Arbrealettres

Poésie

Posts Tagged ‘poli’

Poli et nacré (Anick Baulard)

Posted by arbrealettres sur 30 janvier 2024




    
poli et nacré
tout juste fait pour sa paume
mon genou tout rond

(Anick Baulard)

 

Recueil: L’effet Haïku Lire et écrire des poèmes courts agrandit notre vie
Traduction:
Editions: Leduc. S

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , | Leave a Comment »

La tourterelle et la fauvette (Jean-Pierre Claris de Florian)

Posted by arbrealettres sur 10 janvier 2024



Illustration: Grandville
    
La tourterelle et la fauvette

Une fauvette jeune et belle
S’amusait à chanter tant que durait le jour ;
Sa voisine la tourterelle
Ne voulait, ne savait rien faire que l’amour.

Je plains bien votre erreur, dit-elle à la fauvette ;
Vous perdez vos plus beaux moments :
Il n’est qu’un seul plaisir, c’est d’avoir des amants.
Dites-moi, s’il vous plaît, quelle est la chansonnette

Qui peut valoir un doux baiser.
Je me garderais bien d’oser
Les comparer, répondit la chanteuse :
Mais je ne suis point malheureuse,

J’ai mis mon bonheur dans mes chants.
À ce discours, la tourterelle
En se moquant s’éloigna d’elle.
Sans se revoir elles furent dix ans.

Après ce long espace, un beau jour de printemps,
Dans la même forêt elles se rencontrèrent.
L’âge avait bien un peu dérangé leurs attraits ;
Longtemps elles se regardèrent

Avant que de pouvoir se remettre leurs traits.
Enfin la fauvette polie
S’avance la première :
eh ! Bon jour, mon amie,
Comment vous portez-vous ? Comment vont les amants ?
– Ah ! Ne m’en parlez pas, ma chère :
J’ai tout perdu, plaisirs, amis, beaux ans ;

Tout a passé comme une ombre légère.
J’ai cru que le bonheur était d’aimer, de plaire…
Ô souvenir cruel ! ô regrets superflus !
J’aime encore, on ne m’aime plus.

J’ai moins perdu que vous, répondit la chanteuse :
Cependant je suis vieille et je n’ai plus de voix ;
Mais j’aime la musique, et suis encore heureuse
Lorsque le rossignol fait retentir ces bois.

La beauté, ce présent céleste,
Ne peut sans les talents échapper à l’ennui :
La beauté passe, un talent reste,
On en jouit même en autrui.

(Jean-Pierre Claris de Florian)

 

Recueil: Fables
Traduction:
Editions:

Posted in méditations, poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

EN ALLUMANT LE gaz (Pierre Vinclair)

Posted by arbrealettres sur 6 janvier 2024




    
EN ALLUMANT LE gaz,
tu te rappelles le geste par lequel, dans sa caverne froide,
un peuple peu poli entretient le feu qu’il a nourri depuis l’éclair;
le gros frigidaire ronronne,
heureux d’arracher lui aussi pour son propriétaire
le droit de s’absenter puis de manger son repas
célébrant l’inconséquence sacrée
de la trahison des éclairs calligraphiés au ciel noir de sa race.

(Pierre Vinclair)

Recueil: La Sauvagerie
Editions: Biophilia

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

L’ÉROSION DE L’AMOUR (Chansons du XVIIIè)

Posted by arbrealettres sur 18 novembre 2023




    
L’ÉROSION DE L’AMOUR

1

Fuyons un triste engagement
Pour aimer avec agrément
On devient en ménage,
Hé bien par galant, et trop sage
Vous m’entendez bien.

2

Cet accident n’est pas nouveau
Tant va, dit-on, la cruche à l’eau
Qu’enfin elle se fêle, hé bien
Puis le dégout s’en mêle
Vous m’entendez bien.

3

Tant qu’on est distrait et poli
C’est un commerce bien joli
Mais l’on rompt le partage, hé bien
Sitôt que l’on exige
Vous m’entendez bien.

4

Dans le printemps avec ardeur
Ou pour faire la brillante fleur
Mais quand elle est cueillie, hé bien
Tout le parterre ennuie
Vous m’entendez bien.

(Chansons du XVIIIè)

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

LE PETIT PILON INDIEN DE LA MAISON Â APPLEGATE (Ursula K. Le Guin)

Posted by arbrealettres sur 7 octobre 2023




    
LE PETIT PILON INDIEN DE LA MAISON À APPLEGATE

Dense, lourd, le grain fin, basalte sombre,
poli de toute part comme par une rivière, un cylindre
aux bords contondants, un outil : tu le devines lorsque
tu sens l’arrondi subtil, le creux,
qui épouse la main, par les mains formé
qui l’ont tenu ici, juste à cet endroit,
pour qu’il tombe de lui-même dans le bol,
écrase les graines, s’élève et retombe
au rythme du chant sourd et doux
qui a fini par s’incruster dans la pierre,
si bien qu’il m’a dit, quand je l’ai saisi, comment
le tenir et le manier, comment poser mes doigts où
d’autres doigts l’ont usé doucement, lui ont donné
cette forme qui épouse et emplit ma main,
ce poids qui veut tomber et, en tombant, chanter.

***

THE SMALL INDIAN PESTLE AT THE APPLEGATE HOUSE

Dense, heavy, fine-grained, dark basalt
worn river-smooth all round, a cylinder
with blunt round ends, a tool: you know it when
you feel the subtle central turn or curve
that shapes it to the hand, was shaped by hands
that held it here, just where it must be held
to fall of its own weight into the shallow bowl
and crush the seeds and rise and fall again
setting the rhythm of the soft, dull song
that worked itself at length into the stone,
so when I picked it up it told me how
to hold and heft it, put my fingers where
those fingers were that softly wore it down
to this fine shape that fits and fills my hand,
this weight that wants to fall and, falling, sing.

(Ursula K. Le Guin)

Recueil: Derniers poèmes
Editions: Aux Forges de Vulcain

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

Je l’ai vu je vous dis! C’était un lapin blanc (Christian Bouchet)

Posted by arbrealettres sur 30 juillet 2023



Je l’ai vu je vous dis!
C’était un lapin blanc
Très pressé mais poli
Et il portait des gants

Vous détournez les yeux
Vous ne me croyez pas
Mais attendez un peu
Payez-moi un repas

Et je vous dis la suite
Il avait pris la fuite
Au fin fond de l’espace
Là où le temps s’efface

Au milieu d’un trou noir!
Servez-moi donc à boire
Mon gosier est tout sec
d’franchir tant de parsecs

Que vous dirai-je encore?
Il fait beaucoup d’effort
Pour arriver à l’heure
Et calmer la fureur

De la grande duchesse
Qui montre une faiblesse
Pour les têtes coupées
Mais la mienne a tournée

L’alcool m’a endormi
Ah! Merci mes amis
Pour ce repas de roi
La suite une autre fois

(Christian Bouchet)

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

NOYÉE (Joyce Mansour)

Posted by arbrealettres sur 10 avril 2023




    
NOYÉE…

Noyée au fond d’un rêve ennuyeux
J’effeuillais l’homme
L’homme cet artichaut drapé d’huile noire
Que je lèche et poignarde avec ma langue bien polie
L’homme que je tue l’homme que je nie
Cet inconnu qui est mon frère
Et qui m’offre l’autre joue
Quand je crève son oeil d’agneau larmoyant
Cet homme qui pour la communauté est mort assassiné
Hier avant-hier et avant ça et encore
Dans ses pauvres pantalons pendants de surhomme

(Joyce Mansour)

Recueil: Le livre d’or de la poésie française contemporaine
Editions: Marabout

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

J’aurais pu dire… (Bernard Pivot)

Posted by arbrealettres sur 11 mars 2023




    
J’aurais pu dire :
Vieillir, c’est désolant, c’est insupportable,
C’est douloureux, c’est horrible,
C’est déprimant, c’est mortel.
Mais j’ai préféré « chiant »
Parce que c’est un adjectif vigoureux
Qui ne fait pas triste.
Vieillir, c’est chiant parce qu’on ne sait pas quand ça a commencé
et l’on sait encore moins quand ça finira.

Non, ce n’est pas vrai qu’on vieillit dès notre naissance.
On a été longtemps si frais, si jeune, si appétissant.
On était bien dans sa peau.

On se sentait conquérant.
Invulnérable.
La vie devant soi.
Même à cinquante ans, c’était encore très bien…. Même à soixante.

Si, si, je vous assure,
j’étais encore plein de muscles, de projets, de désirs, de flamme.
Je le suis toujours, mais voilà,
entre-temps j’ai vu le regard des jeunes…..
Des hommes et des femmes dans la force de l’âge
qui ne me considéraient plus comme un des leurs,
même apparenté, même à la marge.

J’ai lu dans leurs yeux
qu’ils n’auraient plus jamais d’indulgence à mon égard.
Qu’ils seraient polis, déférents, louangeurs, mais impitoyables.

Sans m’en rendre compte,
j’étais entré dans l’apartheid de l’âge.

Le plus terrible est venu des dédicaces des écrivains, surtout des débutants.
« Avec respect »,
« En hommage respectueux »,
« Avec mes sentiments très respectueux ».

Les salauds !
Ils croyaient probablement me faire plaisir
en décapuchonnant leur stylo plein de respect ?
Les cons !

Et du ‘cher Monsieur Pivot’ long et solennel
comme une citation à l’ordre des Arts et Lettres
qui vous fiche dix ans de plus !

Un jour, dans le métro, c’était la première fois,
une jeune fille s’est levée pour me donner sa place…
J’ai failli la gifler.
Puis la priant de se rasseoir,
je lui ai demandé si je faisais vraiment vieux,
si je lui étais apparu fatigué. !!!… ?

– « Non, non, pas du tout,
a-t-elle répondu, embarrassée. J’ai pensé que”.
– Moi aussitôt : « Vous pensiez que ? »
– « Je pensais, je ne sais pas, je ne sais plus,
que ça vous ferait plaisir de vous asseoir. »
– « Parce que j’ai les cheveux blancs ? »
– « Non, c’est pas ça, je vous ai vu debout
et comme vous êtes plus âgé que moi, ça a été un réflexe, je me suis levée. »
– « Je parais beaucoup… beaucoup plus âgé que vous ? »
– « Non, oui, enfin un peu, mais ce n’est pas une question d’âge. »
– « Une question de quoi, alors ? »
– « Je ne sais pas,
une question de politesse, enfin je crois. »

J’ai arrêté de la taquiner,
je l’ai remerciée de son geste généreux
et l’ai accompagnée à la station où elle descendait pour lui offrir un verre.

Lutter contre le vieillissement
c’est, dans la mesure du possible,
ne renoncer à rien.
Ni au travail, ni aux voyages,
ni aux spectacles, ni aux livres,
ni à la gourmandise, ni à l’amour, ni au rêve.

Rêver, c’est se souvenir,
tant qu’à faire, des heures exquises.
C’est penser aux jolis rendez-vous qui nous attendent.
C’est laisser son esprit vagabonder
entre le désir et l’utopie.

La musique est un puissant excitant du rêve.
La musique est une drogue douce.
J’aimerais mourir, rêveur, dans un fauteuil
en écoutant soit l’Adagio du Concerto n° 23 en La majeur de Mozart,
soit, du même, l’Andante de son Concerto n° 21 en Ut majeur,
musiques au bout desquelles se révéleront à mes yeux pas même étonnés
les paysages sublimes de l’au-delà.
Mais Mozart et moi ne sommes pas pressés.
Nous allons prendre notre temps.
Avec l’âge le temps passe, soit trop vite, soit trop lentement.
Nous ignorons à combien se monte encore notre capital.
En années ? En mois ? En jours ?

Non, il ne faut pas considérer le temps qui nous reste comme un capital.
Mais comme un usufruit dont, tant que nous en sommes capables,
il faut jouir sans modération.

Après nous, le déluge ?…
Non, Mozart.

(Bernard Pivot)
    

    

Posted in méditations, poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

Vers dépolis (Jean l’Anselme)

Posted by arbrealettres sur 28 juillet 2022




Vers dépolis
Art poétique

Vingt fois sur le métier
dépolissez l’ouvrage
un vers trop poli
ne peut pas être au net

Méfiez-vous des vers luisants.

(Jean l’Anselme)

Illustration: Victor Brauner

Posted in humour, méditations, poésie | Tagué: , , , , , , | Leave a Comment »

RETOUR (Franz Hellens)

Posted by arbrealettres sur 27 Mai 2022



 

RETOUR

N’est-il d’autre pays que cette neige
Où je vais nu, d’autre climat
Que ce verglas, d’autre soleil
Que ce poli de miroir sans ombrage ?

J’étais parti avec pour tout bagage
Un passé lourd de crimes oubliés :
Me voici revenu plus léger
Que le reflet d’une aile sur la neige.

(Franz Hellens)


Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , | 2 Comments »