Arbrealettres

Poésie

Posts Tagged ‘rigueur’

NUL BONHEUR (Rosa Burel)

Posted by arbrealettres sur 13 mai 2023




Illustration: Jean-Jacques Henner
    
NUL BONHEUR

Nul bonheur ne peut me toucher
Tout a fui par ton absence
Une fleur vient m’effaroucher
L’oiseau chante ma réticence.
Nul bonheur ne m’aide à revivre
Ton silence est un poids cruel
Si lourd à mon âme en duel…
Car sur la terre il me faut vivre…

Nul bonheur ne m’a plus comblée
Le jardin me parait désert
Dans sa blessure, l’exilée
N’entend que son morne concert.
Nul bonheur ne franchit ma porte
Le silence frappe mon coeur
Seule ma peine n’est point morte
Heureux qui ne sent sa rigueur.

(Rosa Burel)

Recueil: à coeur ouvert
Editions: Bertout

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

Souvent je reviens m’asseoir dans ces lieux (Michel Ange)

Posted by arbrealettres sur 25 février 2023



    

Souvent je reviens m’asseoir dans ces lieux
où mon coeur, pour la première fois , perdit sa liberté;
dans ces lieux que les chagrins,
autant que les plaisirs que j’y éprouvai,
m’ont rendus chers ;

J’y retrouve des souvenirs tantôt tristes, tantôt riants,
selon que tu te plais, amour,
à me rappeler les rigueurs ou les bontés de l’objet qui m’enflamme.

(Michel Ange)

 

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

La belle vieille (François Maynard)

Posted by arbrealettres sur 10 octobre 2022



Illustration: Christelle Fontenoy 
    

La belle vieille

Cloris, que dans mon temps j’ai si longtemps servie
Et que ma passion montre à tout l’univers,
Ne veux-tu pas changer le destin de ma vie
Et donner de beaux jours à mes derniers hivers ?

N’oppose plus ton deuil au bonheur où j’aspire.
Ton visage est-il fait pour demeurer voilé ?
Sors de ta nuit funèbre, et permets que j’admire
Les divines clartés des yeux qui m’ont brûlé.

Où s’enfuit ta prudence acquise et naturelle ?
Qu’est-ce que ton esprit a fait de sa vigueur ?
La folle vanité de paraître fidèle
Aux cendres d’un jaloux, m’expose à ta rigueur.

Eusses-tu fait le voeu d’un éternel veuvage
Pour l’honneur du mari que ton lit a perdu
Et trouvé des Césars dans ton haut parentage,
Ton amour est un bien qui m’est justement dû.

Qu’on a vu revenir de malheurs et de joies,
Qu’on a vu trébucher de peuples et de rois,
Qu’on a pleuré d’Hectors, qu’on a brûlé de Troies
Depuis que mon courage a fléchi sous tes lois !

Ce n’est pas d’aujourd’hui que je suis ta conquête,
Huit lustres ont suivi le jour que tu me pris,
Et j’ai fidèlement aimé ta belle tête
Sous des cheveux châtains et sous des cheveux gris.

C’est de tes jeunes yeux que mon ardeur est née ;
C’est de leurs premiers traits que je fus abattu ;
Mais tant que tu brûlas du flambeau d’hyménée,
Mon amour se cacha pour plaire à ta vertu.

Je sais de quel respect il faut que je t’honore
Et mes ressentiments ne l’ont pas violé.
Si quelquefois j’ai dit le soin qui me dévore,
C’est à des confidents qui n’ont jamais parlé.

Pour adoucir l’aigreur des peines que j’endure
Je me plains aux rochers et demande conseil
A ces vieilles forêts dont l’épaisse verdure
Fait de si belles nuits en dépit du soleil.

L’âme pleine d’amour et de mélancolie
Et couché sur des fleurs et sous des orangers,
J’ai montré ma blessure aux deux mers d’Italie
Et fait dire ton nom aux échos étrangers.

Ce fleuve impérieux à qui tout fit hommage
Et dont Neptune même endure le mépris,
A su qu’en mon esprit j’adorais ton image
Au lieu de chercher Rome en ses vastes débris.

Cloris, la passion que mon coeur t’a jurée
Ne trouve point d’exemple aux siècles les plus vieux.
Amour et la nature admirent la durée
Du feu de mes désirs et du feu de tes yeux.

La beauté qui te suit depuis ton premier âge
Au déclin de tes jours ne veut pas te laisser,
Et le temps, orgueilleux d’avoir fait ton visage,
En conserve l’éclat et craint de l’effacer.

Regarde sans frayeur la fin de toutes choses,
Consulte le miroir avec des yeux contents.
On ne voit point tomber ni tes lys, ni tes roses,
Et l’hiver de ta vie est ton second printemps.

Pour moi, je cède aux ans ; et ma tête chenue
M’apprend qu’il faut quitter les hommes et le jour.
Mon sang se refroidit ; ma force diminue
Et je serais sans feu si j’étais sans amour.

C’est dans peu de matins que je croîtrai le nombre
De ceux à qui la Parque a ravi la clarté !
Oh ! qu’on oira souvent les plaintes de mon ombre
Accuser tes mépris de m’avoir maltraité !

Que feras-tu, Cloris, pour honorer ma cendre ?
Pourras-tu sans regret ouïr parler de moi ?
Et le mort que tu plains te pourra-t-il défendre
De blâmer ta rigueur et de louer ma foi ?

Si je voyais la fin de l’âge qui te reste,
Ma raison tomberait sous l’excès de mon deuil ;
Je pleurerais sans cesse un malheur si funeste
Et ferais jour et nuit l’amour à ton cercueil !

(François Maynard)

 

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

TROIS MURS (Franz Hellens)

Posted by arbrealettres sur 26 mai 2022



 

TROIS MURS

Trois murs échelonnés
(Je me voudrais plus de souplesse)
Je les ai vus tout un hiver
Porter la pluie en équilibre

Ils ont cette fierté des lignes
Qui ne peuvent changer
Mais j’aimerais moins de rigueur
Dans cet amour qui me protège

Aussi j’ai peur en ce printemps
Dont se fleurit le plus haut mur
Que cette crête d’anémones

N’emporte en se fanant
Le seul espoir que j’aie encore
De vivre au-delà de mes bornes

(Franz Hellens)

Illustration: Fanny Verne

 

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

L’échiquier (Jorge Luis Borges)

Posted by arbrealettres sur 24 mars 2022




Dans leur grave recoin, les joueurs
Gouvernent les pièces lentes.
L’échiquier
Les retient jusqu’à l’aube dans son sévère
Territoire où se haïssent deux couleurs.
A l’intérieur irradient de magiques rigueurs
Les formes : tour homérique, léger
Cavalier, redoutable reine, roi ultime,
Oblique fou et pions querelleurs.

Quand s’en seront allés les joueurs,
Quand le temps les aura consumés,

Assurément le rite n’aura pas cessé.

Dans l’Orient s’alluma cette guerre
Dont le théâtre est aujourd’hui toute la terre.
Comme l’autre ce jeu est infini.

(Jorge Luis Borges)

Illustration: Veronica Kasatkina

 

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

Question de mots (José Saramago)

Posted by arbrealettres sur 13 mars 2022



    

Question de mots

Je mets des mots morts sur le papier,
Tels les timbres léchés par d’autres langues
Ou les insectes percés par surprise
Par la rigueur impersonnelle des aiguilles.

De mots ainsi adjugés
Je remplis des scènes d’ébahissement et de bâillement :
Entre les portes je me montre, galonné,
Passant des fleurs séchées pour des billets.

Qui pourra savoir de quelle manière
Les mots sont des roses sur le rosier.

(José Saramago)

Recueil: Les poèmes possibles
Traduction: Nicole Siganos
Editions: Jacques Brémond

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

SONNET DES VAINS SOUVENIRS (André Berry)

Posted by arbrealettres sur 19 août 2020




    
SONNET DES VAINS SOUVENIRS

Souvenirs, Souvenirs, tristes spectres des choses,
Sans étoffes de chair que vous voilà déchus!
Avec quelle rigueur me paraissent recluses
Vos formes de brouillard dans les registres clos!

Des vers inconsistants, d’insaisissables proses
Rendront-ils leur substance à vos êtres abstrus?
Aux implacables dieux, aux intraitables Muses,
Je réclame des corps et n’obtiens que des mots.

Ombres des jours perdus, par les Champs-Elysées
Vous avez beau mener vos mornes thalysies,
Vous avez beau vous tordre en un bal éploré.

Lorsque de nos amours nos mains sont dessaisies,
Vos ouates de vapeur, vos gazes irisées
Ne sont qu’un mince emplâtre au coeur endolori.

(André Berry)

 

Recueil: Poèmes involontaires suivi du Petit Ecclésiaste
Traduction:
Editions: René Julliard

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | 1 Comment »

MENHIR (Xavier Grall)

Posted by arbrealettres sur 24 juin 2020



MENHIR

Tout est bien de ce qui est
Tout est bien de ce qui sera
J’ai vécu mes journées
Viendra ma nuit
La mort ailleurs continue les songes de la vie
Le soleil ne se lasse de caresser la stèle funéraire
Sans que la terre en tire ombrage
Et les pluies adoucissent la rigueur ossuaire

Tout ce qu’il est possible d’aimer
Je l’ai aimé
J’ai fait aller le mythe avec la théologie
Et le rêve toujours épousa ma raison
Ainsi par les chemins d’Argol
La pierraille chante avec l’ancolie

Menhir
Je veux une mort verticale
Parmi les ronces paysannes
Que nul féalement ne grave mon nom
Nulle épitaphe sur la pierre
Nulle dédicace au granit

Menhir
Je veux seulement des vocables de lichen
Et la jaune écriture que silencieusement burinent
Les bruines hivernales et les vents d’océan.

(Xavier Grall)

 

 

 

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | 2 Comments »

Le Biniou (Hippolyte Guérin)

Posted by arbrealettres sur 26 février 2020




    
Le Biniou

De ma bourse un peu pauvrette
Où l’ennui m’a fait fouillé
Je me suis permis l’emplette
D’un biniou de cornouiller
Sur notre lande bretonne
Oh ! les jolis airs qu’il sonne
Oh ! comme il endort aux coeurs
La fatigue et les douleurs

Refrain:

Les douleurs sont des folles
Et qui les écoute est encore plus fou
A nous deux toi qui consoles
Biniou, mon biniou, mon cher biniou !

Près de moi tout lui fait la fête
C’est l’oiseau qu’il réjouit
C’est l’écho qui le répète
C’est la brise qui le suit.
Quelle est donc cette magie
Qui nous jette en pleine vie
Le sourire au sein des pleurs
La gaieté sur les douleurs ?…

Mais la somme qu’il me coûte
Sera lente à revenir
Et bien des rigueurs sans doute
M’ne laisseront souvenir:
Ma sacoche un peu moins lourde
Moins de cidre dans ma gourde
Puis… qui sait ? jours de malheurs !
La faim même et ses douleurs !…

(Hippolyte Guérin)

 

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

Tous, frêle roi, oblique fou, ou bien reine (Jorge Luis Borges)

Posted by arbrealettres sur 20 janvier 2020




    
Tous, frêle roi, oblique fou, ou bien reine
Opiniâtre, tour verticale et pions madrés,
Sur le parcours en noir et blanc de leur chemin
Recherchent et livrent une bataille rangée.

Ils ne savent pas que la singulière main
Du joueur qui les tient gouverne leur destin,
Ils ne savent pas qu’une rigueur de diamant
Asservit leur vouloir mais aussi leur parcours.
Le joueur, à son tour, se trouve prisonnier
(D’Omar est la sentence) d’un tout autre échiquier
Bâti de noires nuits et de blanches journées.

Dieu pousse le joueur et le joueur la pièce.
Quel dieu, derrière Dieu, débute cette trame
De poussière et de temps, de rêve et d’agonies ?

(Jorge Luis Borges)

 

Recueil: Les échecs
Traduction:
Editions: Seuil

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | 3 Comments »

 
%d blogueurs aiment cette page :