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Poésie

Posts Tagged ‘inattendu’

Emparons-nous de ce feu (Arthur Teboul)

Posted by arbrealettres sur 29 octobre 2023




    
Pensez à un nom

Laissez un nom commun vous venir à l’esprit.
Écrivez-le.
Qu’il vous plaise ou non.
Qu’il vous trahisse ou non.
Écrivez-le.

Il est presque certain qu’un adjectif vous passera alors par la tête
– pour qualifier ce nom arrivé par hasard.
Cet adjectif-là, écrivez-le aussi.
À la suite du nom. Ne le refusez pas. Cette place lui revient.
Il fait fi de toute cohérence, de toute grâce ?
Il est grotesque, banal ? Qu’importe !
Écrivez-le.

Tournevis déchu

De cette association inattendue,
entre ce nom venu par inadvertance et cet adjectif non désiré,
naît une image nouvelle, inconnue,
un trésor qui réveille la part magique des mots et notre part de mystère.
Cette part de soi-même inconnue à soi-même.

De ce rapprochement fortuit jaillissent des étincelles
qui nous révèlent une histoire du monde
oubliée, fabuleuse, archaïque et ultramoderne.
Le grain de sable entre dans la machine de l’habitude,
court-circuite sa routine,
et provoque une lumière accidentelle.

Passé, présent, futur se télescopent en un éclair
qui illumine un instant l’envers du monde.

Il y a quelque chose de plus.
Si on ne se laisse pas intimider
par cette langue de l’enfance et de l’inconnu,
le réel s’offre dans une profondeur nouvelle.
Il s’élargit.
En le nommant autrement, on le fait advenir autrement.
On s’autorise un rêve, une vision.

Il suffit de le dire :

Passants minimalistes
Ça y est, ils existent.
Regardons-les traverser.

Lune abstraite
Voilà qu’elle nous éclaire !

Cet exercice en est un parmi d’autres
pour s’accoutumer à la langue frontalière de la poésie.
Pour rendre à notre langage, en le détournant de son usage quotidien, sa vitalité.
Pour le rendre de nouveau fidèle à la vie, l’invraisemblable.

Quand on dispose les mots de tous les jours dans un ordre déconcertant,
on résiste ordinairement à l’emploi purement utilitaire de la parole.
À l’emploi purement pratique de nos vies.
La poésie est un contre-pouvoir.
Ce n’est pas anodin qu’elle soit un secret si bien gardé.

Emparons-nous de ce feu.

(Arthur Teboul)

Recueil: Le Déversoir Poèmes minute
Editions: Seghers

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Ces gens de tout repos (Marie Noël)

Posted by arbrealettres sur 30 Mai 2023



    

… ces gens de tout repos,
Qui font tout bonnement tous une même chose.
Je m’ennuie à mourir sur ce chemin morose…
Je n’aime pas brouter l’herbe déjà tondue,
Ce petit foin sans goût, sans fleur inattendue.
Rien de nouveau, rien, rien… Tout est toujours pareil.

Je m’échappe, je cours à travers la campagne,
Je bondis pour trouver quelque peu de montagne,
Je grimpe à des talus très hauts de chemins creux.

On est très bien tout seul, sans moutons, si loin d’eux
Qu’ils semblent tout au fond du val des pierres grises.
Les thyms inviolés ont des saveurs exquises…
Je cours, je broute ici, puis là… je perds du temps,
Je hume l’odeur froide et sauvage des vents.

(Marie Noël)

Recueil: Poètes d’aujourd’hui – Marie Noël
Editions: Pierre Seghers

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L’intensité l’inattendu (Mireille Fargier-Caruso)

Posted by arbrealettres sur 17 février 2023



Illustration: Edward Hopper
    
L’intensité l’inattendu
force fragile du désir
un éclair du dedans
que l’on croit sans limites

comme Ulysse dépasser le Chaos
trouver dans l’univers sa place
dans les déchirements de l’Histoire
condamnés à choisir

il nous faut vivre avec ces failles
chercher dans nos voyages des indices
pour avoir raison d’espérer

en coulisse des songes plus vifs que nous
tenus à l’impossible

même si le partage étranglé
même si tu te sais périssable

dis-toi que maintenant est là devant toi

ouvre-le

(Mireille Fargier-Caruso)

Recueil: Comme une promesse abandonnée
Traduction:
Editions: Bruno Doucey

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Les orties, la fumée (Alain Borne)

Posted by arbrealettres sur 26 Mai 2022


orties

Les orties, la fumée,
Les épines fleuries,
La cendre, l’herbe
dans tant d’absence éparse,
une dépouille humaine,
une rencontre nue,
un écho de plaisir,
une fleur animale,
deux yeux perdus,
un été familier,
une mesure d’ombre,
un soleil limité.
Boire très calme
la foudre inattendue ;
la tige découverte après l’étang de pierre,
et revenir encore à l’incendie parfait,
rêveur sous la paille,
et vénérer la paille où l’incendie se fait,
tenter contre la mort ce simple appareillage
Où ne pendent aux mâts que des voiles de flammes
Quelqu’un au bord du vertige,
une doublure agile,
un miroir de blessures.

(Alain Borne)

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Clef de voûte (Pierre Dhainaut)

Posted by arbrealettres sur 23 janvier 2022


clef_voute_chapelle_rayonnante_cathedrale_bourges_1

D’une syllabe inattendue, le poème reçoit
sa clef de voûte, la résonnance?

(Pierre Dhainaut)

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Quel flamboiement inattendu (Fiodor Tiouttchev)

Posted by arbrealettres sur 17 décembre 2021



    
Quel flamboiement inattendu,
Que cet arc dans les hauteurs,
Qui s’élance à travers les nues
Dans son éphémère splendeur !

Un bout fiché dans les feuillages,
Il embrasse le ciel à demi,
Il se perd dans les nuages,
Et tout là-haut s’évanouit.

Oh, cette brève vision irisée,
Quel délice pour les yeux !
C’est un cadeau qui t’est donné,
Saisis-le, vite, saisis-le !

Regarde, il pâlit déjà,
Encore une minute — eh oui !
Il s’en est allé
comme s’en ira
Tout ce qui fait notre vie.

(Fiodor Tiouttchev)

Recueil: POÈMES
Traduction: traduit du russe par Sophie Benech
Editions: Interférences

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LA POÉSIE (Eugenio Montejo)

Posted by arbrealettres sur 16 août 2021




    
Poem in French, Spanish, Dutch, English, Italian, German, Portuguese, Sicilian, Romanian, Polish, Greek, Chinese, Arab, Hindi, Japanese, Farsi, Icelandic, Russian, Filipino, Hebrew, Tamil, Bangla, Irish, Serbian, Armenian, Macedonian, Indonesian, Malay, Catalan

Poem of the Week Ithaca 693 “POETRY”, EUGENIO MONTEJO, Venezuela (1938-2008)

La editorial Pre-Textos acaba de publicar Obra Completa I Poesía Eugenio Montejo

– All translations are made in collaboration with Germain Droogenbroodt –

LA POÉSIE

La poésie sillonne la terre seule,
de sa voix elle partage le mal du monde
elle ne demande rien
pas même des mots.

Elle vient de loin, inattendue, ne s’annonce jamais ;
mais possède la clé de la porte.
En entrant elle s’arrête et nous regarde.
Alors elle ouvre la main et nous donne
une fleur ou un caillou, une chose secrète,
mais si intense que le cœur
bat la chamade. Et nous nous réveillons.

(Eugenio Montejo)

Germain Droogenbroodt – Elisabeth Gerlache

***

LA POESIA

La poesía cruza la tierra sola,
apoya su voz en el dolor del mundo
y nada pide
ni siquiera palabras.

Llega de lejos y sin hora, nunca avisa;
tiene la llave de la puerta.
Al entrar siempre se detiene a mirarnos.
Después abre su mano y nos entrega
una flor o un guijarro, algo secreto,
pero tan intenso que el corazón palpita
demasiado veloz. Y despertamos.

EUGENIO MONTEJO

***

DE POËZIE

De poëzie doorkruist de aarde alleen,
ze deelt met haar stem het leed van de wereld
ze vraagt niets
niet eens om woorden.

Ze komt van ver, onverwachts, meldt zich nooit aan;
maar ze heeft de sleutel van de deur.
Bij het binnenkomen stopt ze en kijkt ons aan.
Dan opent zij haar hand en geeft ons
een bloem of een kiezelsteen, iets geheims,
maar zo intens dat het hart
te snel gaat kloppen. En we ontwaken.

Vertaling Germain Droogenbroodt

***

POETRY

Poetry crosses the earth alone,
gives its voice to the pain of the world
and asks for nothing
not even words.

It comes from far away, unexpected, without notice;
it has the key of the door.
On entering, it always stops to look at us.
Then opens its hand and gives us
a flower or a pebble, something secret,
but so intense that the heart beats
too fast. And we wake up.

Translation Germain Droogenbroodt – Stanley Barkan

***

POESIA

La poesia percorre sola la terra,
dà la sua voce al dolore del mondo
e non chiede nulla
nemmeno parole.

Viene da lontano, inaspettata, senza mai avvisare.
Ha le chiavi della porta.
Entrando, sempre si ferma a guardarci.
Poi apre le mani e ci dona
un fiore o un ciottolo, qualcosa di segreto,
ma così intenso che il cuore batte
troppo forte. E ci destiamo.

Traduzione di Germain Droogenbroodt – Luca Benassi

***

DIE POESIE

Die Poesie durchstreift die Erde allein,
sie legt ihre Stimme auf den Schmerz der Welt
und bittet um nichts
nicht einmal um Worte.

Sie kommt aus der Ferne, unerwartet, sagt sich nie an;
sie hat den Schlüssel zur Tür.
Beim Eintreten bleibt sie stehen und schaut uns an.
Dann öffnet sie ihre Hand und gibt uns
eine Blume oder einen Kieselstein, etwas Geheimnisvolles,
aber so intensiv, dass das Herz
zu schnell klopft. Und wir erwachen.

Übersetzung Germain Droogenbroodt – Wolfgang Klinck

***

LA POESIA

A poesia atravessa a terra sozinha,
apoia a sua voz na dor do mundo
e nada pede,
nem mesmo palavras.

Chega de longe e sem hora, nunca avisa;
tem a chave da porta.
Quando entra, pára sempre para nos observar.
Depois, abre a mão e dá-nos
uma flor ou um seixo, algo secreto,
mas tão intenso que o coração bate
apressadamente. E despertamos.

Tradução portuguesa: Maria do Sameiro Barroso

***

PUISIA

La puisia viaggia sula nta lu munnu,
Appoya la so vuci supra lu duluri di lu munnu
E non dumanna nenti,
Mancu palori.

Veni di luntanu senza urariu, senza avvisu.
Havi la chiavi di la porta.
Ntrasennu, si ferma e nni talia.
Poi apri la manu e nni duna
un çiuri, na pitrudda, quacchi cosa sicreta,
ma accussì ntenza ca lu cori palpita
chiù forti. E nni svigghiamu.

Traduzioni in siciliano di Gaetano Cipolla

***

POEZIE

Singură, poezia cutreieră pământul,
cu vocea sprijinită în suferința lumii
și nu cere nimic
nu vrea nici un cuvânt.

Vine din depărtări, brusc, neanunțată;
are cheia ce ușa ne-o deschide.
Se oprește întotdeauna la intrare, ca să ne vadă.
Apoi deschide mâna și ne întinde
o floare sau o pietricică, ceva misterios,
dar de-o putere atât de mare, încât inima bate
grăbită. Și atunci, ne deșteptăm.

Traducere Gabriela Căluțiu Sonnenberg
Translation into Romanian by Gabriela Căluțiu Sonnenberg

***

POEZJA

Poezja przemierza ziemię samotnie,
wpisuje swój głos w ból świata
i o nic nie prosi,
choćby nawet o słowa.

Dociera z oddali, niespodziewana, nigdy nie zapowiadana
trzyma klucz do bramy
wchodząc, zawsze zwleka, aby na nas popatrzeć.
Potem otwiera dłoń i podaje nam
kwiat lub kamyk, coś tajemniczego,
lecz tak przejmującego, że aż serce trzepocze
zbyt szybko. I nagle przebudzamy się.

Przekład na polski: Mirosław Grudzień – Małgorzata Żurecka
Translation into Polish by Mirosław Grudzień – Małgorzata Żurecka

***

ΠΟΙΗΣΗ

Η ποίηση διασχίζει τη γη μονάχη
δίνει φωνή στον πόνο του κόσμου
δίχως να ζητά ανταμοιβή
ούτε καν λέξεις.

Έρχεται απρόσμενα κι από μακριά δίχως προειδοποίηση,
Έχει της πόρτας το κλειδί.
Μπαίνοντας μας αντικρύζει
ανοίγει την παλάμη της και μας χαρίζει
ένα λουλουδι ή ένα βότσαλο, κάποιο μυστικό
που τόσο πολύ κάνει την καρδιά μας να χτυπά.
Και τότε ξυπνούμε.

Μετάφραση Μανώλη Αλυγιζάκη
Translated by Manolis Aligizakis

***

诗 歌

诗歌独自穿越大地,
向世界的痛苦发出她的声音
而不自求什么
更无话语。

她来自远方,出乎意料,从无征兆。
她拥有开门之匙。
进门时,它总停步看看我们。
然后张开手就递给我们
一朵花或一块卵石,神密物体,
但是激情太浓了导至心跳
过快。而我们就醒来。

原作:委内瑞拉 尤金尼奥·蒙特乔(1938)
英译:比 利 时 杰曼·卓根布鲁特
汉译:中 国 周道模 2021-7-18
Translation into Chinese by William Zhou

***

الشِّعْر

لِوَحْدِهِ: يَعْبُرُ الشِّعْرُ الأَرْضَ…
يُعْطِي صَوْتَهُ لِجَمِيعِ آلَامِ العَالَمِ
وَلاَ يَطْلُبُ شَيْئًا
وَلَا حَتَّى الكَلِمَات.

إِنَّهُ يَأْتِي مِن بَعِيدٍ، غَيْرُ مُتَوَقَعٍ، بِدُونِ سَابِقِ إِنْذَار.
لَدَيِهِ مِفْتَاحُ البَابِ.
عِنْدَ الدُّخُولِ ، يَتَوَقَّفُ دَائِمًا وَيَنْظُرُ إِلَينَا.
ثُمَّ يَفْتَحُ يَدَهُ وَيُعطِينَا
زَهْرَةً أو حَجَرًا صَغِيرًا ، شَيئًا سِرِّيًا
لَكِنَّها – تِلْكَ العَطَايَا- شَدِيدَةً لِدَرَجَةِ أَنَّ القَلْبَ يَنْبُضُ
بِسُرعَةٍ جٍدًا. وَنَسْتَيْقِظ.

ايغوينيــو مونتيخــو، فنزويلا (1938)
ترجمة للعربية: عبد القادر كشيدة

ترجمة للعربية: عبد القادر كشيدة
Translation into Arab by Mesaoud Abdelkader

***

कविता

कविता अकेले पृथ्वी को पार करती है,
दुनिया के दर्द को आवाज देता है
और कुछ नहीं मांगता
शब्द भी नहीं।

यह दूर से आता है, अप्रत्याशित, कभी चेतावनी नहीं।
उसके पास दरवाजे की चाबी है।
प्रवेश करते ही वह हमेशा हमारी ओर देखना बंद कर देता है।
फिर अपना हाथ खोलता है और हमें देता है
फूल या कंकड़, कुछ रहस्य,
लेकिन इतना तेज कि दिल धड़कता है
बहुत तेज़। और हम जागते हैं।

यूजेनियो मोंटेजो, वेनेज़ुएला (1938)
ज्योतिर्मया ठाकुर का हिंदी अनुवाद

Hindi translation by Jyotirmaya Thakur.

***

詩は地球の上を渡り
その声を世界の痛みに届ける
何も求めない
言葉ですらも

それは遠くから来る
期待もせずに
決して予告もなく
それは扉の鍵を持ち
入ると必ず立ち止まって私たちを見る
そして手を広げ
私たちに花や小石、何か秘密のものを与える
それは、とても強いので
心臓は高鳴り
私たちは目を覚ますのだ

エウへニオ・モンテホ(ベネズエラ, 1938 – 2008)

Translation into Japanese by Manabu Kitawaki

***

شعر

شعر به تنهایی زمین را درمی‌نوردد.
و صدای رنج جهان می‌شود
بی‌ هیچ چشمداشتی
نه حتی چند کلمه.

از دور دست‌ها می‌آید، بی مقدمه، بی اخطار.
کلید در را دارد.
در ورودی همیشه می‌ایستد و به ما نگاه می‌کند.
سپس دست‌هایش را باز می‌کند و به ما
گل می‌دهد و یا ریگی، چیزی نهان،
اما چیزی بسیار قوی که قلب را به تپش می‌اندازد.
و ما بیدارمی‌شویم.

یوجینو مونتیجو، ونزوئل ( ۱۹۳۸)
مترجم : سپیده زمانی
Translation into Farsi by Sepideh Zamani

***

LJOÐIÐ

Ljóðið fer hjálparlaust yfir jörðina,
gefur veraldarkvölinni rödd sína
og krefst einskis
ekki einu sinni orða.

Það kemur langt að, óvænt, fyrirvaralaust.
Það er með útidyralykilinn.
Þegar það kemur inn, stansar það og lítur á okkur.
Opnar síðan lófann og gefur okkur
blóm eða stein, eitthvað dulið,
en svo magnað að hjatað slær
of hratt. Og við vöknum.

Þór Stefánsson þýddi samkvæmt enskri þýðingu Germains DroogenbroodT
Translation into Icelandic by Þór Stefánsson

***

ПОЭЗИЯ

Одна летит поэзия по миру,
поет про муки мира и утраты,
она у нас не просит ничего,
не просит даже слов.

Она приходит так всегда внезапно,
издалека, без извещений,
откроет дверь своим ключом.
Она зайдет и нас окинет взглядом.
Протянет руку и вручит
цветочек, камешек, какую-то загадку.
Все забурлит, и даже сердце
побежит быстрее. И мы проснемся.

Перевод Гермайна Дрогенбродта
Перевод на русский язык Дарьи Мишуевой
Translation into Russian by Daria Mishueva

***

MGA TULA

Mag-isang tinawid ng tula ang kalupaan,
inihandog ang tinig nito sa mga paghihirap ng mundo
at walang hiningi
kahit na mga salita.

Ito ay nagmumula sa malayo, hindi inaasahan,walang pasabi.
Meron itong susi ng pinto.
Sa pagpasok, palagian itong humihinto upang tayo ay tingnan.
At saka ibubukas ang kanyang mga kamay at saka ibibigay sa atin
ang isang bulaklak o isang maliit na bato, isang bagay na lihim,
ngunit napakatindi na ang puso ay tumibok
ng napakabilis. At kami ay nagising.

Translated into Filipino by Eden Soriano Trinidad

***

שירה

שִׁירָה חוֹצָה אֶת הָאֲדָמָה לְבַדָּהּ,
תּוֹמֶכֶת בְּקוֹלָהּ בִּכְאֵב הָעוֹלָם
וְאֵינָהּ מְבַקֶּשֶׁת מְאוּמָה
אֲפִלּוּ לֹא מִלִּים.

הִיא בָּאָה מִמֶּרְחַקִּים, אֵינָהּ צְפוּיָה, לְעוֹלָם אֵינָהּ מַזְהִירָה.

יֵשׁ לָהּ אֶת הַמַּפְתֵּחַ לַדֶּלֶת.
בִּכְנִיסָתָהּ, הִיא תָּמִיד עוֹצֶרֶת לְהִסְתַּכֵּל בָּנוּ.
וְאָז הִיא פּוֹתַחַת אֶת יָדָהּ וְנוֹתֶנֶת לָנוּ
פֶּרַח אוֹ חַלּוּק נַחַל, מַשֶּׁהוּ סוֹדִי,
אַךְ עָצְמָתִי כָּל כָּךְ שֶׁהַלֵּב פּוֹעֵם
מַהֵר מִדַּי. וַאֲנַחְנוּ מִתְעוֹרְרִים.
מספרדית לאנגלית: ג’רמיין דרוגנברודט
תרגום מאנגלית לעברית: דורית ויסמן

Translation into Hebrew by Dorit Weisman

***

கவிதை

கவிதை இந்த நிலவுலகை மாத்திரம் கடக்கிறது
இந்த உலகின் வலிகளுக்காக குரல் கொடுக்கிறது
எத்ஜையும் கேட்பதில்லை
சொற்களைக்கூட.
மிகத்துலைவிலிருந்து,எதிர்பாராமல்,
முன் எச்சரிக்கை எதுவுமின்றி அதனிடம் கதவின்
திறவுகோல் இருக்கிறது!
நுழைந்தவுடன், நம்மைப் பார்ப்பதற்காக நிற்கிறது,
பிறகு கைகளைத் திறந்து
மலரை, கூழாங்கல்லை இரகசியமாகத் தருகிறது
ஆனால் அழுத்தமாகத் தருகிறது
நமது இதயம் விரைவாகத் துடிக்கிறது.
நாம் எழுந்திருக்கிறோம்.
ஆக்கம்

Translation into Tamil by DR. N V Subbaraman

***

কবিতা

কবিতা একাকী পারাপার করে বেড়ায় পৃথিবীতে,
তার কণ্ঠ দেয় পৃথিবীর বেদনায়
আর চায় না কিছুই বিনিময়ে
এমনকি নয় শব্দ।

সে আসে বহু দূর হতে, আকস্মিক, কোন আভাস ছাড়াই ।
তার আছে দরজার চাবি ।
প্রবেশ করতেই, সে সব সময় থেমে ফিরে চায় আমাদের পানে ।
তখন বাড়িয়ে দেয় তার হাত আর আমাদের দেয়
একটি ফুল বা একটি নুড়িপাথর, যা কিছুটা রহস্যময়,
কিন্তু তা এতটাই ঐকান্তিক যে হৃদস্পন্দন বেড়ে
যায় দ্রুত ।
আর আমরা জেগে উঠি ।

ইউজেনিয়ো মন্টেজো, ভেনিজুয়েলা (১৯৩৮)
অনুবাদ জার্মেইন ড্রোজেনব্রুড্ট

Bangla Translation: – Tabassum Tahmina Shagufta Hussein

***

AN FHILÍOCHT

Siúlann an fhilíocht an domhan ina haonar,
cuireann sí in iúl ábhair bhróin an tsaoil
ní hiarrann sí tada ar ais,
moladh ná mileán.

Tagann sí chugainn ó chian, gan choinne, go tobann;
osclaíonn sí an chomhla.
Ag dul thar tairseach, stopann sí chun breathnú orainn.
Osclaíonn sí a lámh go fial chun
Bláth nó cloichín, rud rúndiamhair,
a thabhairt, rud a chuireann fuadach
faoin gcroí. Agus dúisímid.

Aistrithe go Gaeilge ag Rua Breathnach
Translation into Gaelic by Rua Breathnach

***

POEZIJA

Poezija krstari zemljom sama,
daje svoj glas bolovima sveta
a ne traži ništa,
čak ni reči.

Dolazi izdaleka, neočekivano, bez upozorenja,
ima ključ od vrata.
Kad uđe, stane i gleda nas.
Onda otvori šaku i pruži nam
cvet, belutak nešto tajno,
ali tako važno da srce počne da kuca
prebrzo.
Onda se probudimo.

Sa engleskog prevela S. Piksiades
Translation into Serbian by S. Piksiades

***

ПОЕЗИЈА

Поезијата сама чекори по земјата,
својот глас ѝ го дава на болката што светот ја чувствува
и ништо не бара
не бара ниту зборови.

Од далеку доаѓа, неочекувано без предупредување.
Го има клучот од вратата.
При влегување, секогаш застанува за да нѐ погледне.
Потоа ја отвора дланката и ни подава
цвет или камче, нешто скришно,
но толку интензивно што срцата ни бијат
пребрзо. И тогаш се будиме.

Превод од англиски на македонски јазик: Даниела Андоновска-Трајковска
Translation from English into Macedonian: Daniela Andonovska-Trajkovska

***

ՊՈԵԶԻԱ

Պոեզիան կտրում-անցնում է Երկիրը միայնակ,
իր ձայնը տալիս է աշխարհի ցավին
և ոչինչ չի խնդրում,
նույնիսկ՝ բառեր:

Գալիս է հեռվից, անսպասելի,
առանց նախազգուշացման:
Նա ունի դռան բանալին:
Մտնելուն պես միշտ դադարում է նայել մեզ վրա:
Հետո բացում է իր ձեռքը և տալիս մեզ
ծաղիկ կամ խճաքար, ինչ-որ մի գաղտնիք,
բայց այնպես եռանդուն, որ սիրտը բաբախում է
շատ արագ: Եվ մենք արթնանում ենք:

Եվգենիո Մոնտեյո, Վենեսուելա (1938)

Թարգմանությունը Գերման Դրուգենբրուդտի
Հայերեն թարգմանությունը Արմենուհի Սիսյանի
Translation into Armenian by Armenuhi Sisyan

***

PUISI

Puisi melintasi bumi sendirian,
agih suara pada derita dunia
tidak bertanya apa-apa
bahkan tidak berkata-kata.

Kedatangan dari jauh, tak terduga, tampa informasi
kunci pintu dia miliki.
Saat hadir, dia berhenti dan melirik kami.
Membuka telapak tangan dan memberi kami
sekuntum bunga atau biji-bijian, yang tersembunyi
tapi begitu kuat sehingga jantung berdetak
terlalu cepat. Kami bangun dan bergerak

Translated into Indonesian by Lily Siti Multatuliana

***

PUISI

Puisi merentasi alam sendirian,
bersuara tentang keperitan dunia.
dan tidak meminta suatu apa pun
walau kata-kata pun.

Datangnya dari kejauhan, tanpa dijangka, tiada amaran
ia memiliki kunci ke pintu.
Apabila masuk, ia sentiasa memandang ke kita.
Kemudian membuka tangannya dan memberi kita
sekuntum bunga atau seketul batu, sesuatu yang rahsia,
namun sungguh hebat membuat jantung berdegup
amat laju. Dan kita tersedar.

Malayan translation by Dr. Irwan Abu Bakar

***

LA POESIA

La poesia creua la terra sola,
recolza la seva veu al dolor del món
i res demana
ni tan sols paraules.

Arriba de lluny i sense hora, mai avisa;
té la clau de la porta.
Entrant sempre s’atura a mirar-nos.
Després obre la seva mà i ens lliura
una flor o un còdol, quelcom secret,
però tan intens que el cor batega
massa veloç. I despertem.

Traducció al català: Natalia Fernández Díaz-Cabal
Translation into Catalan by Natalia Fernández Díaz-Cabal

 

Recueil: ITHACA 693
Editions: POINT
Site: http://www.point-editions.com/en/

FRIENDS ITHACA
Holland: https://boekenplan.nl
Poland: http://www.poetrybridges.com.pl
France: https://arbrealettres.wordpress.com
Poland: http://www.poetrybridges.com.pl
Romania: http://www.logossiagape.ro; http://la-gamba.net/ro; http://climate.literare.ro; http://www.curteadelaarges.ro.; https://cetatealuibucur.wordpress.com
Spain: https://www.point-editions.com; https://www.luzcultural.com
India: https://nvsr.wordpress.com; https://ourpoetryarchive.blogspot.com>
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Absence du poème ? (António Ramos Rosa)

Posted by arbrealettres sur 21 juin 2021




    
Absence du poème ? Clameur de rien.
Ou l’harmonie inattendue. L’incision brusque
d’un appel, à nouveau une pure invention !

Je t’appelle mon désir, ma terre,
mon sol, montagne, mon cheval,
je t’appelle sur la terre, ce papier.
Mais ce sont mes entrailles vives qui t’appellent!

Loin de la vie, je ne sais quelle vie existe,
— faite seulement de lignes ou d’élans dans le
vide, elle sait qu’elle mourra de sa mort. Mais
l’ignorance renaît, et l’espérance en elle!

(António Ramos Rosa)

 

Recueil: Le cycle du cheval
Traduction: du portugais par Michel Chandeigne
Editions: Gallimard

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Le Paradis n’est pas artificiel (Ezra Pound)

Posted by arbrealettres sur 27 Mai 2021



Le Paradis n’est pas artificiel
mais.. il n’existe qu’en fragments inattendus.

(Ezra Pound)

Découvert ici: http://www.ipernity.com/blog/lara-alpha

 

 

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MIROIR (Nuno Jùdice)

Posted by arbrealettres sur 2 février 2021



Illustration: Christiane Rabasse
    
MIROIR

L’évidence du blanc est aussi obscène
que l’été littoral de l’adolescence.
La chaux coagulée dans les bassins attire
les mouches que le soir n’effraie pas.
Avec un manche à balai, je les repousse
vers le fond, encore vivantes, et je les vois
disparaître dans la matière immaculée. Parfois,
lors de ces fins de journée, le vent se lève,
agite les branches des amandiers où
les fruits commencent à sécher; ici et là, les
feuilles voltigent. L’eau de la chaux acquiert
une transparence inattendue, et
un visage surgit dans son miroir : toi,
que le temps a emportée il y a longtemps, tu me regardes,
de nouveau, comme si tu n’avais jamais
cessé de le faire.

(Nuno Jùdice)

 

Recueil: Un chant dans l’épaisseur du temps suivi de méditation sur des ruines
Traduction: Michel Chandeigne
Editions: Gallimard

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