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CONJUGUANT LE VERBE ÊTRE (Henrique Huaco)

Posted by arbrealettres sur 23 avril 2023




    
CONJUGUANT LE VERBE ÊTRE

Ce que je suis, étais,
depuis bien longtemps.

Je viens depuis dedans, je viens
depuis que les choses sont.

Je porte mon enfance
dans ma poche :
amulettes,
billes,
anneaux,
un morceau de ficelle
pour attacher ma toupie
un cerf-volant dans la main.

Ma tête de chiffon surgit
en continu et se renouvelle.
Ma tête de chiffon en feu
me suit,
me poursuit
par-derrière les arbres.
Elle me guette depuis les vitres
peintes dans les collines;
dans les maïs,
avec les chevaux somnambules.

Le soir, je rencontre ma tête
dans le fond obscur des citernes.
Je suis moi, se mirant dans l’eau
la première tristesse au visage.
Je suis moi, la nuit douce et terrible
Sous les paupières.

Ce que je suis, étais,
depuis bien longtemps.

Je viens de dedans, je viens
depuis que les choses sont.

***

CONJUGANDO EL VERBO SER

Lo que soy, era,
desde hace mucho,

Vengo desde adentro, vengo
desde que las cosas son.

Traígo mi infancia
en mi bolsillo ;
amuletos,
globos,
anillos,
un pedazo de pita
para amarrar mi trompo,
un corneta de papel en la mano.

Mi cabeza de trapo surge
continuamente y se renueva.
Mi cabeza de trapo ardiendo me sigue,
me persigue
por detrás de los árboles.
Me aguaita desde los vidrios
pintado en las colinas ;
en los maizales,
junto a caballos sonámbulos.

Al anochecer encuentro mi cabeza
en el fondo oscuro de las cisternas.
Ese soy yo, mirándose en el agua,
con la primera tristeza en el restro.

Ese soy yo, con la dulce y terrible
noche bajo los párpados.
Lo que soy, era,
desde hace mucho.

Vendo desde adentro, vengo
desde que las cosas son.

Recueil: La peau du temps
Traduction: Anne-Marie Vindras
Editions: des Crépuscules

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Apprendre de l’azur (Bernard Perroy)

Posted by arbrealettres sur 19 février 2023



Illustration: Rachid Koraïchi
    
Apprendre de l’azur
le chant continu de la joie,

ce manteau,
ce noyau,
peu importe…

Il absorbe tous les nuages,
toutes les pluies, toutes les nuits,

toutes les aspirations et
les aspérités de la terre

sans que rien ne soit dit…

(Bernard Perroy)

 

Recueil: Une gorgée d’azur
Traduction:
Editions: Al Manar

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Il est des ruelles (Georges Bonnet)

Posted by arbrealettres sur 14 octobre 2022



herbe dans paves  [800x600]

Il est des ruelles
qui vont à petits pas avec
des herbes clandestines entre les pavés
des fenêtres basses qui assument
leur captivité tranquille
une fatigue lente
faite d’effilochures et parfois
la lumière balbutiée de quelques roses
Le soir y accueille
des silhouettes hâtives
et la maison sans cesse
veille dans la maison
sous le sifflement continu des choses

(Georges Bonnet)

 

 

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À perte de coeur (Zéno Bianu)

Posted by arbrealettres sur 1 décembre 2020



À perte de coeur

les folies sont des états de grâce

tu émanes
tu irradies
comme un meneur de lune
ton monde n’a pas changé
mais il vibre autrement
cadencé par le silence et l’amour
ouvrant d’autres traces
d’autres gisements
un saisissement en continu
qui se diffuse à travers tes os
la folle folie d’aimer
à perte de coeur

Toutes les folies sont des états de grâce

(Zéno Bianu)

Découvert ici: https://schabrieres.wordpress.com/

Illustration: Anne-Louis Girodet

 

 

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RYTHMES (Andrée Chedid)

Posted by arbrealettres sur 11 novembre 2020




    
RYTHMES

Tout débuta
Dans l’arythmie
Le chaos

Des vents erratiques
S’emparaient de l’univers
L’intempérie régna

L’indéchiffrable détonation
Fut notre prologue

Tout fut
Débâcle et dispersion
Turbulences et gaspillage
Avant que le rythme
Ne prenne possession
De l’espace

Suivirent de vastes accords
D’indéfectibles liaisons
Des notes s’arrimèrent
Au tissu du rien
Des courroies invisibles
Liaient astres et planètes

Du fond des eaux
Surgissaient
Les remous de la vie

Dans la pavane
Des univers
Se prenant pour le noyau
La Vie
Se rythma
Se nuança

De leitmotiv
En parade
De reprise
En plain-chant

La Vie devint ritournelle
Fugue Impromptu
Refrain
Se fit dissonance
Mélodie Brisure
Se fit battement
Cadence Mesure

Et se mira
Dans le destin

Impie et sacrilège
L’oiseau s’affranchissait
Des liens de la terre

Libre d’allégeance
Il s’éleva
Au-dessus des créatures
Assujetties aux sols
Et à leurs tyrannies

S’unissant
Aux jeux fondateurs
Des nuages et du vent
L’oiseau s’allia à l’espace
S’accoupla à l’étendue
S’emboîta dans la distance
Se relia à l’immensité
Se noua à l’infini

Tandis que lié au temps
Et aux choses
Enfanté sur un sol
Aux racines multiples
L’homme naquit tributaire
D’un passé indélébile

Le lieu prit possession
De sa chair
De son souffle
Les stigmates de l’histoire
Tatouèrent sa mémoire
Et sa peau

Venu on ne sait d’où
Traversant les millénaires
L’homme se trouva captif
Des vestiges d’un monde
Aux masques étranges
Et menaçants

Il s’en arrachait parfois
Grâce aux sons et aux mots
Aux gestes et à l’image
À leurs pistes éloquentes
À leur sens continu

Pour mieux tenir debout
L’homme inventa la fable
Se vêtit de légendes
Peupla le ciel d’idoles
Multiplia ses panthéons
Cumula ses utopies

Se voulant éternel
Il fixa son oreille
Sur la coquille du monde
À l’écoute
D’une voix souterraine
Qui l’escorte le guide
Et l’agrandit

Alors
De nuits en nuits
Et d’aubes en aubes
Tantôt le jour s’éclaire
Tantôt le jour moisit

Faiseur d’images
Le souffle veille

De pesanteur
Le corps fléchit

Toute vie
Amorça
Le mystère
Tout mystère
Se voila
De ténèbres
Toute ténèbre
Se chargea
D’espérance
Toute espérance
Fut soumise
À la Vie

L’esprit cheminait
Sans se tarir
Le corps s’incarnait
Pour mûrir
L’esprit se libérait
Sans périr
Le corps se décharnait
Pour mourir

Parfois l’existence ravivait
L’aiguillon du désir
Ou bien l’enfouissait
Au creux des eaux stagnantes

Parfois elle rameutait
L’essor
D’autres fois elle piétinait
L’élan

Souvent l’existence patrouillait
Sur les chemins du vide
Ou bien se rachetait
Par l’embrasement du coeur

Face au rude
Mais salutaire
Affrontement
De la mort unanime
L’homme sacra
Son séjour éphémère
Pour y planter
Le blé d’avenir.

(Andrée Chedid)

 

Recueil: Rythmes
Traduction:
Editions: Gallimard

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Hommage à la Vie (Jules Supervielle)

Posted by arbrealettres sur 23 février 2020




    
Hommage à la Vie

C’est beau d’avoir élu
Domicile vivant
Et de loger le temps
Dans un coeur continu,
Et d’avoir vu ses mains
Se poser sur le monde
Comme sur une pomme
Dans un petit jardin,
D’avoir aimé la terre,
La lune et le soleil,
Comme des familiers
Qui n’ont pas leurs pareils,
Et d’avoir confié
Le monde à sa mémoire
Comme un clair cavalier
A sa monture noire,
D’avoir donné visage
A ces mots : femme, enfants,
Et servi de rivage
A d’errants continents,
Et d’avoir atteint l’âme
A petit coups de rame
Pour ne l’effaroucher
D’une brusque approchée.
C’est beau d’avoir connu
L’ombre sous le feuillage
Et d’avoir senti l’âge
Ramper sur le corps nu,
Accompagné la peine
Du sang noir dans nos veines
Et doré son silence
De l’étoile Patience,
Et d’avoir tous ces mots
Qui bougent dans la tête,
De choisir les moins beaux
Pour leur faire un peu fête,
D’avoir senti la vie
Hâtive et mal aimée,
De l’avoir enfermée
Dans cette poésie.

(Jules Supervielle)

 

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L’EAU DISCRÈTE (Claude Roy)

Posted by arbrealettres sur 5 février 2020



Illustration: Pascal Baudot
    
L’EAU DISCRÈTE

Une eau glacée qui coule On l’entend sans la voir
(La pensée de l’été qui chantonne sous l’herbe)
Les toutes petites abeilles noires leur bourdon continu
(Le rêve que le soleil fait à bouche fermée)

À onze heures en août le monde est transparent
Il sera brûlant après la méridienne
Une très modeste éternité baigne de clarté vive
l’eau qui court les abeilles le soleil triomphant

Une éphémère éternité qui nous habite toi et moi
Elle fondra dans le jour comme le sucre dans l’eau
comme le temps dans le temps

(Claude Roy)

 

Recueil: Claude Roy un poète
Traduction:
Editions: Gallimard Jeunesse

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Vous et moi (Alan Watts)

Posted by arbrealettres sur 19 septembre 2019




    
Vous et moi
sommes tous aussi continus avec l’Univers
qu’une onde avec l’océan.

(Alan Watts)

 

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LE poème continu (Roberto Juarroz)

Posted by arbrealettres sur 4 mars 2019




    
LE poème continu,
l’écriture continue,
le texte qui jamais ne s’achève
et ne s’interrompt jamais,
le texte qui équivaut à être.

La vie se convertit
en une forme d’écriture
et chaque chose est une lettre,
un signe de ponctuation,
l’inflexion d’une phrase.

Métabolisme inaugural
d’une philologie
qui a découvert un nouveau verbe :
le verbe toujours.

La poésie s’écrit toujours,
vivre se vit toujours,
quelque chose s’éveille toujours :
poème-toujours.

L’être est écriture.

Et une parole est suffisante
pour toute l’action :
toujours.
L’autre verbe,
jamais,
n’est que son ombre.

***

EL poema continuo,
la escritura continua,
el texto que nunca se termina
y nunca se interrumpe,
el texto equivalente a ser.

La vida se convierte
en una forma de escritura
y cada cosa es una letra,
un signo de puntuación ,
la inflexión de una frase.

Inaugural metabolismo
de una filología
que ha descubierto un nuevo verbo:
el verbo siempre.

La poesía se escribe siempre,
vivir se vive siempre,
algo despierta siempre:
poema-siempre.

El ser es escritura.

Y una palabra es suficiente
para toda la acción :
siempre.
El otro verbo,
nunca,
es tan sólo su sombra.

(Roberto Juarroz)

 

Recueil: Onzième Poésie Verticale
Traduction: Fernand Verhesen
Editions: Lettres Vives

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Pas un silence (Lionel Ray)

Posted by arbrealettres sur 28 décembre 2018


pas un jour sans ton nom continu.
pas une larme sans ton nom.
pas une vie sans ton nom.
il ne cesse d’être.
multiple comme un recueil de contes.
pas une minute sans ton nom.
pas un pas. pas une nuit. pas un silence.

(Lionel Ray)

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