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L’ESPOIR EN DIEU (Paul Fort)

Posted by arbrealettres sur 19 février 2024




    
L’ESPOIR EN DIEU

L’espoir en Dieu
que je m’en vais cherchant,
où donc est-il?

plus loin dans la prairie?
plus loin encore au fond du bois fleuri?
plus loin, plus loin,
tout à la fin des champs?

Où donc est-il? au zénith du ciel bleu?
contre ce mur où l’on dort au soleil?
sur l’étang clair? dans le coin des abeilles?
ce verger rouge, est-ce l’espoir en Dieu?

Dans la rosée qu’un soir de lune irise, puis évapore,
ai-je enfin retrouvé l’espoir en Dieu qui se redivinise?
Par Dieu lui-même, hélas !
Tout est rêvé.

L’espoir en Lui que je m’en vais cherchant, est-il du monde?
Allons, ô ma démence,
trouver, plutôt que de l’espoir aux champs,
dans les déserts la mort et le silence.

(Paul Fort)

Recueil: Ballades du beau hasard
Editions: Flammarion

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DUO D’AMOUR FOU (extrait « Epiphanies ») (Henri Pichette)

Posted by arbrealettres sur 3 novembre 2023



   

Illustration: Henri Matisse

    
DUO D’AMOUR FOU (extrait « Epiphanies »)

La scène est au soleil de midi, l’été, entre plaine et forêt.

Le Poète : Le lit des choses est grand ouvert.
Je me suis endormi, pensant que c’était trop beau
et que la terre s’échapperait.
Je craignais tout des ventilations absurdes d’une nuit en colère.
Les matins me fustigeaient.
Je vivais crédulement.
Sourcier infatigable, je cherchais l’Orifice originel,
premier ouvrage par où passer la tête et crier au Soleil.

J’ai trouvé ! Je confectionne sur mesure une amoureuse.
Ma femme sera mon paysage sensuel, le diorama de mon âme.
Le monde s’est embelli.
J’aspire littéralement l’avenir.
La clarté du jour m’assiste.
Je grimpe à l’échelle de corde de l’enthousiasme.
O c’est plus que jamais l’heure des diamants érectiles !

Les alentours se métamorphosent.
De coutume le cœur de la biche ne boule pas ainsi, l’eau a moins de charme,
les oiseaux ne tombent pas si verticalement sur le ciel,
l’air n’offre pas sa charpente avec autant de pompe ou de vigueur.
Je vois enfin le plus beau frisson de l’arbre.
Et le silence a trop vite plongé son glaive dans la pierre
pour que je ne devine rien : Tu es là.

L’Amoureuse : Je t’aime.

Le Poète : Je t’ai vue de toutes parts.
Je n’osais décoller tes lèvres du poème.
Il y a tant de choses qui nous invitent
aux festins de la terre.
Toi présente je n’ai plus que ta vérité
pour sauver les mots de leur honte.
Je voudrais pouvoir me taire.
Or pourquoi ai-je toujours une question à poser ?

L’Amoureuse : Dis-moi.

Le Poète : A quoi reconnais-tu que je t’aime ?

L’Amoureuse : A ta volonté. Et toi ?

Le Poète : Au plaisir que tu as à m’obéir.

L’Amoureuse : Ne suis-je point ta femme ?

Le Poète : Il est vrai.
Tu te donnes fière, fine, florissante, agenouillée,
rejetée en arrière, arche harmonieuse
d’où les serviteurs fous de lumière s’envolent ;
étale, pour tracer à la langue les routes fraîches qui mènent au cri.

L’Amoureuse : Quand il fait jour je pense à la nuit

Le Poète : et la nuit je fêle ta voix,
je m’initie à ton parfum, tes seins fermissent,
tu tires mes yeux

L’Amoureuse : et tu me frises
et me tutoies avec des gants.

Le Poète : Je tords la joie de vivre.
Je te visite entière. Je t’irise.
A mon aise je t’incendie.

L’Amoureuse : Tu me parcours

Le Poète : C’est alors que j’oublie le revers des villes,
le souci de vivre au milieu des flèches.
Je retrouve intacte mon enfance.
Je jouerais des siècles avec tes boucles.
Je t’emmènerai au Pays des Manières limpides.
Je t’accrocherais un cristal de neige éternelle au corsage.
Tu choisirais tes lacs, tes rives, tes chaînes de montagnes.
Tu commanderais ton ciel, ta saison, les robes des lendemains.
Pour toi, sur les chemins de ronde,
nous sortirions minuit de nos poches
et nous ferions du feu.

L’Amoureuse : Comme je t’appartiens !
Tu as le sens des mouvements qui me grisent,
et la diction d’un fanal.
Mes flots se teintent.
Tu renverses l’azur en moi.
Tu jalonnes mon ventre d’ifs tout allumés.
C’est la fête. Je t’accompagne.

Nous descendons au ralenti un escalier de pourpre,
je me voile dans l’écume, le vent se lève,
tu t’effaces devant les portes, où suis-je ?
Mais tu ne réponds pas, tu m’inspires des flambeaux de passage,
tu déplies soigneusement la volupté, tu détournes ma soif,
tu me prolonges, tu me chrysalides
et je suis de nouveau élue.

Alors je danse, je danse, je danse !
comme une flamme debout sur la mer !
les paupières fermées. Je suis nue, j’en ai conscience
et je te remercie parce que la fin de la folie est imprévisible.
Tu échafaudes des merveilles.
Tu me crucifies à toi.
Je suis bien.

Laisse-moi te dire : j’ai besoin d’être voyagée comme une femme.
Depuis des jours et des nuits tu me révèles.
Depuis des nuits et des jours
je me préparais à la noce parfaite.
Je suis libre avec ton corps.
Je t’aime au fil de mes ongles,
je te dessine.
Le cœur te lave. Je t’endimanche.
Je te filtre dans mes lèvres.
Tu te ramasses entre mes membres.
Je m’évase.
Je te déchaîne

Le Poète : Je t’imprime

L’Amoureuse : je te savoure

Le Poète : je te rame

L’Amoureuse : je te précède

Le Poète : je te vertige

L’Amoureuse : et tu me recommences

Le Poète : je t’innerve te musique

L’Amoureuse : te gamme te greffe

Le Poète : te mouve

L’Amoureuse : te luge

Le Poète : te hanche te harpe te herse te larme

L’Amoureuse : te mire t’infuse te cytise te valve

Le Poète : te balise te losange te pylône te spirale te corymbe

L’Amoureuse : l’hirondelle te reptile t’anémone
te pouliche te cigale te nageoire

Le Poète : te calcaire te pulpe te golfe te disque

L’Amoureuse : te langue le lune te givre

Le Poète : te chaise te table te lucarne te môle

L’Amoureuse : te meule

Le Poète : te havre te cèdre

L’Amoureuse : te rose te rouge te jaune
te mauve te laine te lyre te guêpe

Le Poète : te troène

L’Amoureuse : te corolle

Le Poète : te résine

L’Amoureuse : te margelle

Le Poète : te savane

L’Amoureuse : te panthère

Le Poète : te goyave

L’Amoureuse : te solive te salive

Le Poète : te scaphandre

L’Amoureuse : te navire te nomade

Le Poète : t’arque-en-ciel

L’Amoureuse : te neige

Le Poète : te marécage

L’Amoureuse : te luzule

Le Poète : te sisymbre te gingembre
t’amande te chatte

L’Amoureuse : t’émeraude

Le Poète : t’ardoise

L’Amoureuse : te fruite

Le Poète : te liège

L’Amoureuse : te loutre

Le Poète : te phalène

L’Amoureuse : te pervenche

Le Poète : te septembre octobre novembre décembre
et le temps qu’il faudra

(Henri Pichette)

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LE SANCTUAIRE DE NOOS (Odette Romeu)

Posted by arbrealettres sur 15 septembre 2023




    
LE SANCTUAIRE DE NOOS

Entre dans mon sanctuaire.
Il vogue sur l’estuaire
Où la mer pénètre à flots
Pour que le reflux t’emporte
Au rythme d’autres galops,
Laisse ton corps à la porte

Plonge dans mes eaux sereines
J’ai des algues souveraines
Qui désagrègent les ans
Et ton âme à leur fragrance
Dans le remous des jusants
S’abreuvera de jouvence

Si tu crains que cette rose
Ne se fane à peine éclose
Certes il ne tient qu’à toi,
A ta rigueur de vestale,
De transmuer dans la foi
En or pur chaque pétale

Si ma lumière irisée
Te paraît trop tamisée
Si trop prompte à se voiler
Sa flamme toujours vacille,
C’est par crainte d’aveugler
Ton regard qui se dessille

Si ma surface habitée
Te paraît trop limitée,
S’il te coûte d’accepter,
Dans ta requête obstinée
S’il t’arrive de heurter
Une porte condamnée,

C’est que n’a pas sonné l’heure
C’est qu’il faut qu’un spectre meure
C’est que pour ouvrir j’attends
Que ton aile soit plus forte
Et qu’au-dessus des étangs
Dans l’éther elle t’emporte

Vers un autre sanctuaire
Sans limite ni frontière
Vaste comme l’univers
Où sans fin, de sphère en sphère,
Tu verras à découvert
Tout s’embraser de lumière.

(Odette Romeu)

Recueil: Sur les rives du Jourdain
Editions: émergences

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Ici (André du Bouchet)

Posted by arbrealettres sur 25 juillet 2023



arc_en_ciel_blanc
il y a quelquefois, après le labour,
comme un arc-en-ciel de terre
dont le dégradé irise les terres en surplomb de la route,
ici.

(André du Bouchet)

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Dans le regard d’un enfant (Claude Haller)

Posted by arbrealettres sur 17 juin 2022




    
Dans le regard d’un enfant

J’ai vu des continents
Des îles lointaines
De fabuleux océans
Des rives incertaines
Dans le regard d’un enfant

J’ai vu des châteaux
Des jardins à la française
Des bois des coteaux
De blancs rochers sous la falaise
Dans le regard d’un enfant

J’ai vu les Champs-Élysées
L’Arc de Triomphe la Tour Eiffel
Le Louvre et la Seine irisée
Comme un arc-en-ciel
Dans le regard d’un enfant

(Claude Haller)

Recueil: Poèmes du petit matin
Traduction:
Editions: Hachette

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Pour fondre et mêler (Daini)

Posted by arbrealettres sur 27 mars 2022



Illustration
    
Pour fondre et mêler
les perles de la rosée,
Le vent peut souffler!
Chaque goutte, aux fleurs posées,
Y reste seule irisée.

(Daini)

Recueil: Poëmes de la libellule
Traduction: Judith Gautier
Editions: Beaux-Arts de Paris

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Quel flamboiement inattendu (Fiodor Tiouttchev)

Posted by arbrealettres sur 17 décembre 2021



    
Quel flamboiement inattendu,
Que cet arc dans les hauteurs,
Qui s’élance à travers les nues
Dans son éphémère splendeur !

Un bout fiché dans les feuillages,
Il embrasse le ciel à demi,
Il se perd dans les nuages,
Et tout là-haut s’évanouit.

Oh, cette brève vision irisée,
Quel délice pour les yeux !
C’est un cadeau qui t’est donné,
Saisis-le, vite, saisis-le !

Regarde, il pâlit déjà,
Encore une minute — eh oui !
Il s’en est allé
comme s’en ira
Tout ce qui fait notre vie.

(Fiodor Tiouttchev)

Recueil: POÈMES
Traduction: traduit du russe par Sophie Benech
Editions: Interférences

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Vois comme sur la vaste rivière (Fiodor Tiouttchev)

Posted by arbrealettres sur 28 novembre 2021




    
Vois comme sur la vaste rivière,
Portés par les eaux réveillées,
Vers l’immense infini de la mer,
Les blocs de glace voguent d’affilée.

Qu’ils s’irisent au soleil éclatant,
Ou bien la nuit, dans les ténèbres,
Tous, fondant inexorablement,
Ils voguent vers un même terme.

Tous ensemble, petits et grands,
Perdant la forme qu’ils avaient jadis
Tous, insensibles et indifférents,
S’en vont rejoindre les fatals abysses.
Ô toi, mirage de notre esprit,

Toi, notre petit
Moi humain,
N’est-ce point là le sens de ta vie,
N’est-ce point là ton vrai destin ?

(Fiodor Tiouttchev)

Recueil: POÈMES
Traduction: traduit du russe par Sophie Benech
Editions: Interférences

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SUR LE LAC DU PARC AUX SENTEURS DE MOUSSE (Egon Schiele)

Posted by arbrealettres sur 16 août 2021



    

SUR LE LAC DU PARC AUX SENTEURS DE MOUSSE

cerné de noir,
glisse dans une écume irisée
le silencieux cygne haut et rond.

CYGNE BLANC

***

ÜBER DEN MOOSRIECHENDEN

schwarzumrandeten Parksee
gleitet im regenbogenfarbenen Schaum
der hohe ruhige runde Schwan.

WEISSER SCHWAN

(Egon Schiele)

 

Recueil: Moi, éternel enfant
Traduction:Nathalie Miolon
Editions: Comp’act

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Il est cette pierre au fond du puits (Bernard Montini)

Posted by arbrealettres sur 3 mars 2021



Il est cette pierre au fond du puits.
Parfois des étoiles irisent la surface de l’eau, au-dessus de sa tête.
Lui retient son souffle, afin de ne pas dissoudre leur image.

(Bernard Montini)


Illustration: Guy Braun

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