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Poésie

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Entourer chaque son d’un cercle (Roberto Juarroz)

Posted by arbrealettres sur 15 avril 2024




    
Entourer chaque son d’un cercle,
pour éviter qu’il ne se disperse
comme un amas de plumes arrachées.

Entourer par exemple
le tintement initial d’une cloche,
le bruit que fait le temps quand il lime les choses,
le choc des vertèbres du rêve,
le toucher menu de la pluie,
le frôlement interstitiel d’une chute.

Et de tous les cercles
faire au son une demeure,
pour que le silence cesse d’être une trahison.

Et aussi pour que la vie
qui n’est rien qu’un autre son,
apprenne à construire son propre cercle.

(Roberto Juarroz)

Recueil: Poésie verticale
Traduction: de l’espagnol par Roger Munier
Editions: Gallimard

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Les parfums (Anna de Noailles)

Posted by arbrealettres sur 6 juin 2023



Illustration: Maureen Wingrove alias Diglee
    
Les parfums

Mon coeur est un palais plein de parfums flottants
Qui s’endorment parfois aux plis de ma mémoire,
Et le brusque réveil de leurs bouquets latents
– Sachets glissés au coin de la profonde armoire –

Soulève le linceul de mes plaisirs défunts
Et délie en pleurant leurs tristes bandelettes…
Puissance exquise, dieux évocateurs, parfums,
Laissez fumer vers moi vos riches cassolettes !

Parfum des fleurs d’avril, senteur des fenaisons,
Odeur du premier feu dans les chambres humides,
Arômes épandus dans les vieilles maisons
Et pâmés au velours des tentures rigides ;

Apaisante saveur qui s’échappe du four,
Parfum qui s’alanguit aux sombres reliures,
Souvenir effacé de notre jeune amour
Qui s’éveille et soupire au goût des chevelures ;

Fumet du vin qui pousse au blasphème brutal,
Douceur du grain d’encens qui fait qu’on s’humilie,
Arôme jubilant de l’azur matinal,
Parfums exaspérés de la terre amollie ;

Souffle des mers chargés de varech et de sel,
Tiède enveloppement de la grange bondée,
Torpeur claustrale éparse aux pages du missel,
Acre ferment du sol qui fume après l’ondée ;

Odeur des bois à l’aube et des chauds espaliers,
Enivrante fraîcheur qui coule des lessives,
Baumes vivifiants aux parfums familiers,
Vapeur du thé qui chante en montant aux solives !

– J’ai dans mon coeur un parc où s’égarent mes maux,
Des vases transparents où le lilas se fane,
Un scapulaire où dort le buis des saints rameaux,
Des flacons de poison et d’essence profane.

Des fruits trop tôt cueillis mûrissent lentement
En un coin retiré sur des nattes de paille,
Et l’arôme subtil de leur avortement
Se dégage au travers d’une invisible entaille…

– Et mon fixe regard qui veille dans la nuit
Sait un caveau secret que la myrrhe parfume,
Où mon passé plaintif, pâlissant et réduit,
Est un amas de cendre encor chaude qui fume.

– Je vais buvant l’haleine et les fluidités
Des odorants frissons que le vent éparpille,
Et j’ai fait de mon coeur, aux pieds des voluptés,
Un vase d’Orient où brûle une pastille.

(Anna de Noailles)

Recueil: Je serai le FEU (Diglee)
Editions: La ville brûle

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Papier transparent (Cyril Dion)

Posted by arbrealettres sur 24 octobre 2022




    
Papier transparent
que le bleu des forêts
imbibe.
Structures moléculaires
habitées par le vent.
Rythmés sur le chemin de terre,
mes pas sont-ils vraiment mes pas
et où résonnent-ils ?
Derrière quel sentiment de nous-mêmes nous abritons-nous
alors que nous ne sommes que feuilles,
terre et rocs,
que nous sommes la chaleur des rayons
et l’écho des artères ?
Nous craignons pour ce corps,
pour cet amas de chair que nous appelons nôtre,
mais comment pourrait-il se dissoudre
alors que nous sommes déjà dissolus ?
Comment pourrait-il entraîner notre être
dans les tréfonds du néant
alors que le néant n’habite en rien
et que le tout
habite en moi ?

(Cyril Dion)

Recueil: À l’orée du danger
Traduction:
Editions: Acte Sud

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L’amour comme (André Frénaud)

Posted by arbrealettres sur 3 mars 2020


Comme un amas forestier la fille consentante.
Comme une source en haut de l’arbre la fille convoitée.

Comme une statue d’amiante une femme interdite.
Comme un ventre de jument une bouche embrasée.

Comme une rayure de quartz une femme attendant.
Comme un chaos de pierres une femme perdue.

Comme un cuivre qui luit l’épouse aimante.
Comme une branche reverdie la femme aimée.

(André Frénaud)

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AMOUR DÉSHABILLÉ DE NOUS… (Jean Rousselot)

Posted by arbrealettres sur 9 octobre 2019




    
AMOUR DÉSHABILLÉ DE NOUS…

Amour déshabillé de nous comme, de mousse,
Par la rage de l’eau,
Un mur, toujours plus bas plongeant dans le terreau
Peuplé de larves douces,

Ton torse blanc résiste à la griffe des houx,
Aux hachures de l’ombre
Et chaque pierre en toi reste fidèle au nombre
Qui s’est défait de nous.

Te retrouverons-nous ? Brûlerons-nous ensemble ?
Parfois, dans le charbon,
L’enfant croit reconnaître en nos amas profonds
Quelqu’un qui lui ressemble,

Mais ce n’est qu’un nuage, une feuille, un serpent
Ou quelque rêve informe
Comme en font les rochers lorsque l’on croit qu’ils dorment
A l’ombre des vivants.

Et toi tu resplendis, à la fois vierge et veuve
Au soleil revenu :
On dirait que, nous arrachant à ton flanc nu,
La mort te fait plus neuve,

Amour femelle, et ton entêtement joyeux
Dans la beauté du monde
Qui n’est beau que de toi, de ton haleine blonde
Et de l’eau de tes yeux.

(Jean Rousselot)

 

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Quand tu seras vieille et grise (William Butler Yeats)

Posted by arbrealettres sur 23 juillet 2019



Illustration: Paula Modersohn-Becker
    
Quand tu seras vieille et grise et pleine de sommeil,
Quand, ta tête inclinée près du feu, tu prendras ce livre,
Et lentement, liras et reverras le doux regard
De tes yeux d’autrefois, et de leurs ombres profondes.

Combien ont aimé tes moments de joie prodigue,
Et aimèrent ta beauté d’un amour sincère ou faux,
Mais un seul aima l’âme du pèlerin en toi,
Et aima les défaites de ton visage changeant ;

Et quand courbée sur la hampe incandescente,
Tu murmureras comment l’amour te quitta
Comment il s’envola au-dessus des montagnes
Et cacha son visage dans un amas d’étoiles.

***

When you are old and grey and full of sleep,
And nodding by the fire, take down this book,
And slowly read and dream of the soft look
Your eyes had once, and of their shadows deep;

How many loved your moments of glad grace,
And loved your beauty with love false or true,
But one man loved the pilgrim soul in you,
And loved the sorrows of your changing face;

And bending down beside the glowing bars,
Murmur, a little sadly, how love fled
And paced upon the mountains overhead
And hid his face amid a crowd of stars.

(William Butler Yeats)

 

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Des milliers de souvenirs (Paul Valéry)

Posted by arbrealettres sur 10 juillet 2019




    
…Des milliers de souvenirs d’avoir senti la solitude
et souhaité avec rage la fin des mauvais temps ou de la pensée.

Peut-être ne laissera-t-il qu’un amas informe de fragments aperçus,
de douleurs brisées contre le Monde, d’années vécues dans une minute,
de constructions inachevées et glacées,
immenses labeurs pris dans un coup d’oeil et morts.

Mais toutes ces ruines ont une certaine rose.

(Paul Valéry)

 

Recueil: Poésie perdue
Traduction:
Editions: Gallimard

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NOIR (George Bacovia)

Posted by arbrealettres sur 30 mars 2019



NOIR

Fleurs faites cendres, vaste amas de noir…
Cercueils calcinés, d’un noir métallique,
Habits funéraires d’un noir tragique,
Et le noir profond, cet amas de noir…

Étincelles de rêve… amas de noir…
Carbonisé, l’amour n’est que fumée,
Dans la pluie un parfum, plumes brûlées…
Et rien que ce noir, cet amas de noir…

(George Bacovia)

 

 

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Certaine flamme sous le silence du vivant (Annie Salager)

Posted by arbrealettres sur 18 février 2019




    
Certaine flamme sous le silence du vivant est-elle amour
est-elle une inconnue réplique de l’énergie noire
à des millions d’années-lumière de toi mêlée
de galaxies, de tourbillons de feu
dans le bouillonnement de
leurs cratères et leurs
amas de glace, leurs
pluies de métaux
en fusion,
nulle
part
et
partout,
des univers comme
la même flamme en toi
d’étoiles surgies d’ombres
autour d’infinités neuronales,
écoutes-tu l’amour qui te crée au
silence du vivant, en son hasard au cycle
du vivant, écoutes-tu le rien d’amour que tu
inventes, ta création du rien en peuple d’astres que
tu es, écoute et danse pour un instant de vie son feu de ciel

(Annie Salager)

 

Recueil: La Mémoire et l’Archet
Traduction:
Editions: La rumeur libre

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Les voyelles les voyelles (Amelia Rosselli)

Posted by arbrealettres sur 9 décembre 2018




    
les voyelles les voyelles,
je commence à pénétrer dans l’amas des choses

(Amelia Rosselli)

 

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