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Posts Tagged ‘multiple’

À la joie (Missak Manouchian)

Posted by arbrealettres sur 22 février 2024



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À la joie

Ô joie, souffle enthousiaste,
Quand tu jaillis des cœurs gros de chagrins,
De détresse et de souffrance,
Doux et fécond est ton torrent de volupté !

Sur tes visages, tel un baiser de lumière,
Tantôt tu répands une ineffable rêverie,
Tantôt tu allumes de multiples appels lancinants
Dans les yeux, comme un inextinguible feu.
Tu es semblable à ces sources limpides
Venues du plus profond des montagnes…
Et qui comme les abondants ruisseaux printaniers
Donnent la vie à tous dans leur course.

Fertilisée par les ardeurs de l’hiver,
Aimée par le baiser ivre du soleil,
Tu es parfois une oasis née du sable,
Où d’innombrables lassitudes viennent te bénir.
Ô joie, lumière débordante,
Toi, fontaine enchantée, feu, sacré,
Telle la clarté vivifiante du soleil,
Sois inépuisable pour les cœurs obscurs !…

(Missak Manouchian)

Recueil: Ivre d’un grand rêve de liberté
Traduction: Stéphane Cermakian
Editions: Points

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DUREE (Octavio Paz)

Posted by arbrealettres sur 20 janvier 2024



Illustration: Olivier Messas
    
DUREE

I
Noir le ciel
Jaune la terre
Le coq déchire la nuit
L’eau se lève et demande l’heure
Le vent se lève et te demande
Passe un cheval blanc

II
Comme le bois dans son lit de feuilles
tu dors dans ton lit de pluie
chantes dans ton lit de vent
embrasses dans ton lit d’étincelles

III
Odeur véhémence multiple
corps aux nombreuses mains
Sur une tige invisible
une seule blancheur

IV
Parle écoute réponds-moi
ce que dit le tonnerre
la forêt le comprend

V
J’entre par tes yeux
par ma bouche tu sors
Tu dors dans mon sang
sur ton front je m’éveille

VI
Je te parlerai un langage de pierre
(tu réponds avec un monosyllabe vert)
Je te parlerai un langage de neige
(tu réponds avec un éventail d’abeilles)
Je te parlerai un langage d’eau
(tu réponds avec une pirogue d’éclairs)
Je te parlerai un langage de sang
(tu réponds avec une tour d’oiseaux)

(Octavio Paz)

 

Recueil: Le feu de chaque jour précédé de Mise au net et D’un mot à l’autre
Traduction: Claude Esteban – Roger Cailloix – Jean-Claude Masson
Editions:

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Quand on atteint la vacance suprême (Lao Tseu)

Posted by arbrealettres sur 6 janvier 2024



    

Quand on atteint la vacance suprême
on éprouve une quiétude extrême
les dix mille choses se meuvent alentour,
on contemple leur va-et-vient
bien que les choses soient multiples et diverses,
toutes finissent par retourner à la même origine
retourner à l’origine, là réside la quiétude
revenir à sa nature originelle, tel en est le principe

(Lao Tseu)

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L’HUMAINE ESPÈCE (Pierre Vinclair)

Posted by arbrealettres sur 6 janvier 2024



 
Illustration: Rembrandt 
    
L’HUMAINE ESPÈCE AURAIT voulu peut-être être une race de mouettes
dessinant dans le ciel des ronds restés inaperçus,
n’eût été son désir de découper la Terre en quartiers d’orange,
trancher en bon boucher, parquer, scalper, délimiter de pointillés,
garantir la propriété de son onglet,
circonscrire dans la peau sinon des droits et des devoirs magiques,
au moins l’enclos aux dimensions multiples,
une échelle, des significations.

(Pierre Vinclair)

Recueil: La Sauvagerie
Editions: Biophilia

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ENTRE KAIFENG ET KUAITEH (Kenneth White)

Posted by arbrealettres sur 4 janvier 2024



Illustration
    
ENTRE KAIFENG ET KUAITEH
La résidence de Li Po

Pas exactement un monastère
mais une maison isolée au bord d’une rivière
son voisin le martin-pêcheur

le pinceau galopait jour après jour
(« ah, les multiples ramifications de la Voie ! »)
il avalait bol après bol de vin ambré
(« le monde entier n’est qu’un immense flux ! »)

il regardait
les taches brunes sur le bambou, larmes anciennes

imaginait
à l’ouest de la grande muraille
des déserts de sable jonchés d’ossements
les sentiers d’oiseaux du Sichuan

dehors, les fantômes sifflaient dans la brume.

***

BETWEEN KAIFENG AND KWEITEH
Li Po’s residence

Not exactly a monastery
but a lonely house standing by a river
his neighbour the kingfisher

brush galloping day aller day
(« ah, the many branchings of the way ! »)
downing bowl alter bowl of amber wine
(« the whole world is wholly in flux ! »)

looking at
brown stains on the bamboo, ancient tears

imagining
West of the great wall
sandy wastes strewn with bones
the bird-tracks of Szechwan

ghosts whistling in the rain.

(Kenneth White)

Recueil: Les rives du silence
Traduction: de l’anglais par Marie-Claude White
Editions: Mercure de France

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L’Avarice (Bernard Dimey)

Posted by arbrealettres sur 9 juillet 2023




    
L’Avarice

Avec mes pattes aux ongles courbes
Je gratterai la terre autour de moi
Si longtemps
Que j’en aurai les doigts saignants.
Sans rien dire, en secret,
Je visiterai les ruines de vos demeures
Avec patience, avec une joie fabuleuse.

Je sais déterrer la pépite
Où vous ne voyez que l’ordure,
Je sais me faire des feux de joie
Avec le salpêtre des murs.

J’aime l’ombre et la glace,
Mon coeur est de silex
Et mes os de métal,
Je suis un crustacé,
Je vis dans une armure,
J’avance à pas comptés,
J’ai le sang couleur d’encre
Et je m’en porte bien.

De jour en jour mes doigts s’allongent
Et se couvrent de poils.
Je tremble, je tremble,
Je frémis, je vibre,
Mes yeux multiples,
Minuscules,
Vous dévisagent en silence
Et vous n’en savez rien.
Je tisse, je tisse ma toile
Où vous allez venir vous coller
Un par un.

Je ne dis rien
Jamais.
Je règne.

(Bernard Dimey)

Recueil: Le milieu de la nuit
Editions: Christian Pirot

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Multiple (Andrée Chedid)

Posted by arbrealettres sur 15 novembre 2020



Illustration: Carrie Vielle
    
Multiple

Je fonce vers l’horizon
Qui s’écarte
Je m’empare du temps
Qui me fuit
J’épouse mes visages
D’enfance
J’adopte mes corps
D’aujourd’hui
Je me grave
Dans mes turbulences
Je pénètre
Mes embellies
Je suis multiple
Je ne suis personne
Je suis d’ailleurs
Je suis d’ici

(Andrée Chedid)

 

Recueil: Rythmes
Traduction:
Editions: Gallimard

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Il faut inverser le connu (Serge Pey)

Posted by arbrealettres sur 24 juillet 2020



 

Erik Johansson -11

Il faut inverser le connu
Le dehors nous fait passer au dedans
Le dedans au dehors
Le multiple à l’unique
Le diamètre au centre
Le dispersé au concentré
Il faut inverser aussi l’inconnu
Il faut inverser l’inverser
Ouvrir un angle
ne sert qu’a trouver le point
qu’il ne peut mesurer

(Serge Pey)

Illustration: Erik Johansson

 

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PAYS DU FOND DE MOI (Gilles Vigneault)

Posted by arbrealettres sur 11 juin 2020


 


Hugues Roussel Québec 0

 

PAYS DU FOND DE MOI

Pays du fond de moi
Sache que je te suis fidèle
Et que la planète est fragile
Autour de toi

Nul ne franchit jamais
D’autre frontière
Que le doux incertain
De tes mirages
Clôtures mal fermées
De l’enfance juteuse
Je vous franchis à gestes ralentis
Comme dans la lenteur des rêves
Un caillou dans tes puits
Tombe indéfiniment
Dans la patience noire
Vive stable et sereine de l’Eau

Pays du fond de moi
Sache que je te suis semblable
Et que les planètes sont multiples
Autour de toi

Je ne t’écris pas souvent
Aussi n’as-tu point à me répondre
Nous nous sommes parlé
Pour toujours
Je retrouve dans mes bagages
Les premières cartes postales
Du monde

(Gilles Vigneault)

Illustration: Hugues Roussel

 

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« Demain » (Robert Desnos)

Posted by arbrealettres sur 5 Mai 2020



Illustration: Stéphane Texereau
    
« Demain »

Âgé de cent mille ans, j’aurais encor la force
De t’attendre, ô demain pressenti par l’espoir.
Le temps, vieillard souffrant de multiples entorses,
Peut gémir : Le matin est neuf, neuf est le soir.

Mais depuis trop de mois nous vivons à la veille,
Nous veillons, nous gardons la lumière et le feu,
Nous parlons à voix basse et nous tendons l’oreille
À maint bruit vite éteint et perdu comme au jeu.

Or, du fond de la nuit, nous témoignons encore
De la splendeur du jour et de tous ses présents.
Si nous ne dormons pas c’est pour guetter l’aurore
Qui prouvera qu’enfin nous vivons au présent.

(Robert Desnos)

 

Recueil: État de veille
Traduction:
Editions:

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