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Posts Tagged ‘Orient’

Nuit de printemps (François-René de Chateaubriand)

Posted by arbrealettres sur 27 juin 2024



Illustration: Hiramatsu Reiji
    
Nuit de printemps

Le ciel est pur, la lune est sans nuage :
Déjà la nuit au calice des fleurs
Verse la perle et l’ambre de ses pleurs ;
Aucun zéphyr n’agite le feuillage.

Sous un berceau, tranquillement assis,
Où le lilas flotte et pend sur ma tête,
Je sens couler mes pensers rafraîchis
Dans les parfums que la nature apprête.

Des bois dont l’ombre, en ces prés blanchissants,
Avec lenteur se dessine et repose,
Deux rossignols, jaloux de leurs accents,
Vont tour à tour réveiller le printemps

Qui sommeillait sous ces touffes de rose.
Mélodieux, solitaire Ségrais,
Jusqu’à mon cœur vous portez votre paix !
Des prés aussi traversant le silence,
J’entends au loin, vers ce riant séjour,
La voix du chien qui gronde et veille autour
De l’humble toit qu’habite l’innocence.
Mais quoi ! déjà, belle nuit, je te perds !
Parmi les cieux à l’aurore entrouverts,

Phébé n’a plus que des clartés mourantes,
Et le zéphyr, en rasant le verger,
De l’orient, avec un bruit léger,
Se vient poser sur ces tiges tremblantes.

(François-René de Chateaubriand)
Tableaux de la nature, 1784-1790

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À l’ombre des pins et des cyprès (Pan Qie Yu)

Posted by arbrealettres sur 3 février 2024




    
À l’ombre des pins et des cyprès

La sagesse reçue des Anciens
M’accorda une vie humaine.
Elle m’invita, pauvre créature, jusqu’au palais
À tenir un humble rang dans le quartier des femmes.
J’ai joui de la grâce profuse du saint souverain,
Recueillant la faveur radieuse du soleil et de la lune.
Les rais brûlants de l’astre pourpre posés sur moi,
Je reçus la haute bénédiction dans le pavillon de Zeng Shen.
Abandonnée à l’espoir de jours heureux,
Je délaçais mon souffle, éveillée comme endormie.
Mais les décrets du Ciel — qui pourra jamais les infléchir ?
Avant de les savoir, le soleil voilait sa lumière
Et me laissait déjà dans l’ombre du soir.
Je gardais la bonté du roi qui demeurait mon seul asile
Et mes fautes ne me conduisirent pas à l’exil.
J’ai servi l’impératrice douairière dans le palais d’Orient
Et pris ma place parmi les suivantes de la Confiance éternelle.
J’aidais à laver les rideaux, à balayer le sol souillé
Et ma tâche se poursuit ainsi jusqu’au terme mortel.
Alors mes os trouveront repos au pied de la colline.
Et l’ombre vacillante des pins et des cyprès couvrira ma tombe.

(Pan Qie Yu)

(Ier siècle av. J.-C.)

Recueil: Classiques de la poésie chinoise
Traduction: Alexis Lavis
Editions: Presses du Châtelet

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L’envol (André Velter)

Posted by arbrealettres sur 22 octobre 2023



Illustration: Jean-Claude Forez
    
L’envol

Infini de toute urgence ici
sous le plexus solaire
où l’âme réaccordée
expérimente un nouvel Orient.

Le souffle n’a rien perdu
de son élan premier,
l’énergie tient toujours
sa dague de soleil levant.

Seuls les poumons
sont encore trop à l’étroit,
sans accès
à l’horizon d’outre plèvre.

La délivrance vient des épaules
qui oscillent lentement,
se délestent vague après vague
dans une aube idéale.

La nuque se soulève,
inverse les vertiges, dénoue
la ligne des vertèbres :
aucune pensée ne résiste.

Nulle digue désormais
pour entraver ce qui s’évade —
l’envol est une bénédiction du
corps terrestre

enfin synchronisé avec son corps divin.

(André Velter)

Recueil: Trafiquer dans l’infini
Editions: Gallimard

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L’embarcadère (André Velter)

Posted by arbrealettres sur 22 octobre 2023




    
L’embarcadère

Le désir est pareil à cette porte,
Du temps des surréalistes au 54 rue du Château,

À la fois ouverte et fermée,

Pour les départs à tous les vents
Et le refuge des nuits de magie claire.

*

La poésie aussi est cet impossible même
Qui tient les deux côtés de la frontière,

Sur les pentes d’on ne sait quel exil,

Quand le tocsin qui bat le sang
Éveille un chant de mort où renaître.

*

Mais il n’y a pas d’illusion à se faire,
L’insolente issue de série noire

A retrouvé ses garde-fous domestiques,

Chambranle, serrure, verrou,
Tout l’agencement de la syntaxe grégaire.

*

Le génie du lieu n’a pas laissé de gages,
Juste un éclair de légende libertaire

Et guère plus de réalité jetée hors champ

Que quelques mutineries de corps, d’esprit,
Voire de cadavres exquis.

*

L’embarcadère perdure pourtant,
Qui ravive l’insomnie du dernier navire venu

Au large de Tossa de Mar,

Vaisseau fantôme caréné d’or et d’aube
Dans les yeux fauves d’Ava Gardner.

*

C’est qu’une splendeur fatale
Mène les amours et les âmes

Jusqu’à revenir de tout

Sans qu’il y ait à changer d’impatience
Ni de sens ascendant.

*

Nous avançons à l’orient de nous,
Avec la force de conquérants inutiles,

Décidés comme jamais

À découvrir les traces qui tout effacent
Autant de ce côté-ci que de l’autre.

(André Velter)

Recueil: Trafiquer dans l’infini
Editions: Gallimard

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LE TORRENT (Gérard d’Houville)

Posted by arbrealettres sur 8 juin 2023



Illustration
    
LE TORRENT

Un coeur libre ressemble au torrent des montagnes
Impétueux et pur, qui bondit en riant;
Loin du sommet natal tout le ciel l’accompagne,
Il mire tour à tour la nuit et l’orient;

Toujours alimenté par les neiges du rêve
Sous l’écume des jours à jamais transparent,
Limpide, irrésistible, et sans halte et sans trêve,
Un libre coeur ressemble au sauvage torrent.

Que le passant y boive ou que l’azur y sombre,
Toujours renouvelé par sa claire candeur,
Par lui-même lavé des aubes ou des ombres,
Il emporte sans fin sa force et sa fraîcheur.

Toujours précipité d’inaccessibles sources
Seul, quelquefois l’hiver maintient sa belle course,
Mais lorsque un printemps neuf libère tout effort,

Sa puissance innocente en ravage les fêtes,
Et tout gonflé d’orage et de grandes tempêtes,
Il ne se calmera qu’en ta paix, vaste mort!

(Gérard d’Houville)

Recueil: Je serai le FEU (Diglee)
Editions: La ville brûle

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À l’ombre des pins et des cyprès (Pan Qi Yu)

Posted by arbrealettres sur 6 décembre 2022



Illustration: Shan Sa
    
À l’ombre des pins et des cyprès

La sagesse reçue des Anciens
M’accorda une vie humaine.
Elle m’invita, pauvre créature, jusqu’au palais
À tenir un humble rang dans le quartier des femmes.
J’ai joui de la grâce profuse du saint souverain,
Recueillant la faveur radieuse du soleil et de la lune.
Les rais brûlants de l’astre pourpre posés sur moi,
Je reçus la haute bénédiction dans le Pavillon de Zeng Shen.
Abandonnée à l’espoir de jours heureux,
Je délaçais mon souffle, éveillée comme endormie.
Mais les décrets du Ciel — qui pourra jamais les infléchir ?
Avant de les savoir, le soleil voilait sa lumière
Et me laissait déjà dans l’ombre du soir.
Je gardais la bonté du roi qui demeurait mon seul asile
Et mes fautes ne me conduisirent pas à l’exil.
J’ai servi l’impératrice douairière dans le palais d’orient
Et pris ma place parmi les suivantes de la Confiance éternelle.
J’aidais à laver les rideaux, à balayer le sol souillé
Et ma tâche se poursuit ainsi jusqu’au terme mortel.
Alors mes os trouveront repos au pied de la colline.
Et l’ombre vacillante des pins et des cyprès couvrira ma tombe.

(Pan Qi Yu)
(1er siècle avant J.-C.)

 

Recueil: Nuages immobiles Les plus beaux poèmes des seize dynasties chinoises
Traduction: Alexis Lavis
Editions: l’Archipel

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La route des fourmis (Constantin Abaluta)

Posted by arbrealettres sur 26 novembre 2022




    
La route des fourmis

par la maison de ma tante passe la route des fourmis,
cette route ancestrale attestée par les chroniques de l’Orient.
Les fourmis montent du jardin de la voisine, le long d’une lézarde dans le mur.
Dans la salle de bains, elles valsent sur les dalles blanches et bleues,
traversent le panier à linge, la paroi et soudain, dans le salon,
elles défilent sur le cadre doré de la glace ronde.

***

(Constantin Abaluta)

Traduction de Carl Norac et d’Annie Bentoïu

 

Recueil: Poésies du Monde
Traduction:
Editions: Seghers

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Madame (Briceida Cuevas Cob)

Posted by arbrealettres sur 2 octobre 2022



Illustration: Eugène Prévost-Messemin

    
Madame,

tes seins sont deux filles qui jouent
à se frapper quand tu laves ton linge
L’arc-en-ciel de ton regard est tendu dans l’écume
Qui te verrait soutiendrait que tu ne souffres pas
Il ne saurait pas qu’au pied de ton bac à lessive
s’entasse une partie de ton histoire
Le sifflement que tu entonnes
est le fil sur lequel tu accroches ta fatigue
Le vent est un gamin moqueur
qui tire et tend ton linge
Sur les arbres de l’orient
le soleil est un nouveau-né
qui répand ses larmes tièdes et jaunes

(Briceida Cuevas Cob)

 

Recueil: Poésies du Monde
Traduction:
Editions: Seghers

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Les mains blanches (Pierre Coran)

Posted by arbrealettres sur 6 septembre 2022




    
Les mains blanches

Comme des mains blanches
Au-dessus de l’eau,
Deux fleurs font la planche
Entre les roseaux.

Un martin-pêcheur
Choisit pour perchoir
Un saule pleureur
Qui devient plongeoir.

Sous les nénuphars,
Au fil des courants,
Glissent des foulards
De soie d’Orient.

Un caillou de plumes
Est entré dans l’eau.
Un poisson d’écume
En sort aussitôt.

Et les deux mains blanches
Promues oiseleurs
Cueillent l’avalanche
De l’arbre qui pleure.

(Pierre Coran)

 

Recueil: Le bonheur est dans le pré
Traduction:
Editions: Gautier Languereau

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A l’Orient (Guido Gezelle)

Posted by arbrealettres sur 31 août 2022



 

Jeanie Tomanek august [1280x768]

A l’Orient
une aube doit monter
un soir avant
la fixe éternité.
Enfin sera
exaucé le désir
de l’âme qui
ne voit pas et soupire.

(Guido Gezelle)

Illustration: Jeanie Tomanek

 

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