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CANZONE DE L’ÉTREINTE OU LA VRAIE CANZONE DES CANZONES (Paul Fort)

Posted by arbrealettres sur 19 février 2024




    
CANZONE DE L’ÉTREINTE OU LA VRAIE CANZONE DES CANZONES
A ma Tourangelle bien-aimée.

partageons, lèvres jointes, et à cils rapprochés,
le soleil recherché des lianes en étreinte,

des fleurs sous la rosée, des prairies sous l’autan
échangeant leurs pensées, échangeant tout autant

violettes embaumées, oiseaux cherchant ramées, fils de la Vierge…
attends!… Et Dieu s’il a le temps;

tièdes ou chauds rayons, mais dont le coeur frissonne,
soyez nous en personnes, lorsque nous partageons

le soleil du Printemps ou (qui peu nous étonne,
amant, amante, amants!) le soleil de l’Automne,

lorsque l’orage tonne. — Partageons, lèvres jointes,
et à coeurs se touchant, un soleil recherchant

deux lianes en étreinte.
Aimons-nous en aimant le soleil d’un Moment

vif éternellement !

(Paul Fort)

Recueil: Ballades du beau hasard
Editions: Flammarion

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Ô les peines si vaines (Robert Mallet)

Posted by arbrealettres sur 31 janvier 2024



Illustration: Flo DS
    
Ô les peines si vaines
qui ne furent que miennes
à force de m’y voir

Ô les joies échangées
autant qu’il m’en souvienne
aux rives du miroir

Ô la vive mémoire
des douleurs partagées
dans le fleuve et le noir

seul bien qui m’appartienne
avant le Grand Congé

(Robert Mallet)

 

Recueil: Presqu’îles presqu’amours
Editions: Gallimard

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SÉDUITE, ENCEINTE, ABANDONNÉE ET FLÉTRIE (Chansons du XVIIIè)

Posted by arbrealettres sur 16 novembre 2023



    

SÉDUITE, ENCEINTE, ABANDONNÉE ET FLÉTRIE

1

Mon amant m’a abandonnée
Que je suis malheureuse.
Hélas pourquoi m’a-t-il délaissée
Quand j’étais amoureuse ?
J’ai beau gémir et soupirer,
Ma perte est douloureuse.

2

Je lui ai fait présent d’un chapeau
Bordé à point d’Espagne
Le cordon de canne le plus beau
Qui venait d’Allemagne
Et une bourse au goût nouveau.
Tout cela de mes épargnes.

3

Quand il a vu que j’avais pour lui
Un amour si violente,
Par un beau jour il m’a surpris
Que j’étais chez ma tante.
Mon pucelage il m’a ravi
Mais sa beauté m’enchante.

4

Hélas maman que dira-t-on
De moi dans le village ?
Pour une fois que j’ai été
Dessus le vert bocage,
Mon pucelage j’ai laissé
Hélas pour moi quelle disgrâce.

5

Me voilà enceinte à présent
Le fardeau me désole.
Adieu ma joie et agrément
Car ma beauté s’envole.
Beaucoup des filles en ont fait autant
De cela je me console.

6

Je lui reproche mais c’est en vain
Son action et sa conquête.
Etant donc dans le chagrin
Me répondit le traître :
« Belle j’ai cueilli votre raisin
Adieu panier vendange faite ».

7

Méfiez-vous de ce libertin
Jeunes filles à votre âge
Car ces jeunes hommes sont si malins.
N’ouvrez pas votre cage.
Et ne montrez jamais le chemin
Aux oiseaux si volages.

(Chansons du XVIIIè)

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Tout capter (André Velter)

Posted by arbrealettres sur 22 octobre 2023




    
Tout capter

Il est un au-delà
Dans les tréfonds
Du corps

Une zone de migrations
Où tout capter
Du fier secret de la lumière noire

Je veille dit-elle
Autant que j’émerveille
Sans raconter d’histoire

Ce que je crée n’a pas d’appartenance
Je suis cette aube obscure
Qui creuse et qui déterre

Le legs venu de nulle part

(André Velter)

Recueil: Trafiquer dans l’infini
Editions: Gallimard

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Moi qui n’ai besoin de rien (Marina Tsvetaeva)

Posted by arbrealettres sur 1 octobre 2023




    
Moi qui n’ai besoin de rien, sauf du chaud regard
D’un autre et d’une grappe de raisin ambré,
Comment pourrais-je me plaindre,
À toi, oh chaude passion ?
Moi, caressée
Jusqu’aux os et tout mon soûl,

Mais à l’heure où la terre gèle,
Oh mort, je languis de toi !
Je désire ta froide douceur,
Autant qu’il désire sa couche
L’homme qu’on a trop embrassé.

(Marina Tsvetaeva)

Recueil: Poèmes de Russie (1912-1920) suivi de La Porte arrachée par Marina
Traduction: Véronique Lossky & Georges Nivat
Editions: Des Syrthes

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Je chanterais bien volontiers (Gui d’Ussel)

Posted by arbrealettres sur 21 septembre 2023




    
Je chanterais bien volontiers,
Mais il m’ennuie de répéter
Que j’ai à me plaindre d’Amour.
Quel amant n’en dirait autant?
Je voudrais faire chanson neuve
Mais hélas tout a été dit.
Comment donc vous prier, Amie ?
C’est à ma plaisante manière
Que mon chant paraîtra nouveau.

Dame, je sais assurément
Que je ne puis trouver au monde
Plus parfaite Dame que vous.
Même en rêve je n’en vois pas
Qui surpasse votre beauté.
On ne peut aimer plus que moi,
Et si l’on peut être, il est vrai,
Plus valeureux que je ne suis
Mon coeur, au moins, n’est pas d’un fourbe.

De plus, s’il n’en vous déplaît point,
Je ne vois aucune raison
De haïr le mal que j’endure.
Vous en faites si douce chose
À l’accueillir si joliment
Que mon coeur sans cesse m’appelle
Quand mon esprit me fait l’oeil noir.
Je ne sais pourquoi c’est ainsi,
Raison contre sentir défaille.

Ma Dame, un baiser, rien de plus,
Et j’aurai ce que je désire.
Promettez-le sans vous fâcher
Et que les malveillants enragent,
Qu’ils souffrent de me voir heureux,
Et que mes amis s’éjouissent,
Car vraie courtoisie est ainsi :
Elle renfrogne les êtres vils
Et fait plaisir aux gens aimables.

Vers Aubusson, va, ma chanson,
À la meilleure je te donne,
La meilleure, sauf celle-ci,
Toute allégresse et corps riant.

(Gui d’Ussel)

Recueil: Poésie des troubadours
Traduction: Texte français de René Nelli, René Lavaud et Henri Gougaud
Editions: Points

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Si j ai atteint un but (Emily Dickinson)

Posted by arbrealettres sur 5 juin 2023




    
Si j ai atteint un but
Il est au-delà
De l’Indéfini révélé –
J’ai fermé les yeux –
et tâtonné tout autant –
C’était plus léger –
d’être Aveugle.

(Emily Dickinson)

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SUR L’AIR DE LE PRINTEMPS AUX TOMBEAUX-DES-BRAVES (Li Qing Zhào)

Posted by arbrealettres sur 21 janvier 2023



Illustration: Dai Dunbang
    

SUR L’AIR DE LE PRINTEMPS AUX TOMBEAUX-DES-BRAVES

Le vent est tombé, la poussière embaume, les fleurs sont déjà passées,
Il se fait tard et je suis lassée de me peigner.
Le monde est là, il n’y est pas, tout est fini.
Je voudrais parler, mais les larmes coulent en premier.

J’entends dire que sur les Deux-Rivières, le printemps reste beau,
Alors me vient le projet d’aller y canoter.
Je crains pourtant que sur les Deux-Rivières une sauterelle, ce frêle esquif,
Ne puisse emporter autant de chagrin.

***

(Li Qing Zhào) (1084 — après 1149)

Recueil: Quand mon âme vagabonde en ces anciens royaumes Poèmes Song illustrés par Dai Dunbang
Traduction: du Chinois par Bertrand Goujard
Editions: De la Cerise

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La forme de ma pensée (Lokenath Bhattacharya)

Posted by arbrealettres sur 25 novembre 2022




    
La forme de ma pensée

Cette chambre est fermée de tous côtés.
Cependant, un éclair l’a traversée.
Il me semble du moins en avoir aperçu un.
Ou est-ce la merveilleuse réalité
que nous percevons de l’endroit où nous sommes ?
Cet éclair, est-il désormais
ailleurs, hors d’ici ?

Est-ce chose possible ?
Il n’y a en ce lieu aucun passage.
Et les vitres des fenêtres sont couvertes d’épais rideaux.
Cela ne fut-il qu’une intime illusion?
Cet éclair, n’est-il passé qu’en moi?

Ce malentendu entre dedans et dehors
m’a fait entendre un grondement violent.
Pendant qu’en ce vide obscur
la respiration est à peine sensible,
un silence imperturbable demeure
couché et endormi à mes pieds sur lui : un couvre-pied.

Ce frémissement, qui a parcouru coins et recoins de ce lieu,
a provoqué dans les forêts environnantes un cri de douleur soudain,
audible jusqu’à cette chambre si bien fermée,
cri apparu pour s’éteindre aussitôt, sans disparaître pour autant.

Les rayons, qui pénétrèrent et lacérèrent cet instant fragile,
se sont enfuis et s’enfuient encore,
vers le haut et le bas, le nord, le sud.
S’agit-il du vaste ciel où je me tiens assis maintenant?
Quelle étrange vision pour mes yeux clos !

Mon siège tourne, et en tournant
m’entraîne dans une orbite circulaire,
planète au mouvement semblable
à des milliers d’autres en cet espace infini.

Est-ce donc ainsi la forme de ma pensée,
ainsi ce monde :
un royaume céleste dans la chambre ?

***

(Lokenath Bhattacharya)

Traduction de l’auteur et de Marc Blanchet

 

Recueil: Poésies du Monde
Traduction:
Editions: Seghers

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Mêlée à moi (Luc Bérimont)

Posted by arbrealettres sur 3 novembre 2022



Illustration: Francis Picabia
    
Mêlée à moi

Mêlée à chaque ciel, à chaque ombre qui bouge
Mêlée à chaque cri, mêlée à chaque appel
À chaque nuit de neige, à la houle du feu
Mêlée — plus que mêlée : dépossédée d’absence !

Me dégager de toi, autant vaudrait-il dire
À l’arbre de marcher, à la pluie de dormir
Aux pierres de pleurer, au vent de se murer.

Autant, ma vie brûlante, effacer de tes yeux
Ce qu’il coûte d’aimer, ce qu’il coûte de rire
Ce qu’il en coûte de mourir.

(Luc Bérimont)

Recueil: Le sang des hommes
Traduction:
Editions: Bruno Doucey

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