Arbrealettres

Poésie

Posts Tagged ‘se retirer’

BERCEUSE DE LA GRAND’MÈRE (Marie Noël)

Posted by arbrealettres sur 23 janvier 2024



Marie Noël
    
BERCEUSE DE LA GRAND’MÈRE

Dors maintenant, dors… Détache de ton âme
Ses pensers volants, le bruit du jour, sa flamme,
Laisse le temps s’en retirer tout bas…
Hier n’est plus, ce soir n’est rien, demain n’est pas.

Dors, ne crains rien, dors… Ce n’est rien que la vie,
Rien… cette minute expirante et suivie
Déjà d’une autre. Enfant, quels vains effrois !
On n’endure jamais qu’un moment à la fois.
Dors, ne tourne pas ton coeur pâle en arrière.
Dors, ne penche pas en avant ta lumière.

Fol est qui souffre au delà de l’instant ;
Le malheur d’aujourd’hui n’en demande pas tant.

Dors, n’attends rien, dors… Prends ce que Dieu te donne ,
Dors, laisse en aller l’amour qui t’abandonne.
Aime toujours. Va, pauvre enfant peureux,
On n’a pas besoin de bonheur pour être heureux.

Va, tout ira bien, dormons… Après, qu’importe ?
Je vois du soleil sur le seuil de la porte
De quoi poser le pied pour un seul pas.
Pour le second… il est trop tôt, ne cherche pas.

Dors, la paix sur nous sera bientôt levée.
Dors, la Mort sera tout à l’heure arrivée.
Laisse-toi porter par le temps qui court.
Il sait la route, dors… Vivre et mourir est court.

(Marie Noël)

 

Recueil: Les Chansons et les Heures / Le Rosaire des joies
Traduction:
Editions: Gallimard

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

CHERCHE TA PLACE (Marie Noël)

Posted by arbrealettres sur 22 janvier 2024



 Illustration: Robert Cattan
    
CHERCHE TA PLACE

Je m’en vais cheminant, cheminant, dans ce monde,
Chaque jour je franchis un nouvel horizon.
Je cherche pour m’asseoir le seuil de ma maison
Et mes frères et soeurs pour entrer dans leur ronde.

Mais las ! J’ai beau descendre et monter les chemins,
Nul toit rêveur ne m’a reconnue au passage,

Et les gens que j’ai vus ont surpris mon visage
Sans s’arrêter, sourire et me tendre les mains.
Va plus loin, va-t’en ! qui te connaît ? Passe !
Tu n’es pas d’ici, cherche ailleurs ta place…

J’ai vu sauter dans l’herbe et rire au nez du vent
Des filles pleines d’aise et de force divine

Qui partaient, le soleil sur l’épaule, en avant,
L’air large des pays en fleurs dans la poitrine…
Ah ! pauvre corps frileux même sous le soleil
Qui sans te ranimer te surcharge et te blesse.

Toi qu’un insecte effraye, ô craintive faiblesse,
Honteuse d’être pâle et d’avoir tant sommeil.

Va plus loin, va-t’en ! Qui te connaît ? Passe !
Tu n’es pas d’ici, cherche ailleurs ta place.

Ainsi qu’à la Saint-Jean les roses de jardin,
Fleurs doubles dont le coeur n’est plus qu’une corolle,
J’ai regardé fleurir autour de leur festin
Les reines, les beautés qu’on aime d’amour folle.

Las ! je t’ai vue aussi, toi, gauche laideron,
Mal faite, mal vêtue, âme que son corps gêne,

Herbe sans fleur que le vent sèche avec sa graine
Et que ne goûterait pas même un puceron…
Va plus loin, va-t’en ! Qui te connaît ? Passe !
Tu n’es pas d’ici, cherche ailleurs ta place.

De rien sachant tout faire, ici menant le fil,
Puis là, dessus, dessous, vite, vite, des fées,

Sous leurs doigts réguliers trouvent un point subtil,
Sans avoir l’air de rien, calmes et bien coiffées…
Toi qui pour ton travail uses le temps en vain,
Toi dont l’aiguille borgne, attentive à sa piste,

Pique trop haut, trop bas, choppe, accroche, résiste,
Prise aux pièges du fil tout le long du chemin,

Va plus loin, va-t’en ! Qui te connaît ? Passe !
Tu n’es pas d’ici, cherche ailleurs ta place.

D’autres, fermes esprits, têtes pleines de mots,
Connaissent tout : les dieux, les pays, leur langage,
Les causes, les effets, les remèdes, les maux,
Les mondes et leurs lois, les temps et leur ouvrage…

Tête qui fuis, et tel un grès à filtrer l’eau.
Laisse les mots se perdre à travers ta cervelle,
Ignorante qui crois que la terre est nouvelle
Tous les matins, et tous les soirs le ciel nouveau,

Va plus loin, va-t’en ! Qui te connaît ? Passe !
Tu n’es pas d’ici, cherche ailleurs ta place.

D’autres ont pris leur rêve au piège et l’ont tout vif
Enfermé malgré lui dans leur strophe sonore
D’airain vaste, d’or calme ou de cristal plaintif,
Et l’applaudissement des hommes les honore…

Mais toi ! Tes rêves, comme un vol de moucherons,
T’étourdissent, dansant autour de tes prunelles,
Et ta main d’écolier trop lente pour leurs ailes
Sans en saisir un seul s’égare dans leurs ronds.

Va plus loin, va-t’en ! Qui te connaît ? Passe !
Tu n’es pas d’ici, cherche ailleurs ta place.

D’autres, se retirant à l’ombre de leurs cils,
Patients, cherchent la vermine de leur âme
Et pèsent dans l’angoisse avec des poids subtils
Son ombre et sa clarté, sa froidure et sa flamme.

Mais toi qui cours à Dieu comme un petit enfant,
Sans réfléchir, toi qui n’as pas d’autre science
Que d’aimer, que d’aimer et d’avoir confiance
Et de te jeter toute en ses bras qu’Il te tend,

Va plus loin, va-t’en ! Qui te connaît ? Passe !
Tu n’es pas d’ici, cherche ailleurs ta place.

Sans beauté ni savoir, sans force ni vertu,
Être qui par hasard ne ressemble à personne,
Je sais bien qui je suis, l’amour ne m’est pas dû
Et ne pas le trouver n’a plus rien qui m’étonne.

Mais malgré moi j’ai mal… De l’hiver à l’hiver,
Je m’en vais et partout je me sens plus lointaine,
Seule, seule, et le coeur qu’en silence je traîne
Me semble un poids trop lourd, sombre, inutile, amer…

Va plus loin, va-t’en ! Qui te connaît ? Passe !
Tu n’es pas d’ici, cherche ailleurs ta place.

Bah ! c’est au même lieu que les chemins divers
Aboutissent enfin, le mien comme les vôtres.
Bonne à rien que le sort conduisit de travers,
Je ferai mon squelette aussi bien que les autres.

Mais où me mettrez-vous, mon Dieu ?… Pas en enfer ;
Je n’eus pas dans le mal assez de savoir-faire.
Et pas au paradis : je n’ai rien pour vous plaire…
Hélas ! me direz-vous comme le monde hier :

Va plus loin, va-t’en ! Qui te connaît ? Passe !
Tu n’es pas d’ici, cherche ailleurs ta place.

N’aurai-je au dernier jour ni feu, ni lieu, ni toit
Où reposer enfin ma longue lassitude ?
Ou m’enfermerez-vous — hélas ! que j’aurai froid ! —
Dans une lune vide avec ma solitude ?…

Mais à quoi bon, Seigneur, chercher la fin de tout ?
Vous arrangerez bien ceci sans que j’y songe.
Je m’en vais, mon chemin dénudé se prolonge…
Vous êtes quelque part pour m’arrêter au bout.

(Marie Noël)

 

Recueil: Les Chansons et les Heures / Le Rosaire des joies
Traduction:
Editions: Gallimard

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

Rumeur hauteur ampleur (Pierre Dhainaut)

Posted by arbrealettres sur 4 décembre 2023



arbre mer [800x600]

rumeur hauteur ampleur
de l’arbre où la mer se jette opulente au sein des branches
et se retire
à nouveau se déploie
les feuilles les embruns rafale
elle emplit muette une brève clarté
l’immensité

je suis cet arbre

(Pierre Dhainaut)

Illustration

 

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

LE VIEILLARD PHILOSOPHE (Chansons du XVIIIè)

Posted by arbrealettres sur 18 novembre 2023




    
LE VIEILLARD PHILOSOPHE

1

L’on compte quatre vingt deux ans !
Je crois qu’à cet âge
Il est temps d’abandonner le monde.
Je le quitterai sans regret,
Et gaîment je fais mon paquet ;
Bonsoir la compagnie.

2

Quand du monde je sortirai,
Je ne sais pas là où j’irai.
Mais en Dieu je me fie.
Il ne peut que de me mener bien ;
Ainsi je n’appréhende rien ;
Bonsoir la compagnie.

3

J’ai goûté de tous les plaisirs ;
J’en ai gardé le souvenir ;
A présent je m’ennuie.
Mais à force de venir vieux,
Peut-on se flatter d’être heureux ?
Bonsoir la compagnie.

4

Nul mortel n’est ressuscité
Pour nous dire la vérité
Du bien de l’autre monde.
Une profonde obscurité,
C’est le sort de l’humanité.
Bonsoir la compagnie.

5

Quand l’on prétend tout savoir
Depuis le matin jusqu’au soir,
L’on lit, l’on étudie
Mais par ma foi les plus savants
Sont comme moi des ignorants.
Bonsoir la compagnie.

6

Dieu fait tout sans nous consulter.
Rien ne lui peut résister.
Ma carrière est remplie,
Mais quand l’on n’est plus propre à rien
L’on se retire et l’on fait bien.
Bonsoir la compagnie.

7

Rien ne périt entièrement
Et la mort n’est qu’un changement,
Dit ma philosophie.
Que ce système est consolant,
Je chante en adoptant ce plan
Bonsoir la compagnie.

(Chansons du XVIIIè)
http://f.duchene.free.fr/berssous/index.htm

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

LE CHARME DU PLAISIR (Chansons du XVIIIè)

Posted by arbrealettres sur 18 novembre 2023




    
LE CHARME DU PLAISIR

1

Jeune beauté faite pour nos désirs
A la gaité joignez la volupté.
C’est la divinité
Qui soutient votre empire
Dans les bras d’un amant.
Que son cœur est charmant.
Qu’en pensez-vous ?
Bon je vous vois sourire.

2

Pour vos appas Lucie mon cœur soupire.
Laissez moi voir
Par dessous ce mouchoir
Ah le beau reposoir.
Souffrez que l’on admire.
Je voudrais que ma main
Y commette un larcin.
Qu’en pensez-vous ? (bis)

3

Quoi, vous boudez !
Lucie je me retire
J’irai plus bas chercher d’autres appas.
Si je fais du fracas
Vous n’aurez rien à dire ;
Si je donne du désir
Et aussi du plaisir
Qu’en pensez-vous ? (bis)

4

Il ne faut pas
Mourir vierge martyre.
Faisons un tour au palais de l’amour.
Des secrets de sa cour
Je vais vous instruire.
Son trône est un sofa,
Son sceptre le voilà
Qu’en pensez-vous ? (bis)

5

Suivez mes pas
Je suis un vaillant sire :
Cinq à six fois
C’est le moins de mes exploits
Cet ouvrage je crois,
C’est vous qui me l’inspirez.
Demain je reviendrai, je recommencerai
Qu’en pensez-vous ? (bis)

6

Fanchette, hé bien
Ne voulez-vous rien dire ?
Répondez donc si cela est ou non.
Vous savez qu’un garçon
Demande à se produire.
Son plus cher agrément
Est celui d’être amant
Qu’en pensez-vous (bis).

7

Qu’en pensez-vous
Plus belle que l’aurore ?
Vos yeux riant me rendront-ils content ?
Ne tardez pas longtemps
Tendre objet que j’adore.
Rendez-moi mon cœur joyeux.
Faites un amant heureux
Qu’en pensez vous ? (bis)

8

Qu’en pensez-vous ?
Ah daignez donc m’instruire.
Vos sentiments me semblent surprenants.
Un silence aussi grand !
Faites que mon cœur soupire.
Apprenez moi enfin
Quel sera mon destin.
Qu’en pensez-vous ? (bis)

9

Laissez charmer votre cœur Zémire
Pourquoi tarder
Puisqu’il faut s’engager.
Le temps est précieux
Quand le cœur le désire.
Comblerez-vous mes vœux ?
Oui, je lis dans vos yeux.
Qu’en pensez-vous ? (bis)

10

Oui cher Tircis votre amour j’accepte
Mais un amant doit agir prudemment.
Si je fus si longtemps
A demeurer muette,
C’est pour mieux sentir
Le charme du plaisir
Qu’en pensez-vous ?
Bon je vous vois sourire.

(Chansons du XVIIIè)

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

NON, ET PUIS OUI, MAIS DANS LES FORMES (Chansons du XVIIIè)

Posted by arbrealettres sur 17 novembre 2023



Illustration: Louis Marin Bonnet 
    
NON, ET PUIS OUI, MAIS DANS LES FORMES

1

Il est passé minuit
Je n’entends plus de bruit.
Mignonne mes amours,
Dormirez vous toujours ?
Ouvrez-moi la fenêtre
Je vous ferai connaître
Le tendre sentiment
D’un véritable amant.

2

Quel est cet étourdi
Qui se rend si hardi
De troubler mon repos
La nuit mal à propos ?
J’appellerai mon père
J’éveillerai ma mère.
Monsieur retirez-vous
Evitez leur courroux.

3

Calmez pour un moment
Votre ressentiment.
Mignonne écoutez-moi.
Je vous promets ma foi
Vous voyez mon martyre :
Je n’ose vous le dire.
Surtout pendant le jour
Je cache mon amour.

4

N’avez-vous point de peur
D’exposer mon honneur ?
Si quelqu’un nous voyait
Qu’est-ce qu’on dirait ?
Evitez le scandale,
Crainte que l’on étale
Tous vos doux entretiens
Aussi bien que les miens.

5

Je saisis cet instant
Mon petit cœur charmant,
Pour vous entretenir
Un moment à loisir.
Plus on a de tendresse
Plus on a de sagesse.
Ouvrez mon petit cœur
Faites-moi cet honneur.

6

Mon cher ami bonsoir.
Juste ciel, qu’il fait noir !
Je ne puis seulement
Vous voir mon cher amant.
Mais ce qui me console
J’entends votre parole.
Mon bonheur le plus doux
C’est d’être auprès de vous.

7

Le ciel comble mes vœux
Ah que je suis heureux.
Ma belle voulez-vous
Que je sois votre époux ?
Vous m’aimez, je vous aime.
Mon bonheur est extrême
Remplissez, s’il vous plaît
Mignonne mes souhaits.

8

Parlez à mes parents
D’un bon cœur j’y consens.
Que ce soit dès demain,
Touchez moi dans la main.
Parlez à mon cher père
Je gagnerai ma mère
Amant soyez discret
Gardez bien le secret.

9

Adieu, séparons-nous
Je prends congé de vous.
Ma poulette bonsoir
Adieu jusqu’au revoir.
Au lever de l’aurore
Je reviendrai encore
Te souhaiter le bon jour
De la part de l’amour.

(Chansons du XVIIIè)

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

Comment une jolie femme (Laoshu)

Posted by arbrealettres sur 29 juin 2023



Illustration: Laoshu
    
Comment une jolie femme pourrait-elle ne pas vieillir ?
Quand bien même voudrait-elle suspendre le temps,
Elle n’y parviendrait point.
Regardez donc ce pétale délicat,
Où donc son âme s’est-elle retirée ?

(Laoshu)

Recueil: Un monde simple et tranquille
Traduction: du chinois par Jean-Claude Pastor
Editions: Philippe Picquier

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

CE QUI SE LÈVE (Jean Mambrino)

Posted by arbrealettres sur 10 Mai 2023



    

CE QUI SE LÈVE

Une barque se meut dans les creux de l’esprit,
une voile, une vague où s’enfle le désir,
un élan né de soi quand le soi se retire,
une brise reçue à l’aube de l’esprit.

L’orage a la douceur de toute intimité.
Le mouvement fait fond sur l’air et sur l’écume.
L’acte reste vivant alors qu’il est posthume.
L’insaisissable est pris dans le temps dissipé.

(Jean Mambrino)

Recueil: Anthologie de la poésie française du XXè siècle
Editions: Gallimard

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

Apparition (Titi Robin)

Posted by arbrealettres sur 19 septembre 2022




    
Apparition

La beauté est divine
et, plus qu’humaine,
elle naît pourtant d’un simple regard,
des gestes de la servante,
du reflet de sa silhouette dans le lac de Pushkar,
du souvenir de son parfum mêlé à la sueur laiteuse,
du chant du qawwal, prière passionnée,
de l’abandon et de la possession des corps,
de la fatigue qui suit l’effort,
du sourire du gamin édenté comme du silence de l’ascète,
de ton refus digne comme de ma confiance inébranlable.
Hafez l’a si bien dit,
elle est comme la nouvelle lune qui éclaire doucement le chemin des égarés,
puis se retire sous le voile des nuages.

(Titi Robin)

Rajasthan, un voyage aux sources gitanes, 2004.

 

Recueil: La Beauté Éphéméride poétique pour chanter la vie
Traduction:
Editions: Bruno Doucey

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

PREMIER CHANT (Miguel Hernández)

Posted by arbrealettres sur 18 Mai 2022



Illustration: Antoni Miro
    
Poem in French, English, Spanish, Dutch and in Albanian, Arabic, Armenian, Bosnian, Bangla, Catalan, Chinese, Farsi, German, Greek, Hebrew, Hindi, Icelandic, Indonesian, Italian, Japanese, Kiswahili, Kurdish, Macedonian, Malay, Polish, Portuguese, Romanian, Russian, Sardo, Sicilian, Tamil

Painting Antoni Miro
Poem of the Week Ithaca 724, “FIRST SONG”
Miguel Hernández, Spain, 1910 – 28.3.1942

from ”Miguel Hernández, Obra completa”, Alianza Tres

– All translations are made in collaboration with Germain Droogenbroodt –

***

PREMIER CHANT

Le champ s’est retiré
quand il s’est vu assailli
par l’homme devenu fou.

Comme est devenu visible l’abîme
entre l’olivier et l’homme.

L’animal qui chante :
l’animal qui sait pleurer
et se reproduire,
s’est rappelé ses griffes.

Des griffes qu’il a vêtues de fleurs
et de grâce,
mais qu’ensuite il met à nu
dans toute leur cruauté.

Elles crissent dans mes mains.

Eloigne-toi mon fils,
je suis capable de t’en donner un coup,
je suis capable de t’en frapper
dans ta chair tendre.

Le tigre en moi est revenu.

Va-t’en ou je te lacère.
Aujourd’hui l’amour est la mort,
et l’homme épie l’homme.

(Miguel Hernández), Espagne, 1910 – 28.3.1942
Traduction de Germain Droogenbroodt – Elisabeth Gerlache

***

FIRST SONG

The field has retreated
seeing it is man’s
convulsive assault.

What an abyss is laid bare
between the olive tree and man!

The animal that sings:
the animal that can
cry and take root
recalls its claws.

Claws that it covered
with smoothness and flowers,
but which, in the end, he bares
in all their cruelty.

They crackle in my hands.
Keep away from them, boy.
I am ready to flash them,
into your soft flesh.

I’ve turned into a tiger.
Move away, or I’ll tear you apart.

Today love is death,
and man lies in ambush for man.

MIGUEL HERNÁNDEZ, Spain, 1910 – 28.3.1942
Translation Germain Droogenbroodt – Stanley Barkan

***

CANCIÓN PRIMERA

Se ha retirado el campo
al ver abalanzarse
crispadamente al hombre.

¡Qué abismo entre el olivo
y el hombre se descubre!

El animal que canta:
el animal que puede
llorar y echar raíces,
rememoró sus garras.

Garras que revestía
de suavidad y flores,
pero que, al fin, desnuda
en toda su crueldad.

Crepitan en mis manos.
Aparta de ellas, hijo.
Estoy dispuesto a hundirlas,
dispuesto a proyectarlas
sobre tu carne leve.

He regresado al tigre.
Aparta, o te destrozo.

Hoy el amor es muerte,
y el hombre acecha al hombre.

MIGUEL HERNÁNDEZ, España, 1910 – 28.3.1942

***

EERSTE LIED

Het veld heeft zich teruggetrokken
toen het zich bestormd zag
door de dolgeworden mens.
Welk een kloof wordt zichtbaar
tussen olijfboom en mens!

Het dier dat zingt:
het dier dat wenen
en zich voortplanten kan,
herinnerde zich zijn klauwen.

Klauwen die het met bloemen
en bevalligheid bekleedde,
maar die ze tenslotte
in al hun wreedheid ontbloot.

Ze knisteren in mijn handen.
Ga er van weg, mijn zoon,
Ik ben in staat ermee uit te halen,
ik ben in staat om ze
in je zachte vlees te slaan.

Ik ben weer tijger geworden.
Ga weg, of ik verscheur je.
Vandaag is liefde de dood,
en de mens beloert de mens.

Miguel Hernández, Spanje 1910 – 1942
Vertaling Germain Droogenbroodt

***

KËNGA E PARË

Fusha është tërhequr
përballë sulmit
tronditës të njeriut.

Oh, ç’humnerë është zbuluar
midis pemës së ullirit e njeriut!

Kafsha që këndon:
kafsha që mund
të qajë e të hedhë shtat
kujton kthetrat e saj.

Kthetrat që i mbulonte
me lule e butësi,
por që, në fund, i nxjerr në pah
me të tyren mizori.

Ato kërcasin në duart e mia.
Qëndro larg tyre, djalosh.
Unë jam gati t’i ngul,
në mishin tënd të butë.

Jam shndërruar në tigër.
Largohu, përndryshe do të t’copëtoj.

Sot dashuria është baraz me vdekje,
dhe njeriu në pritë për njeriun qëndron.

Miguel Hernández, Spanjë, 1910 – 28.3.1942
Përktheu: Irma Kurti
Translation into Albanian: Irma Kurti

***

الأغنية الأولى

الحقل هدم عندما رأى الرجل يندفع بعصبية.
يالها من فجوة كبيرة بين شجرة الزيتون والإنسان!

الحيوان الذي يغني:
الحيوان القادر على البكاء والنحيب ، يتذكر مخالبه.
المخالب التي غطاها بالنعومة والزهور …. أصبحت أخيرًا بائنة
بكل قسوتها.

تطقطق في يدي.
ابتعد عنهم يا بني.
أنا على استعداد لرؤية لمعان الضوء عليها وهي تنهش جسدك النحيل.
لقد عدت إلى طبيعة النمر. تراجع ، وإلا سوف أمزقك.
اليوم يصبح …
الحب هو الموت والإنسان يطارد أخيه الإنسان.

ميغال هرنانديز(MIGUEL HERNÁNDEZ)، اسبانيا، 1910-28.3.1942
ترجمة للعربية: عبد القادر كشيدة
Translated into Arab by Mesaoud Abdelkader

***

Առաջին երգը

Դաշտը նահանջել է
տեսնելով մարդու
ջղաձիգ հարձակումը:
Ինչպիսի՜ անդունդ՝ բացված
ձիթենու և մարդու միջև:
Կենդանին, որ երգում է,
կենդանին, որը կարող է
լաց լինել և արմատավորվել,
հիշում է իր ճանկերը:
Ճանկեր, որ քնքշորեն
ծածկում էր ծաղիկներով,
բայց որոնց, ի վերջո, մերկացնում է
ողջ դաժանությամբ:
Նրանք ճռթճռթում են իմ ձեռքերում:
Հեռու մնա նրանցից, տղա՛։
Ես պատրաստ եմ դրանք խրել
քո փափուկ մարմնի մեջ:
Ես վերածվել եմ վագրի։
Հեռացիր, թե չէ ես կպատառոտեմ քեզ։
Այսօր սերը մահ է,
և մարդը մարդու համար թակարդ է լարում:

Միգել Հերնանդես, Իսպանիա, 1910 – 28.3.1942
Անգլերեն թարգմանությունը Գերման Դրոգենբրոդտի և Ս. Բարքանի
Հայերեն թարգմանությունը Արմենուհի Սիսյանի
Translated into Armenian by Armenuhi Sisyan

***

প্রথম সংগীত

মাঠ করেছে প্রস্থান
দেখতে পেয়েই মানুষের আক্ষেপ জনক
আক্ষেপ জনক হঠাৎ প্রবল আক্রমণ ।

একি অতল গহ্বর অধিশায়িত অনাবৃত হয়ে
জলপাই গাছ আর মানুষের মধ্যে খানে!
যে প্রাণী গান গায়
যে প্রাণী কাঁদতে পারে আর
শিখর নিতে মনে করে তার নখর
যে নখর আবৃত হয়ে আছে
মসৃণতায় আর ফুলে নখর আবৃত,
কিন্তু, যেটি সবশেষে, অনাবৃত
তাদের সমস্ত নিষ্ঠুরতায় ।

তারা আমার হাতে ফাটল ধরায় ।
তাদের হতে দূরে থাকো, ছেলে ।
আমি তাদের চমকে দিতে প্রস্তুত,
তোমার শান্ত মসৃণ ও কোমল শরীরে ।

আমি পরিণত হয়েছি বাঘে ।
সরে যাও নয় আমি করব তোমায় ছিন্ন-বিচ্ছিন্ন ।
আজ ভালোবাসা করেছে মৃত্যুবরণ
এবং মানুষ ওত পেতে থাকে মানুষের জন্য ।

মিগুয়েল হার্নান্দেজ, স্পেন, ১৯১০- ২৮.০৩.১৯৪২
অনুবাদ জার্মেইন ড্রুজেনব্রুড্ট – স্ট্যানলি বারকান
Bangla Translation: Tabassum Tahmina Shagufta Hussein

***

PRVA PJESMA

Polje se povuklo
videći da je muško
konvulzivni napad.

Kakav je ponor ogoljen
između masline i čovjeka!

Životinja koja pjeva:
životinja koja može
plakati i pustiti korijenje
podsjeća na svoje kandže.

Kandže koje je pokrivala
sa glatkoćom i cvijećem,
ali koje je, na kraju, razotkrio
u svoj njihovoj okrutnosti.

Pucketaju u mojim rukama.
Drži se dalje od njih, dečko.

Spreman sam da ih bljesnem,
u tvoje meko meso.

Pretvorio sam se u tigra.
Makni se, ili ću te rastrgnuti.
Danas je ljubav smrt,
a čovjek leži u zasjedi za čovjeka.

MIGUEL HERNÁNDEZ, Španija, 1910 – 28.3.1942.
Translation into bosnian by Maid čorbić

***

CANÇÓ PRIMERA

S’ha retirat el camp
en veure abalançar-se
crispadament l’home.

Quin abisme entre l’olivera
i lhome es descobreix!

L’animal que canta:
l’animal que pot
plorar i arrelar,
va rememorar les seves arpes.

Arpes que revestia
de suavitat i flors,
però que, per fi, nua
en tota la seva crueltat.

Crepiten a les meves mans.
Aparta’t d’elles, fill.
Estic disposat a enfonsar-les,
disposat a projectar-les
sobre la teva carn lleu.

He tornat al tigre.
Aparta, o et destrosso.

Avui l’amor és mort,
i l’home assetja l’home.

MIGUEL HERNÁNDEZ, Espanya, 1910 – 28.3.1942
raducció al català: Natalia Fernández Díaz-Cabal

***

最早的歌

田地已经后退
看到它是人类的
痉挛性攻击。
一个深渊赤裸地放置
在橄榄树和人类之间!
这动物在歌唱:
这能嗥叫和
深入人心的动物
回忆起它的爪子。
它用光滑和
花朵掩盖的爪子,
但那些爪子,最终,他还是暴露
在他们所有的残暴中。
它们在我手中噼啪作响。
离他们远点,伙计。
我已准备好把它们
闪映进你柔软的肌肤里。
我已变成一只老虎。
走远点,否则我会把你撕成碎片。
今天,爱就是死亡,
而人类躺于为己而设的埋伏中。

原作:西班牙 米格尔·埃尔南德斯(1910-1942.3.28)
英译:杰曼·卓根布鲁特-斯坦利·巴坎
汉译:中 国 周道模 2022-3-19
Translated into Chinese by Willam Zhou

***

اولين سرود

ميدان عقب نشينى كرده بود
بعد از اينكه ديد مردانش
حمله‌یی بی امان داشته‌اند.
چه پرتگاهی آشکار شده است
بین درخت زیتون و انسان!
حیوانی که می‌خواند:
حیوانی که می تواند گریه کند
و ریشه بزند
پنجه‌هایش را بیاد می‌آورد.
پنجه‌هایی که با
نرمی و گلها عادت کرده
اما در آخر،
او‌ تحمل می‌کند
همه‌ی ظلم‌شان را.
آنها در دستان من می‌شکنند.
از آنها دور شو ، پسر.
من آماده‌ام تا آنها را
در بدن شما شعله‌ور کنم.
من تبدیل به ببر شده‌ام.
دور شو یا تکه پاره‌ات می‌کنم.
امروز عشق مرگ است
و انسان در کمین انسان است.

میگل هرناندز، اسپانیا( ۱۹۴۲-۱۹۱۰)
ترجمه از سپیده زمانی
Translated into Farsi by Sepedih Zamani

***

ERSTES LIED

Das Feld hat sich zurückgezogen
als es den Menschen sah,
wie er blindwütig außer sich geriet.

Welch ein Abgrund wird sichtbar
zwischen dem Olivenbaumund dem Menschen!

Das Tier, das singt:
das Tier, das weinen
und Wurzeln schlagen kann,
erinnerte sich an seine Krallen.

Krallen, die es bedeckt
mit Zartheit und Blumen,
aber sie am Ende, entblößt
in all ihrer Grausamkeit.

Sie knistern in meinen Händen.
Halte dich von ihnen fern, mein Sohn.
Ich bin bereit, sie herauszuholen,
sie zu breiten
über dein zartes Fleisch.

Ich bin zum Tiger geworden.

Geh weg, oder ich zerreiße dich.

Heute ist die Liebe der Tod,
und der Mensch belauert den Menschen.

MIGUEL HERNÁNDEZ, Spanien, 1910 – 28.3.1942
Übersetzung: Germain Droogenbroodt –
Wolfgang Klinck

***

ΠΡΩΤΟ ΤΡΑΓΟΥΔΙ

Το έδαφος υποχώρησε βλέποντας
τη σπαστική επίθεση του ανθρώπου
μια άβυσσος πάνω
απ’ τα ελαιόδεντρα και τον άνθρωπο.

Το κτήνος που τραγουδεί
και μπορεί να κλάψει
μπορεί ν’ απλώσει ρίζες
και να κρύψει τα νύχια του
που είχε στολίσει με λουλούδια
μα που φέρνουν όλη του τη βία.

Νύχια που κόβουν τα χέρια μου.

Απόφευγε τα παιδί μου
έτοιμος είμαι να τα μπήξω
στην απαλή σου σάρκα.

Σήμερα έχω γίνει τίγρις,
φύγε μακριά μην σε ξεσχίσω.

Σήμερα η αγάπη είναι θάνατος
κι ο άνθρωπος καιροφυλακτεί
για τον επόμενο άνθρωπο

Miguel Hernández, Spain, 1910 – 28.3.1942
Μετάφραση Μανώλη Αλυγιζάκη
Translated into Greek by Manolis Aligizakis

***

שיר ראשון /מיגל ארננדס
MIGUEL HERNANDEZ, Spain, 1910 – 1942
(מת ממחלה בכלא הספרדי ב-28 במרץ 1942,
שם נדון למוות, בזמן שלטונו של הרודן פרנקו)

הַשָּׂדֶה נָסוֹג
בִּרְאוֹתוֹ שֶׁזּוֹ תְּקִיפָה
עֲוִיתִית שֶׁל אָדָם.

אֵיזוֹ תְּהוֹם נֶחְשֶׂפֶת
בֵּין עֵץ הַזַּיִת לָאָדָם!

הַחַיָּה שֶׁשָּׁרָה:
הַחַיָּה שֶׁיְּכוֹלָה
לִבְכּוֹת וְלָטַעַת שֹׁרֶשׁ
נִזְכֶּרֶת בִּטְפָרֶיהָ.

טְפָרִים שֶׁכִּסְּתָה
בַּעֲדִינוּת וּבִפְרָחִים,
אֲבָל שֶׁאוֹתָם, בְּסוֹפוֹ שֶׁל דָּבָר, הִיא נוֹשֵׂאת
בְּכָל אַכְזָרִיּוּתָהּ.

הֵם מִתְפַּצְפְּצִים בְּיָדַי.
תִּתְרַחֵק מֵהֵם, יֶלֶד.
אֲנִי מוּכָן לְהַבְזִיק אוֹתָם
לְתוֹךְ בְּשָׂרְךָ הָרַךְ.

הָפַכְתִּי לְנָמֵר.
הִתְרַחֵק, אוֹ שֶׁאֶקְרַע אוֹתְךָ.

הַיּוֹם אַהֲבָה הִיא מָוֶת,
וְאָדַם שׁוֹכֵב בְּמַאֲרָב לְאָדָם.

תרגום מספרדית לאנגלית: ג’רמיין דרוגנברודט וסטנלי ברקן
תרגום מאנגלית לעברית: דורית ויסמן
הציור של
ברית / טאראס שֶׁבְצֶ’נְקוֹ, אוקראינה
Translated into Hebrew by Dorit Weisman

**

पहला गाना

मैदान पीछे हट गया है
आदमी के ऐंठन हमले को देखकर।
क्या रसातल नंगे रखा गया है
जैतून के पेड़ और मनुष्य के बीच!
वह जानवर जो गाता है:
वह जानवर जो रो सकता है
और इसकी जड़ ले सकते हैं
अपने पंजों को याद करता है।
पंजे जो ढका हुआ था
कोमलता और फूलों से,
लेकिन जो, अंत में,
वह इसे उनकी सारी क्रूरता को उजागर करता है।
वे मेरे हाथों में चटकते हैं।
उनसे दूर रहो बेटा।
मैं उन्हें फ्लैश करने के लिए तैयार हूं,
अपने कोमल मांस में।

Hindi translation by Jyotirmaya Thakur.

***

FYRSTI SÖNGUR

Akurinn hörfar
þegar hann sér að þetta er
ofsaleg árás mannsins.

Hvílíkt hyldýpi kemur í ljós
milli ólífutrésins og mannsins!

Dýrið sem syngur:
dýrið sem getur
grátið og fest rætur
minnist klónna sinna.

Klónna sem hann faldi
með stimamýkt og blómum,
en sem hann ber, þegar allt kemur til alls,
af fullkominni grimmd.

Það brakar í þeim í höndum mínum.
Komdu ekki nálægt þeim, drengur.
Ég er vís til að skjóta þeim fram,
inn í mjúkt hold þitt.

Ég er orðinn tígur.
Farðu frá, annars ríf ég þig í tætlur.

Í dag er ástin dauði,
og maðurinn situr um manninn.

MIGUEL HERNÁNDEZ, Spáni, 1910 – 28.3.1942
Þór Stefánsson þýddi eftir enskri þýðngu Germains Droogenbroodt og Stanleys Barkan
Translated into Icelandic by Thor Stefansson

***

LAGU PERTAMA

Medan tempur mengendur
melihat manusia diserang
diterkam
Betapa jurang terbentang
antara pohon zaitun dan manusia !

Binatang yang bernyanyi:
binatang yang dapat
menangis dan cakar
yang mengakar.

Cakar yang diselebung
kelembutan bunga
akhirnya terungkap
dalam segala kejam.
Cakar itu berderak dari tanganku.
Menjauhlah dari cakarku, nak.
Aku siap menancapkan cakar ,
ke dagingmu yang lembut.

Aku telah berubah menjadi harimau.
Pergi, atau aku akan mencabikmu.

Hari ini cinta adalah kematian,
dan manusia tiarap untuk meyergap manusia.

MIGUEL HERNÁNDEZ, Spain, 1910 – 28.3.1942
Translation Lily Siti Multatuliana (Indonesia)

***

AN CHÉAD AMHRÁN

Cúlaíonn an gort
ó ionsaí coscrach
an trodaí.

¡Duibheagán ag oscailt
Idir an fear agus na crainn ológ!

An t-ainmhí a chanann,
An t-ainmhí a chaoineann,
A chuireann fréamhacha,
A tharraingíonn siar a chrúba.

Crúba folaithe
—ag béal binn—
A nochtar, anois,
Gan trua gan taise.

Réabann na crúba trí mo lámha.
Fainic thú féin, a mhic!
Fonn orm iad a shá
Go feirc
Isteach i do cholainn choil.

Seo chugainn an beithíoch alta,
Fainic a dhíbheirg!

Feasta is ionann breith is bás,
Fríd idir fuath is comhbhá.

MIGUEL HERNÁNDEZ, an Spáinn, 1910 – 28.3.1942
Leagan Gaeilge le Rua Breathnach

***

PRIMO CANTO

Il campo si è ritirato
guardando il convulso
assalto all’uomo.

Che abisso si è manifestato
tra l’olivo e l’uomo!

L’animale canta:
l’animale che può
piangere e mettere radici
ricorda i suoi artigli.

Artigli che copriva
di morbidezza e fiori,
ma che, alla fine, ha svelato
in tutta la loro crudeltà.

Crepitano nelle mie mani.
Allontanati da loro, figliolo.
Sono pronto ad affondarli,
nella tua tenera carne.

Mi sono trasformato in una tigre.
Vattene via, o ti faro a pezzi.

Oggi l’amore è morte,
l’uomo dà la caccia all’uomo.

MIGUEL HERNÁNDEZ, Spagna, 1910 – 28.3.1942
Traduzione: Germain Droogenbroodt – Luca Benassi

***

最初の歌

戦場は後退し
そこに見るのは人間の発作的な暴行の跡
オリーブの木と人の間に
なんという深い闇がむき出しになっているのだ
歌を歌う動物は
泣いて留まることのできる動物は
その爪を思い出す
なめらかな花でおおわれた爪が
最後には残忍さが露わとなった
それは私の手の中で音を立てて崩し
彼らの眼に触れないようにしよう
私は光を送り
柔らかな肉に変えよう
私は虎となった
去り行け
さもないと私はおまえを食いちぎる
今日、愛は死である
そして人は人を待ち伏せる

ミゲル・ヘルナンデス(スペイン,1910-1942
Translated into Japanese by Manabu Kitawaki

***
WIMBO WA KWANZA
Uwanja umerudi nyuma kwa kuona ni shambulio la degedege la mtu.
Ni shimo gani lililowekwa wazi kati ya mzeituni na mwanadamu!
Mnyama anayeimba:
Mnyama anayeweza kulia na kuota mizizi anakumbuka makucha yake.
Makucha ambayo alifunika na laini na maua,
lakini ambayo, mwishowe, anaonyesha katika ukatili wao wote.

Zinapasuka mikononi mwangu.
Kaa mbali nazo, kijana.
Niko tayari kuzionyesha kwa haraka, katika nyama yako nyororo.
Nimegeuka kuwa simba marara.
Ondoka au, nitakupasua.
Leo upendo ni kifo,
na mwanadamu humvizia mwanadamu.

MIGUEL HERNÁNDEZ, Spain, 1910 – 28.3.1942
Watafsiri ni Germain Droogenbroodt, Stanley Barkan na Bob Mwangi Kihara
Translated into Kiswahili by Bob Mwangi Kihara

***

STIRANA YEKÊ

Kewşenê xwe şwînda vekşand
gava merî dîtin
çawa ew bikwîranî ji xwe derket.

Çi çalek wê xwîyabe
di navbera dara zêtwînê û meriyan de!

Ajel, ê distirê:
Ajel, ê digirî
û reh diçizirin
neperûşkên xwe anîn bîra xwe.

Neperûşkên bi nezaketiyê û kulîkan
hatine têewrdan
lê ew li dawiyê
ji hemî dirindiya xwe rwîtbû.

Ew di destên min de digurînin.
Xwe jê dwîrxîne, kurê min.
Ez amademe ji nû v wan vegerînim,
weha hazirkbikim
li ser goştê te yî nazik.

Ez bûme piling.
Dwîrkeve, yan jî ezê te perçebikim.

Îro evîna minrinê ye,
û merî çehvtengiyê li merî dike.

MIGUEL HERNÁNDEZ 1910 – 28.3.1942, Êspaniya
Translation into Kurdish by Hussein Habasch

***

ПРВА ПЕСНА

Полето се повлече
гледајќи дека се работи за човечки
конвулзивен напад.
Каква гола бездна лежи
помеѓу маслиновото дрво и човекот!

Животното што пее:
животното што може
да плаче и да закоренува
се сеќава на своите канџи.

Канџи што си ги покриваше
со мазнотија и цвет,
но кои, на крајот, почнува да си ги носи
во сета своја суровост.

Пукаат тие во моите раце.
Држи се настрана од нив, момче.

Подготвен сум да ги заријам
во твоето меко месо.

Сум се претворил во тигар.
Тргни се настрана или ќе те раскинам.

Денес љубовта е смрт
и човек човека го чека во заседа.

Мигел Хернандез, Шпанија 1910 – 28.3.1942
Превод: Жермен Дрoгенброт, Стенли Баркан и Даниела Андоновска-Трајковска

***

LAGU PERTAMA
Medan sudah berundur
apabila melihat serangan manusia
yang bingung.

Jurang dibentang lapang
antara pokok zaitun dengan manusia!

Binatang yang berlagu:
binatang yang boleh
menangis dan bertapak
mengingati kukunya.

Kuku yang ditutupnya
dengan kelicinan dan bebunga,
tetapi yang, pada akhirnya, dia tanggung
dalam seluruh kekejamannya.

Ia berderak dalam tanganku,
Jauhi ia, budak,
Aku bersedia untuk mencurahnya
ke daging lembutmu.

Aku telah menjadi harimau.
Pergi jauh, atau akan kukoyak dirimu.

Cinta hari ini ialah kematian
dan manusia menyerang hendap manusia.

MIGUEL HERNÁNDEZ, Spain, 1910 – 28.3.1942
Terjemahan IRWAN ABU BAKAR
Translated into Malayan by Irwan Abu Bakar

***

PIEŚŃ PIERWSZA

Cofnęło się pole
widząc, jak
miota się w furii czlowiek.

Jakaż odkrywa się przepaść
między drzewem oliwnym a człowiekiem !

Zwierzę, które śpiewa
zwierzę, które potrafi
płakać I zapuszczać korzenie
przypomniało sobie o swoich pazurach.

Pazurach, które przystraja
w łagodność i miłe słówka
lecz które w końcu obnaża
w pełni okrucieństwa.

Chrzęszczą na moich dłoniach.
Z daleka od nich, synku.
Jestem gotowy je wbić
gotów rzucić ich cień
na Twoje drobne cialo.

Powróciłem do postaci tygrysa.
Odejdź, bo cię rozerwę.

Dziś miłość równa się śmierci
i człowiek czatuje na człowieka

MIGUEL HERNÁNDEZ, Hiszpania, 1910 – 28.3.1942
Przekład na polski: Mirosław Grudzień – Anna Maria Stępień
Translated to Polish: Mirosław Grudzień – Anna Maria Stępień

***

PRIMEIRA CANÇÃO

O campo retirou-se
ao ver o homem
avançar crispadamente.

Que abismo se descobre
entre a oliveira e o homem!

O animal que canta:
o animal que pode
chorar e deixar raízes,
lembrou-se que tinha garras.

Garras que revestia
com suavidade e flores,
mas que, no final, mostra
com toda a sua crueldade.

Estalam nas minhas mãos.
Afasta-te delas, filho.
Estou pronto para as espetar,
pronto para as lançar
sobre a tua carne leve.
O tigre regressou.
Afasta-te, se não destruo-te.

Hoje, o amor é morte,
e o homem persegue o homem.

Miguel Hernández, Espanha, 1910 – 28.3.1942
Tradução portuguesa: Maria do Sameiro Barroso

***

PRIMUL CÂNT

Câmpul s-a dus
văzând cum omul
se clatină încordat.

Adânc e abisul ce se cască
între măslin și om!

Jivina cântătoare
e animal capabil
să plângă și să prindă rădăcini,
cu gheare renăscute.

Gheare tandru îmbrăcate
în frăgezimi de flori,
ce sfârșesc despuiate
în crudă goliciune.

În mâini ele îmi trosnesc.
Copile, fugi de ele!
Căci gata-s să le afund,
să ți le înfig degrabă
în carnea diafană.

Tigrul s-a întors.
Ferește, că te omor!

Azi, dragostea e moarte,
iar omul, după oameni gonește.

MIGUEL HERNÁNDEZ, Spania, 1910 – 28.3.1942

Traducere: Gabriela Căluțiu Sonnenberg
Translated into Romanian by Gabriela Căluțiu Sonnenberg

***

ПЕРВАЯ ПЕСНЯ

Поле расступилось,
когда в него вошла
толпа озлобленных мужчин.

Какая пропасть обнажилась
между рощею оливок и людьми!

Зверь тут поет
Зверь плачет
Зверь, что родит зверей,
вдруг когти выпустил.

Когти изящные
в цветах,
но обнажаются
во всей жестокости.

Они ломаются в моих руках.
Мой сын, уйди,
Я их достану сам,
из тела теплого, из тела твоего
я их смогу достать.

Я снова стану тигром.
Уйди, иначе загрызу.

Любовь сегодня смертью оказалась,
а люди караулят вдруг людей.

МИГЕЛЬ ЭРНАНДЕС Испания, 1910 – 28.3.1942
Перевод Гермайна Дрогенбродта
Перевод на русский язык Дарьи Мишуевой

***

CANTONE PRIMA

S’est istesadu su campu
a bìere s’òmine
lanzandesie de repente.

Ite gorropu si discoberrit
intra de s’uliu e s’òmine!

S’animale chi cantat:
s’animale chi podet
prangher e ponner arrèxinis,
ammenteit sas brancas suas.

Brancas chi torraiat a bestire
de dulchesa e flores,
perou chi a s’acabada, ispollat
in totu sa malidade sua.

Isciopitant in sas manos mias.
Istesiatiche dae issas, fizu.
Las poto puru pregonare,
las poto puru imbolare
suba de sa carre tua lèbia.

So’ torradu a sa trighe.
istesiatiche, o ti destrossu.

Oe s’amore est morte,
e s’òmine pessighet a s’òmine.

Miguel Hernández, España, 1910 – 28.3.1942
Translated into Sardo by Gianni Mascia

****

PRIMA CANZUNA

Lu pratu si ritirau
vidennu l’attaccu
scunvulgenti di l’omu.

Chi abbissu si scupriu
ntra l’alivu e l’omu.

L’armali chi canta:
l’armali ca pò
chianciri e mettiri radichi
si ricurdau c’avia artigghi.

Artigghi ca cupreva cu
ducizza e ciuri,
chi a l’urtimata ammustra
cu tutta la so ferocia.

Mi sbattunu ntra li manu.
Scanzati d’iddi, figghiu.
Sugnu dispostu a zziccarili,
dispostu a proiettarili
supra la to carni dilicata.

Sugnu di novu tigri.
Arrassati o ti distruggiu
Oggi l’amuri è morti
e l’omu pustìa a l’omu.

Miguel Hernández, Spain, 1910 – 28.3.1942
Traduzioni in sicilianu di Gaetano Cipolla

***

முதல் பாட்டு

ம னிதனுடைய
குழப்பத் தாக்கத்தால்
நி ல ம் நீங்கிவிட்டது
ஆலிவ் மரத்திற்கும் மனிதனுக்கும்
இடையே ஆழம் மறைந்து விட்டது
பாடும் மி ருகம் அழக்கூடிய மிருகம்
வாழக்கூடிய மிருகம்
தனது நகங்களை
நினைத்துப் பார்க்கிறது
மிருதுவாகவும் , மலர்களோடும்
மூடப்பட்டிருந்த நகங்கள்
இறுதியில் கொடுமையில்
மறைந்து விடுகிறது.
எனது கைகளில் முறிந்து எங்கோ இருக்கிறது
சி று வனே
நான் அதை திடீரென
ஒளி தரசசெய்கிறேன்
உனது மென்மையானதசையில் !
நான் புலியாக மாறிவிட்டேன்
என்னைவிட்டுப் போய்விடு
இல்லையெனில்
உன்னைக் கிழித்து விடுவேன் !
இன்று அன்பு என்பது இறப்பு
இன்று மனிதன், மனிதனுக்காக
பாயப் பதுங்கி இருக்கிறான்
ஆக்கம் மொழிமாற்றம்

மிகுல் கர்னாண்டஜ் ஸ் பெயின் 1910 – 28.03.1942
Translated into Tamil by DR. N V Subbaraman

Recueil: ITHACA 724
Editions: POINT
Site: http://www.point-editions.com/en/

FRIENDS ITHACA
Holland: https://boekenplan.nl
Poland: http://www.poetrybridges.com.pl
France: https://arbrealettres.wordpress.com
Poland: http://www.poetrybridges.com.pl
Romania: http://www.logossiagape.ro; http://la-gamba.net/ro; http://climate.literare.ro; http://www.curteadelaarges.ro.; https://cetatealuibucur.wordpress.com
Spain: https://www.point-editions.com; https://www.luzcultural.com
India: https://nvsr.wordpress.com; https://ourpoetryarchive.blogspot.com>
USA-Romania: http://www.iwj-magazine.com/journal02

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »