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Poésie

Posts Tagged ‘couverture’

ТU ES VRAIMENT FOFOLLE (Attila József)

Posted by arbrealettres sur 14 décembre 2023



Illustration: Toulouse Lautrec
    
ТU ES VRAIMENT FOFOLLE,
Tu cours
Comme le vent du matin,
Tu finiras par te faire écraser : gare aux voitures !
Pourtant j’ai récuré ma petite table,
Et déjà
Le faible éclat du pain est une lumière plus pure.
Reviens donc, si tu veux bien,
J’achèterai une couverture pour mon lit de fer :
Cela va bien
Avec ma pauvreté qui t’aime,
Et que le Seigneur aime aussi.
Et le Seigneur m’aime aussi.
Il ne vient jamais ici dans toute sa clarté
Car il ne veut pas abîmer
Mes yeux pris d’un tel désir de le voir.
Et ils te regarderont avec tant de douceur.
Quand tu seras revenue !
Je t’embrasserai avec précaution,
Je n’arracherai pas ton manteau,
Mais je te dirai toutes les friponneries
Que j’ai inventées depuis ton départ
Pour que tu ries à ton tour.
Tu rougiras,
Tu baisseras les yeux et nous rirons comme des fous.
Les voisins nous entendront,
Les journaliers graves et taciturnes nous entendront,
Et dans leur sommeil las et brisé, ils esquisseront un sourire.

(Attila József)

 

Recueil: Aimez-moi – L’oeuvre poétique
Traduction: Georges Kassaï
Editions: Phébus

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Père du doux repos (Pontus de Tyard)

Posted by arbrealettres sur 6 novembre 2023



Illustration: Odilon Redon
    
Père du doux repos, Sommeil, père du Songe,
Maintenant que la nuit, d’une grande ombre obscure,
Fait à cet air serein humide couverture,
Viens, Sommeil désiré et dans mes yeux te plonges.

Ton absence, Sommeil, languissamment allonge
Et me fait plus sentir la peine que j’endure.
Viens, Sommeil, l’assoupir et la rendre moins dure,
Viens abuser mon mal de quelque doux mensonge.

Ja le muet silence un escadron conduit
De fantômes ballants dessous l’aveugle nuit :
Tu me dédaignes seul qui te suis tant dévot.

Viens, Sommeil désiré, m’environner la tête,
Car, d’un voeu non menteur, un bouquet je t’apprête
De ta chère morelle et de ton cher pavot.

(Pontus de Tyard)

Recueil: Max-Pol Fouchet La poésie française Anthologie thématique
Editions: Seghers

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TOMBER (Ursula K. Le Guin)

Posted by arbrealettres sur 8 octobre 2023



    

TOMBER

Compagnon
Une patte et un museau qui fouille me réveillent à demi,
et je le laisse se glisser sous les couvertures.
Il se met en boule et s’endort en ronronnant.
Les chats sont moins encombrants que les amants.

***

FALLING

Company
A paw, a questing nose half waken me,
and I let him get under the covers
He curls up and purrs himself asleep.
Cats are less troublesome than lovers.

(Ursula K. Le Guin)

Recueil: Derniers poèmes
Editions: Aux Forges de Vulcain

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Quand la source du ruisseau s’éblouit (Jaufré Rudel)

Posted by arbrealettres sur 20 septembre 2023




    
Quand la source du ruisseau
S’éblouit de soleil neuf
Quand naît la fleur d’églantier
Quand au bois le rossignol
Module, affine, répète
Sa chanson qu’il veut parfaite,
Je reprends le mien refrain.

Amour de terre lointaine
Pour vous j’ai le coeur dolent.
À mon mal point de remède
Si l’amie tant désirée
Par attrait, par soif d’union,
Ne m’appelle à l’unisson
En chambre close ou verger.

Si mon coeur reste impuissant
Puis-je m’étonner qu’il brûle ?
Dieu n’a pas voulu qu’on vît
Jamais plus belle chrétienne,
Ni Juive, ni Sarrasine !
Pour qui goûte à son amour
C’est festin tombé du ciel.

Éternelle soif du coeur !
À elle seule j’aspire.
Mais si me prend convoitise
Mon désir sera douleur
Car plus piquant que l’épine
(Allons, je ne m’en plains pas !)
Est ce mal que Joie guérit.

Sans lettre ni parchemin
J’envoie ces vers à chanter
En simple langue romane
À Uc le Brun, par Filhol,
Et que les gens du Poitou,
Berry, Guyenne et Bretagne
Aient plaisir à les ouïr.

Chanson

Quand les jours s’allongent en mai
Me plaît un chant d’oiseaux lointain
Et de ce doux lieu éloigné
Me revient un amour lointain.
Je vais pensif les yeux baissés,
Chant dans l’arbre et fleur d’églantier
Me sont comme gelée d’hiver.

J’ai foi en Dieu le Seigneur vrai.
Je verrai donc l’amour lointain.
Mais pour un bien qui m’en échoit
J’ai deux maux, tant il m’est lointain.
Si j’étais au loin pèlerin
Ses beaux yeux peut-être verraient
Mon bourdon et ma couverture !

Quel plaisir de lui demander,
Au nom de Dieu, abri lointain !
Et s’il lui plaît je logerai .
Tout près d’elle, moi le lointain.
Quels mots charmants nous nous dirons,
Et quelle paix nous en aurons,
Ami lointain si proche d’elle !

Triste et joyeux je quitterai
(si je la vois) l’amour lointain.
Je ne sais quand la reverrai,
Car nos pays sont trop lointains.
Si nombreux sont chemins et routes !
Comment savoir ce qui viendra ?
Qu’il en soit comme Dieu voudra !

Jamais d’amour ne jouirai
Si je n’ai cet amour lointain.
Je n’en sais plus doux ni meilleur,
D’aucune part, proche ou lointain.
Son mérite est d’un si grand prix
Que je voudrais me trouver pris
Au loin en terre sarrasine.

Dieu qui fit toutes choses vives
Et créa cet amour lointain
Qu’Il veuille ce que veut mon coeur
Voir un jour cet amour lointain
En vérité, où que ce soit
Moindre chambre ou moindre jardin
Me seraient toujours un palais !

Quelqu’un m’appelle et c’est bien vrai
L’homme au désir d’amour lointain
Car nulle autre joie ne me plaît
Comme jouir d’amour lointain
Mais mon désir m’est ennemi
Mon parrain me l’avait promis
Je suis amant sans être aimé

Mais mon désir m’est ennemi
Que maudit soit qui a voué
Mon coeur à n’être point aimé !

(Jaufré Rudel)

Recueil: Poésie des troubadours
Traduction: Texte français de René Nelli, René Lavaud et Henri Gougaud
Editions: Points

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Vivre sans point d’appui (Michel Houellebecq)

Posted by arbrealettres sur 21 avril 2023



Illustration: Georges Rey
    
Vivre sans point d’appui, entouré par le vide,
Comme un oiseau de proie sur une mesa blanche ;
Mais l’oiseau a ses ailes, sa proie et sa revanche ;
Je n’ai rien de tout ça. L’horizon reste fluide,

J’ai connu de ces nuits qui me rendaient au monde,
Où je me réveillais plein d’une vie nouvelle ;
Mes artères battaient, je sentais les secondes
S’égrener puissamment, si douces et si réelles ;

C’est fini. Maintenant, je préfère le soir,
Je sens chaque matin monter la lassitude,
J’entre dans la région des grandes solitudes,
Je ne désire plus qu’une paix sans victoire.

Vivre sans point d’appui, entouré par le vide,
La nuit descend sur moi comme une couverture
Mon désir se dissout dans ce contact obscur ;
Je traverse la nuit, attentif et lucide.

(Michel Houellebecq)

Recueil: Non réconcilié
Editions: Gallimard

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Lis-les (Umar Abu Rishah)

Posted by arbrealettres sur 17 janvier 2023



Illustration
    
Lis-les
Feuillets d’un mort

C’est ma chambre,
l’oubli s’y est rouillé et le mutisme a vieilli !

Entre avec les bougies !
Elle est de ténèbres avec un repaire creusé à l’entrée.

Avance doucement,
la poussière et l’araignée pourraient prendre peur.

Auprès de ma coupe brisée
il y a une liasse de feuillets
et entre leurs deux couvertures une vie en éclats.

Apporte-les…
ta jeunesse passée s’y trouve
et la beauté à laquelle tu t’étais astreinte.

Lis-les…
ne me voile pas l’éternité,
publie-les…
ne me laisse pas mourir.

***

(Umar Abu Rishah)

 

Recueil: Poésie Syrienne contemporaine
Traduction:de l’Arabe par Saleh Diab
Editions: Le Castor Astral

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Pour Mémoire (Robert Vigneau)

Posted by arbrealettres sur 30 octobre 2022




    
Pour Mémoire
Gott Mit Uns

Qui tondit la rousse juive?
Qui tissa ses longs cheveux
En couverture de feu?
Comment les hivers survivent?

Qui saigna l’un en boudin,
Qui grilla l’autre en saucisse
Dans les fours, les fours d’Auschwitz?
Quelle faim viendra demain?

Qui inventa l’abat-jour
En peaux d’humains tatoués?
Qui en tressa des fouets
Pour s’en fustiger d’amour?

D’homme, qui fit du savon
Sous les ordres d’un apôtre?
Lavez-vous les uns les autres.
Selon Dieu que nous suivons!

Sous les fesses de l’Histoire
Les monstres se tiennent chaud :
Drancy, Buchenwald, Dachau
À jamais prémonitoires.

(Robert Vigneau)

Recueil: La révolte des poètes
Traduction:
Editions: Livre de poche Jeunesse

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Une maille a l’endroit… (Thomas Vinau)

Posted by arbrealettres sur 7 octobre 2022



Illustration: Sabin Balasa
    
Une maille a l’endroit…

sur les orteils de l’univers
la jolie petite couverture tricotée
de nos tristesses

(Thomas Vinau)

 

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UNE NUIT AUSSI LONGUE QU’UNE ANNEE (Anonyme)

Posted by arbrealettres sur 16 septembre 2022




    
UNE NUIT AUSSI LONGUE QU’UNE ANNEE
Sur l’air du  » Souvenir de la capitale impériale »
— Liu Yong

La couverture mince
et l’oreiller petit,
par le froid qui s’en vient

je me sens désolé
d’avoir dû te quitter.
Je me tourne
et retourne au fond du lit,
Mais le sommeil me fuit
bien que la nuit soit avancée.

Je me lève
et me couche
à n’en plus finir,
la nuit est aussi longue
qu’une année.

Oh ! Je voudrais m’en retourner chez toi,
mais je suis loin, très loin déjà.
Mille pensées de toi ne me consolent pas.
Comme je me sens seul et las !
Mon coeur reste toujours attaché à ton coeur;
Je te dois un ruisseau de pleurs.

(Anonyme)

***

Recueil: Choix de Poèmes et de Tableaux des Song
Traduction:
Editions: China Intercontinental Press

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Dans un village dévasté par la guerre (Jean-Pierre Chambon)

Posted by arbrealettres sur 24 mars 2022



Illustration:  Rosso Fiorentino

    

Dans un village dévasté par la guerre
un homme à demi nu
que trois silhouettes enturbannées allongent
sur une couverture ocre
la photo est dans le journal
belle comme une déposition de croix
du Quattrocento

(Jean-Pierre Chambon)

 

Recueil: Tout-venant
Traduction:
Editions: Héros-Limite

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