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Poésie

Posts Tagged ‘bêche’

Mon aimée (Antonio Machado)

Posted by arbrealettres sur 26 janvier 2024




    
Mon aimée, la brise
dit ta robe blanche et pure…
Mes yeux ne te verront pas;
mon coeur t’attend!

Le vent m’a apporté
ton nom dans le matin;
la montagne répète
l’écho de tes pas…
Mes yeux ne te verront pas;
mon coeur t’attend!

Dans les sombres clochers
les cloches carillonnent…
Mes yeux ne te verront pas;
mon coeur t’attend!

Les coups du marteau
disent le noir cercueil;
et les coups de la bêche
l’endroit de la fosse…
Mes yeux ne te verront pas;
mon coeur t’attend!

(Antonio Machado)

 

Recueil: Champs de Castille précédé de Solitudes, Galeries et autres poèmes et suivi de Poésies de la guerre
Traduction: Sylvie Léger et Bernard Sesé
Editions: Gallimard

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HYMNE (Michel Leiris)

Posted by arbrealettres sur 9 janvier 2024



Illustration: Noèla Morisot
    
HYMNE

Par toute la terre
lande errante
où le soleil me mènera la corde au cou
j’irai
chien des désirs forts
car la pitié n’a plus créance parmi nous

Voici l’étoile
et c’est la cible où la flèche s’enchâsse
clouant le sort qui tourne et règne
couronne ardente
loterie des moissons

Voici la lune
et c’est la grange de lumière

Voici la mer
mâchoire et bêche pour la terre
écume de crocs
barbes d’acier luisant aux babines des loups

Voici nos mains
liées aux marées comme le vent l’est à la flamme
Voici nos bouches
et l’horloge de minuit les dissout
quand l’eau-mère des ossatures
dépose les barques temporelles aux baies tranquilles de l’espace
et te fait clair comme un gel

ô brouillard tendre de mon sang

(Michel Leiris)

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SIX JOURS EREINTANTS A SERVIR CELLE QUE J’AIME Chansons du XVIIIè)

Posted by arbrealettres sur 15 novembre 2023




    
SIX JOURS EREINTANTS A SERVIR CELLE QUE J’AIME

1

Ecoutez l’aventure,
D’un pauvre villageois ;
Moi qui de ma nature,
Suis honnête et courtois,
Un beau jour j’ai promis
A ma chère Climène.
De la servir gratis,
Le long de la semaine.

2

Le lundi pour lui plaire
J’ai pris la bêche en main ;
La matinée entière
J’ai bêché son jardin.
Puis je fus droitement
M’asseoir auprès d’un chêne
Et d’un baiser charmant
Elle me paya ma peine.

3

Mardi nous nous joignîmes
Dès le soleil levé.
A la grange nous allîmes
Pour y battre du blé :
Nous battions tour à tour
Avec le même zèle.
Cependant au retour
J’étais bien plus las qu’elle.

4

Le mercredi d’ensuite
Au bois elle me mena.
Ma tâche fut réduite
A lui tracer un nœud.
Voilà dit-il un moineau
D’un très rare plumage,
Si vous le trouvez beau
Mettez le vite en cage.

5

Jeudi j’ai l’ordonnance
De garder mon troupeau,
J’ai eu la complaisance
De venir sous l’ormeau :
Là me sentant pressé
D’une ardeur sans pareille,
Je lui donna le baiser
Qu’elle me bailla la veille.

6

Vendredi la futée
Me présenta le bec,
Me dit toute attristée :
Mon moulin est à sec.
A ce travail nouveau
Il fallut s’y résoudre.
Elle fit venir tant d’eau
Qu’il fut aisé d’y moudre.

7

Samedi quel ouvrage !
Du matin jusqu’au soir.
Nous fûmes d’un grand courage
Travailler au pressoir :
Quoique le mouvement
Me mit presque hors d’haleine
Il fallut constamment
Arroser le système.

8

Dimanche ma bergère
Me dit : « Mon cher ami
N’avons-nous rien à faire ».
« Nenni pour aujourd’hui »
Six jours sans me lasser
A servir ce que j’aime
Je veux me reposer
Tout au moins le septième.

(Chansons du XVIIIè)

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Pastourelle (Marcabru)

Posted by arbrealettres sur 19 septembre 2023




    
Pastourelle

L’autre jour près d’une haie
Je vis bergère ambiguë,
Joyeuse, pleine d’esprit,
Vêtue comme à la campagne
Coiffe, cape, houppelande
Chausses de laine, souliers,
Et chemise de treillis.
Je m’approchai par la plaine
Et lui dis : — fille jolie
Je crains que le vent vous pique !

— Seigneur me répondit-elle
Grâce à ma mère et à Dieu
Qu’importe s’il m’échevèle
Je me porte on ne peut mieux !

— Fillette à l’humeur si douce
J’ai quitté le droit chemin
Pour vous tenir compagnie.
Une jeune villageoise
Comme vous ne peut garder
Tant de bétail en ce lieu,
Seule, sans plaisant ami.

— Je sais bien, qui que je sois,
Distinguer sens et folie,
Dit la belle villageoise.
Réservez votre amitié
à celles qui s’en contentent
Car les crédules, à mon sens,
N’en auront pas de profit.

— Fillette de noble race,
Sûrement, d’un chevalier
Votre mère vous conçut
Villageoise mais courtoise.
De plus en plus je vous aime
Et votre joie m’illumine
Si vous m’étiez plus humaine !

— Sire, dit la jeune fille,
À la bêche et à l’araire
Ma famille fut tracée.
Mais pour ce qui vous concerne
Tel qui se dit chevalier
Devrait l’être assurément
Les sept jours de la semaine !

— Fillette, une aimable fée
Au berceau vous fit cadeau
D’une beauté qui surpasse
Celle des gens de chez nous.
Vous seriez doublement belle
Si je pouvais, une fois,
Vous voir dessous, moi dessus !

— Seigneur, dit la paysanne,
Vous m’avez si fort flattée
Que toutes vont m’envier.
Du rang où vous me hissez
Voici pour vous ce salaire :
Reprends tes airs ébaubis,
Tu perds ton temps, pauvre fou!

— Fillette, un coeur dur, sauvage,
S’apprivoise par l’usage.
À vous voir il m’apparaît
Qu’avec une villageoise
Comme vous peut se lier
Une amitié de bon coeur
Si l’un ne trompe pas l’autre.

— Sire, dit la paysanne
L’homme encombré de folie
Jure, promet et s’engage
Mais de semblables hommages
Ne donnent pas droit d’entrée
Je garde mon pucelage
Nul ne me dira putain !

— Fillette, les créatures
Vont toujours à leur nature.
Apprêtons-nous, vous et moi,
À nous accoler ensemble
À l’abri, le long du pré.
Vous y serez à votre aise
Pour faire la chose aimée.

— Allons, seigneur, on sait bien
Que le fou cherche folie,
Le courtois belle aventure
Et le paysan sa mie.
Comme disent les anciens :
« Défaut de juste mesure
Fait la mine du bon sens. »

— Belle, je n’ai jamais vu
Plus friponne de figure
Et plus traîtresse de coeur !

— Seigneur écoutez la chouette.
Elle dit: « l’un baye aux corneilles
Et l’autre espère profit ! »

(Marcabru)

Recueil: Poésie des troubadours
Traduction: Texte français de René Nelli, René Lavaud et Henri Gougaud
Editions: Points

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Bien nettoyée (Guido Gezelle)

Posted by arbrealettres sur 9 août 2022



James King  le fossoyeur lw

Bien nettoyée
la bêche du
fossoyeur brille.
Tout ira mieux
rendu enfin
à l’autre vie.

(Guido Gezelle)

Illustration: James King

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Mon père qui creuse (Seamus Heaney)

Posted by arbrealettres sur 24 août 2020



 

Vincent Van Gogh 16860 [1280x768]

Sous ma fenêtre, le crissement net
De la bêche qui plonge dans le sol caillouteux :
Mon père qui creuse. Je le regarde …

(Seamus Heaney)

Découvert chez Lara ici

Illustration: Vincent Van Gogh

 

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TENIR UN GLOBE (Jean Follain)

Posted by arbrealettres sur 12 novembre 2019




TENIR UN GLOBE

L’habitant parti
la bêche usée et le râteau à dents manquantes
ne referont plus l’allée
aux empreintes de bêtes coutumières
l’enfant apporte le globe
monté sur un pied de bronze
le tourne lentement face aux collines âpres
le vent de l’automne
contourne ses mains fines
un instant il fermera les yeux
quand se soulèvera
une poussière aride
et rouge.

(Jean Follain)

 

 

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Je dis que c’est bien moi qui ai vécu (Jean Rousselot)

Posted by arbrealettres sur 27 septembre 2019



Jean-François Millet 01 [800x600]

 

Je dis que c’est bien moi qui ai vécu
Je dis que c’est bien moi qui suis venu, qui pars
Je le prouve en parlant plus haut que les miroirs
Je dis que j’ai ma place entre les gens qui bougent
Je le prouve en fumant leur tabac, leur chagrin
Je dis que j’ai des droits sur la Colchide
Je le prouve en montrant sa forme en creux dans ma poitrine
Je dis que j’ai des droits sur le néant lui-même
Je le prouve en mangeant mon pain
Le coude sur ma bêche au-dessus de ma tombe.

(Jean Rousselot)

Illustration: Jean-François Millet

 

 

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Le poids dont j’informe la bêche (Jean Tortel)

Posted by arbrealettres sur 15 juillet 2019




Illustration 
    
Le poids dont j’informe la bêche
Et la secousse en vue d’ouvrir
Retournent l’invisible.

(Jean Tortel)

 

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Parce qu’il y a certains livres (Guy Lévis Mano)

Posted by arbrealettres sur 15 Mai 2019


 


 

Francis Picabia -   (6)

Parce qu’il y a certains livres qui sont
étincelles de pain doré,
Parce que ce sont livres à longue saveur plus
longue que mon temps
Parce que ruminante est la connaissance du dévolu.

Parce que mon corps est pesant de mémoire
autant que de jours
et qu’étant plus pesant il a plus d’élan.

Parce que le dessin de ma bouche
est le dessin d’une autre bouche
parce que je suis étranger à mon passage
et immuable dans l’immuable quête…

Peut-être que l’immobilité a reçu message
des bords mordorés qui dévorent leurs couleurs
Peut-être que la pulsation qui fêle chaque seconde
naît des confins noirs des midis de nudité.

Ruée de ma rivière et de ton fleuve ignorant saules
et prés pour se confondre
et se consumer à l’embouchure
Et nous voici centre de vie pic et caverne
Ma langue est la bêche humide qui prépare le creux
de la fécondité…

(Guy Lévis Mano)

Illustration: Francis Picabia

 

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