d’étoiles
Où nous enterrerons les dieux. (bis)
Car il faudra qu’on les enterre
Ces dieux féroces et maudits
Qui, sous espoir de Paradis,
Firent de l’enfer sur la « Terre » !…

Ne déversons plus l’anathème
En gestes grotesques et fous.
Sur tous ceux qui disent : « Je t’aime »
Dans un autre patois que nous ; (bis)
Et méprisons la gloire immonde
Des héros couverts de lauriers :
Ces assassins, ces flibustiers
Qui terrorisèrent le monde !

Plus -de morales hypocrites
Dont les barrières, chaque jour,
Dans le sentier des marguerites,
Arrêtent les pas de l’amour !… (bis)
Et que la fille-mère quitte
Ce maintien de honte et de deuil
Pour étaler avec orgueil
Son ventre où l’avenir palpite !…

Semons nos blés, soignons nos souches !
Que l’or nourricier du soleil
Emplisse pour toutes nos bouches
L’épi blond, le raisin vermeil !… (bis)
Et, seule guerre nécessaire
Faisons la guerre au Capital,
Puisque son Or : soleil du mal,
Ne fait germer que la misère.

(Gaston Couté)

 

 

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PETIT POUCET (Gaston Couté)

Posted by arbrealettres sur 1 août 2018



Illustration
    
PETIT POUCET

Puisqu’on ne trouve plus sa vie
Au bout des sillons de chez nous,
Un jour, j’ai dû quitter ma mie
Pour la ville où pleuvent les sous ;
Et, ce jour-là, dans ma mémoire :
Lit clos des contes du passé,
J’ai vu se réveiller l’histoire,
L’histoire du Petit Poucet.

Refrain
En partant chez l’ogresse,
L’ogresse qu’est la vie,
J’ai semé des caresses
Pour retrouver ma mie !

Poucet semait parmi les sentes
Son pain bis et ses cailloux blancs.
Sur le corps blanc de ma charmante
Quel semis de baisers brûlants !
Sur son front et ses yeux en fièvres,
Sur son ventre et ses seins en fleurs,
Le geste rose de mes lèvres
A semé l’Amour de mon cœur.

Plus tard, pour retrouver ma mie :
« Où sont mes baisers d’autrefois ? »
Les baisers sont de blanches mies
Sous le bec des oiseaux des bois.
Plus un seul ! sur sa chair impure,
Un seul ! de mes baisers brûlants !
Tous sont partis sous la morsure
Du baiser des autres galants !

Ma mie qui ne se souvient guère
Se rappelle pourtant qu’un jour,
Je l’ai frappée dans ma colère
D’une gifle de mon poing lourd.
Elle me reproche ce geste
Toujours avec la même ardeur.
Le mal est un caillou qui reste
Dans les pauvres sentiers du cœur !

(Gaston Couté)

 

 

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LE PRÉ D’AMOUR (Gaston Couté)

Posted by arbrealettres sur 1 août 2018




    
LE PRÉ D’AMOUR

Lorsque Gros-Jean se maria,
Londerira,
Avec la coquette Toinette,
En dot son père lui donna
Un pré tout blanc de pâquerettes.

Or, la Toinette le trompa,
Londerira,
Un beau soir sous les talles d’aunes
Et, par le pré, soudain leva
Un carré de boutons d’or jaunes.

Quand Gros Jean s’aperçut de ça,
Londerira,
Tua le galant et l’amante
Et, par tout le pré, ce jour-là
Fleurirent des roses sanglantes.

Maintenant oublis et frimas,
Londerira,
Ont fané les fleurs illusoires
Et, dans le pré, sur le verglas,
Rampent de grandes ronces noires.

(Gaston Couté)

 

 

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NOUVEAU CREDO DU PAYSAN (Gaston Couté)

Posted by arbrealettres sur 31 juillet 2018



Illustration: Léon-Augustin Lhermitte
    
NOUVEAU CREDO DU PAYSAN

Bon paysan -dont la sueur féconde
Les sillons clairs où se forment le vin
Et le pain blanc qui doit nourrir le monde,
En travaillant, je dois crever de faim ;
Le doux soleil, de son or salutaire,
Gonfle la grappe et les épis tremblants ;
Par devant tous les trésors de la terre,
Je dois crever de faim en travaillant !

Refrain
Je ne crois plus, dans mon âpre misère,
A tous les dieux en qui j’avais placé ma foi,
Révolution ! déesse au coeur sincère,
Justicière au bras fort, je ne crois plus qu’en toi ! (bis)

Dans mes guérets, au temps de la couvraille,
Les gros corbeaux au sinistre vol brun
Ne pillent pas tous les grains des semailles :
Leur bec vorace en laisse quelques-uns !
Malgré l’assaut d’insectes parasites,
Mes ceps sont beaux quand la vendange vient
Les exploiteurs tombent dessus bien vite
Et cette fois, il ne me reste rien !

Au dieu du ciel, aux maîtres de la terre,
J’ai réclamé le pain de chaque jour :
J’ai vu bientôt se perdre ma prière
Dans le désert des cieux vides et sourds ;
Les dirigeants de notre République
Ont étalé des lois sur mon chemin,
D’aucuns m’ont fait des discours magnifiques,
Personne, hélas ! ne m’a donné de pain !

Levant le front et redressant le torse,
Las d’implorer et de n’obtenir rien,
Je ne veux plus compter que sur ma force
Pour me défendre et reprendre mon bien.
Entendez-vous là-bas le chant des Jacques
Qui retentit derrière le coteau,
Couvrant le son des carillons de Pâques :
C’est mon Credo, c’est mon rouge Credo

(Gaston Couté)

 

 

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LES MAINS BLANCHES, BLANCHES… (Gaston Couté)

Posted by arbrealettres sur 31 juillet 2018



Illustration: Alfred Roll
    
LES MAINS BLANCHES, BLANCHES…

Elle avait les mains blanches, blanches,
Comme deux frêles branches
D’un aubier de mai ;
Elle avait les mains blanches, blanches
Et c’est pour ça que je l’aimais.

Elle travaillait aux vignes ;
Mais les caresses malignes
Du grand soleil
Et l’affront des hâles
Avaient respecté sa chair pâle
Où trônait mon baiser vermeil.

Et ses mains restaient blanches, blanches,
Comme deux frêles branches
D’un aubier de mai.
Et ses mains restaient blanches, blanches
Et toujours ! toujours ! je l’aimais

Mais un monsieur de la ville
Avec ses billets de mille
Bien épinglés
Vint trouver son père
Aux fins des vendanges dernières
Et s’arrangea pour me voler…

Me voler la main blanche, blanche,
Comme une frêle branche
D’un aubier de mai,
Me voler la main blanche, blanche
La main de celle que j’aimais !

Au seul penser de la scène
Où l’Autre, en sa patte pleine
D’or et d’argent,
Broierait les mains chères
Au nez du maire et du vicaire,
J’ai laissé ma raison aux champs,

Lui ! toucher aux mains blanches, blanches,
Comme deux frêles branches
D’un aubier de mai,
Lui ! toucher aux mains blanches, blanches,
Aux mains de celle que j’aimais

La veille du mariage,
Chez le charron du village
Je fus quérir
Un fer de cognée,
Et m’en servis à la nuitée,
Quand ma belle fut à dormir.

J’ai coupé ses mains blanches, blanches,
Comme deux frêles branches
D’un aubier de mai,
J’ai coupé ses mains blanches, blanches…
C’était pour ça que je l’aimais !

(Gaston Couté)

 

 

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